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Terre des Éléments

Renaissance


Eleidon
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Les soleils de plomb jetaient leurs rayons ardents sur les flaques de sang séché qui imprégnaient constamment le sol de la cité. Dans le ciel, à peine quelques aigles qu'on voyait tourbillonner dans les courants ascendant, juste de l'autre côté des murailles indestructibles. Sans doute profitaient-ils de cette heure bénie pour fondre sur les quelques rongeurs qui oseraient pointer leur museau hors de leur tannière. Parfois une silouhette drappée longeait les murs, seuls ses pas brisant le silence le temps de quelques crissements. Profitait-elle de la fraîcheur des ombres ou craignait-elle une rencontre ? Qu'importe ! On pouvait aussi y voir des combattants en armure rutillante, fiers et si peu discrets dans la carapace de métal dans laquelle ils étaient engoncés. Tous ne possédaient pas un minimum de grâce dans leurs mouvements. Barbaresques, voilà ce que certains étaient.

Soudain un feulement rauque fit résonner les alentours. Les improbables passants se figèrent. Les battements d'ailes gigantesques, tels de colossaux soufflets de forge, ponctuèrent le passage du monstre ailé. Parfois un rugissement se faisait entendre, ou encore les craquements de la roche sous l'action du souffle embrasé du monstre. Les hautes murailles, qui pouvaient devenir les cloisons d'un tombeau, paraissaient pour l'instant terriblement accueillantes et protectrices.

Puis le silence feutré revint. Les bruissements de la fontaine purent de nouveau être entendus. Les restes carbonisés de quelque plante ou humanoïde imprudent grésillaient encore. Gertrude pestait contre le reptile antidéluvien, devant sa rangée de draps roussis, salis ou troués par les scories. Ces sales bêtes ne pouvaient pas faire un peu plus attention ? Elle avait fait la lessive ce matin même !

Et partout la vie doucement reprenait ses droits. La vie mais aussi la mort, le cycle des meurtres ne s'arrêtant jamais à Melrath Zorac.

Mais laissons là ces détails futiles. Il n'est pas encore temps pour moi de faire mon entrée. Laissons quelques heures passer...

Ah c'est mieux ! Les lunes projettent enfin leur obscurité protectrice. Les ténèbres ont pris possession des lieux, à moi d'investir ces dernières...

Mon corps décharné, ankylosé, peine à se mouvoir sans bruit alors que je descends les escaliers. Quelques rares clients s'attardent encore, le nez dans leur chope, le regard hagard de celui qui a trop vu d'horreurs dans sa journée et a trop bu pour les oublier. Certains sont déjà affalés sur la table. La patrone somnole, la tête appuyée contre son bras. En passant je jette quelques pièces sur le comptoir, elle prend à peine le temps de les compter puis les empoche.

L'air de la nuit, frais, presque froid, me réveille complètement. Personne à l'horizon, le clapotis de l'oasis et le chant des criquets vêt le lieu d'une chape de sérénité. Pourtant il ne faut pas s'y tromper. Bien que plus sûr, ce lieu n'est pas à l'abris d'un assaut de mes ennemis.

Mes pas fatigués contournent la petite étendue d'eau. Quelques grenouilles fuient mon passage, et je repousse du bout du pied quelques crabes trop téméraires. Je suis trop las pour transformer cette mare en charnier.

Je laisse derrière moi l'oasis et passe les sentinelles sans un bruit. Melrath Zorac est tout aussi dangereuse la nuit, mais on a au moins l'avantage de ne pas se faire repérer à l'autre bout de la rue par des tueurs en mal de justice. Les bâtiments défilent, sinistres dans leur simplicité usuelle. Personne en vue. Des sandalettes claquent soudain, et j'ai à peine le temps d'apercevoir une cape colorée disparaître à l'angle de la taverne. ître frappé du sceau de Kilinaí« le Grand signifie beaucoup pour les faibles, qui préfèrent bien souvent sauver leur peau.

Ma peau. Il est justement question de cela ce soir. J'ai donné rendez-vous à la ténébreuse succube qui a accompagné mes premiers pas ici. Mes jambes décharnées me mènent à vitesse réduite jusque devant la tristement célèbre auberge du sud. Nul doute que chaque centimètre carré du terrain alentour est baigné du sang de centaines d'aventuriers imprudents. Mes tendons commencent déjà à être douloureux, mes articulations craquent. Je suis perclus de courbatures et sais trop bien pour quelle raison et ce qui m'attend à terme. Enrayer la machine n'a été possible qu'un temps donné. Un temps aujourd'hui révolu. Mon corps me lâche. Mais j'ai la solution. Il me faut seulement de l'aide. Et la belle créature aux cheveux blancs possède ce qu'il faut pour m'épauler. Et je lui fais confiance. Pas seulement parce qu'elle est Ombre.

Je fais à présent face à l'entrée de l'auberge, légèrement sur le côté pour plus de discrétion. Je scrute l'encadrement de la porte, tentant d'obliger mes pauvres yeux humains si imparfaits à percer l'obscurité dans laquelle devrait se tenir Ophelia...

Modifié (le) par Eleidon
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Une étrange chaleur sur mon visage... Si chaude, mais j'ai l'impression qu'elle peut être agressive. J'ouvre les yeux, lentement. Mais malgré cette précaution, une lumière m'aveugle temporairement. Le soleil... Ca faisait longtemps.

