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Terre des Éléments

Suyvel

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Tout ce qui a été posté par Suyvel

  1. La religion est un sujet complexe dans la société drow. Pour autant, elle tient une place importante dans le fonctionnement de certaines cités, et elle a fortement marqué l'histoire de mon peuple. Même si le sujet m'incommode, je me dois de l'aborder pour que tout un chacun puisse comprendre de quoi il retourne. Je vais ajouter ces notes à l'index de mon journal.
  2. Lorsque les elfes n’étaient qu’un seul peuple, les drows vénéraient l’Unique, comme tous les autres. C’est le grand schisme qui a tout changé : les elfes noirs disent que le Créateur les a trahis au profit de leurs cousins sylvains, et abandonnés durant leur exil, mais la vérité semble être différente. D’après les elfes de la surface, ce sont les drows qui se sont détournés de l’Unique, initiant par là-même le grand schisme à venir, et leur chute. Après cela, une partie du peuple drow a cultivé un athéisme sans faille, pendant que l’autre se tournait vers certaines divinités non-inféodées à l’Unique. Ce qui m’amène à un sujet que je déteste par-dessus tout : le culte de Lloth. Dans les villes où il s’est implanté, il a insufflé les préceptes de cette divinité dans la culture drow et pris le pouvoir. Lloth est une déesse jalouse, tout adepte d’une autre religion sera donc persécuté et probablement tué s’il s’adonne à des activités religieuses dans une cité drow. Le simple fait de prononcer le nom d’une autre divinité est passible de mort si d’aventure une prêtresse de Lloth vous entend le faire. Cette règle est surtout valable pour les drows, non pour les étrangers – qui sont tous des incroyants et des hérétiques aux yeux du clergé de Lloth – , mais si une prêtresse souhaite sévir en entendant un étranger mentionner un autre dieu, elle a toute autorité et légitimité pour le faire. Cela peut constituer une façon habile d’amener, par exemple, un marchand à céder certaines marchandises de valeur en tant qu’offrandes pour apaiser le supposé courroux de Lloth. Toutefois, d’autres prêtresses, plus fanatiques ou xénophobes, ne cherchent qu’un prétexte pour faire du zèle ou nuire à des étrangers. Lloth a également incité les femmes à prendre le pouvoir, ce qu’elles ont fait, notamment à Maryvath, ma ville natale, la seconde cité de Bäthen par la taille. Chaque Maison noble est désormais dirigée par une matriarche – les Mères Matrones, comme elles sont appelées – et ses filles. Les Mères Matrones sont toutes de Hautes Prêtresses de Lloth, de par leur position. Et leurs filles doivent automatiquement embrasser l’infernale religion de Lloth et devenir ses prêtresses. Les huit Maisons Majeures ont le droit de siéger au Conseil de la cité, toutes les autres n’ont pas voix au chapitre. Au fil du temps, le clergé a établi un matriarcat tyrannique, où les hommes, dès qu’ils sont en âge de comprendre, sont instruits de l’infériorité de leur sexe, et brutalisés à l’envi pour leur faire passer toute envie de révolte. Dans le même temps, les femmes, dès leur plus jeune âge, sont formées au combat ; ajoutez à cela leur vigueur naturelle et vous comprendrez pourquoi les hommes drows se soumettent à cette domination abusive. Ils sont de fait quasiment exclus de toute fonction haut-placée dans la société et, dans le cas où ils auraient un certain pouvoir ou des responsabilités, ils héritent toujours d’une supérieure à qui rendre des comptes. Et bien entendu, seules les femmes ont accès à la prêtrise de Lloth. Celle-ci réprouve également tout engagement durable entre une femme et un homme : le concept de mariage n’existe tout simplement pas. Les femmes de ma cité ont tendance à prendre tous les amants qu’elles souhaitent et à s’en séparer dès qu’elles s’en lassent. De même, les hommes n’ont pas de prérogatives concernant leur descendance : seules les femmes ont pouvoir de décision sur l’éducation et l’avenir des enfants. A tel point que le concept de paternité s’est estompé dans la cité. Le mot ‘père’ lui-même a fini par être banni de l’usage, dans la langue drow. On parle plutôt de géniteur. Seuls les garçons sont éventuellement confiés aux hommes, s’ils sont jugés compétents pour leur éducation, ce qui arrive régulièrement, que ce soit pour les tâches domestiques, l’apprentissage d’un métier, le maniement des armes ou l’initiation à la sorcellerie. Mais cela n’arrive qu’après une période dite de sevrage – une quinzaine d’années pendant lesquelles les jeunes garçons sont confiés à une femme qui leur apprend les bases de la vie en société, et surtout la soumission. Lloth est connue comme la Reine Araignée : comme ses créatures chéries, elle a tendance à dévorer les mâles, et exige de ses prêtresses qu’elles en fassent autant. Elle apprécie que les femmes offrent en sacrifice la vie d’un amant, ou d