Quand je m'habitue enfin à cette luminosité, je regarde autour de moi. Un peu déboussolée... Je ne sais plus ce que j'ai fait la veille. Il y a eu tellement de choses ces derniers temps... Son arrivée à lui, les déplacements continuels pour aller à chaque fois à un autre endroit. Je ne suis pas sédentaire, mais parfois, tout ça m'épuise. Sans doute me suis-je précipitée dans la première auberge qui était sur ma route... Et me suis-je brutalement endormie dans un lit. Ca doit être ça.

Je me lève, m'étire rapidement puis regarde par la fenêtre. A la vue du paysage, je suis dans l'auberge du sud. Quelle belle auberge pour dormir tranquille...

Je me regarde dans le miroir, chaque parcelle de mon visage y passe. Pas de cernes, mes yeux sont assez grands ouverts... Ca devrait aller. Puis je regarde mes oreilles. Grandes. Pointues. Fines. Des oreilles d'elfes. Depuis que Stanislas, plus communément nommé à l'heure actuelle Ponelfe, a fait son discours sur l'évolution et qu'il a découvert "“ à tort ou à raison "“ que les elfes sont une race inférieur aux humains, je regarde mes oreilles différemment. Suis-je réellement inférieure aux autres ? Ma race n'est-elle pas pareille que celle des humains ? A part certaines de nos caractéristiques physiques... Je ne vois pas en quoi nous sommes différents. J'irais même à dire que les elfes sont plus beaux que les humains. Dans les légendes, on dit aussi qu'ils sont plus puissants... Il va falloir que je ressorte mes vieux livres et que j'aille un jour importuner ce Ponelfe. Oui, j'ai bien dis importuner.

Avant de quitter ma chambre, une chose - aussi minuscule soit elle - attire mon attention. Sur la table de chevet, une lettre décachetée est posée. Sans doute l'aubergiste, Gertrude, me l'a t'elle apportait la veille.

Je la relis rapidement...

Chère Ophelia,

Je me trouve actuellement dans une situation difficile, et j'aurais besoin de ton aide pour effectuer une certaine tâche. Mon corps se meurt suite aux substances qu'il a absorbées ces dernières années. Je n'ai pas envie de continuer mon existence en tant qu'image intangible. Je dois donc investir un nouveau corps. Celui-ci devra être suffisamment puissant pour que mon intrusion ne le délite pas. Je pourrais tuer quelqu'un puis lui voler son corps, mais cela abîmerait l'enveloppe corporelle.

Acceptes-tu de m'aider ? Je t'en serais très reconnaissant...

Eleidon

Oui... J'ai presque oublié ce détail. Acceptant cette rencontre, je dois le rejoindre aujourd'hui, et ici même. Il ne devrait pas tarder d'ailleurs...

Récupérant rapidement mes affaires, je sors de ma chambre. Puis avant de partir, je me dirige vers Gertrude, et sans un regard envers elle, je paye mon séjour. Plus je passe de temps sur ces terres, et plus cette aubergiste devient rapace à ses heures perdues... Pitoyable humaine. Et après, on ose dire que ces voleurs sont plus haut placé que ma race ? Calomnie ! Tout ça a vraiment le don de me mettre de mauvaise humeur...

Finalement, c'est toute saumâtre que je sors de l'auberge... Déjà attendu.

Je regarde mon quémandeur à l'encadrure de la porte. Frêle silhouette décharnée de toute chair, que l'on se demande seulement si un souffle de vie réside encore en lui, si un simple coup quelconque ne suffirait pas à le faire tomber... Mort.

« Eleidon... Est-ce vraiment toi ? »

Il y a encore quelques jours il était vivant, fort... Aujourd'hui il est faible, ses membres sont atrophiés, il n'est plus que l'ombre de lui-même... Comme si sa vie ne tenait plus qu'à un fil.

« Tu fais vraiment pâle figure, à te voir je comprends pourquoi la moitié des habitants de Melrath te fuis. Cependant, je ne peux pas accepter ta requête. »

Il est vrai que je suis sans doute la seule qui puisse l'aider en cet instant... Mais je refuse d'utiliser à nouveau mes pouvoirs. Etre une succube... Ce n'est pas une partie de plaisir. Je dois dire que depuis que j'ai rencontré ce guerrier, j'ai tout fais pour cacher mes pouvoirs, pour oublier ma condition... Pour essayer de vivre. J'ai même conservé ma véritable forme, elfique. Les réutiliser, c'est comme si je n'avais rien fait durant toutes ces années.

Cependant, je sais aussi que je ne peux pas abandonner le jeune nécromant... Jusqu'à présent, j'ai toujours voulu le protéger... Refuser, serait faillir à cette tâche. De plus la vue d'Eleidon avec ce corps dénaturé de toutes chairs, de toutes émotions, de toute... vie... sans essayer de l'aider, me mortifierais également.

Je soupire. C'est un dilemme, comme je ne les aime pas. Comme je les ai toujours refusés. Mais aujourd'hui, je suis prise au piège avec mon égoïsme et le dernier espoir qu'il place en moi. Que faire ? Plus je réfléchis, et plus ces deux forces entrent en conflits...

Après quelques minutes de réflexion où le monde semble s'être arrêté pour moi, je reprends la parole.

« Comment sais-tu qui je suis vraiment ? Je ne l'ai révélé à personne... Et personne ne doit jamais le savoir. Cependant, si tu tiens vraiment à la vie, alors je t'aiderais... Mais garde cela secret... Réfléchis bien. »

Oui... Toi, nouvel arrivant... Aussi bien sur ces terres que chez les Ombres, qui es-tu réellement, et à quel point me connais-tu ?

Modifié (le) par Ophelia
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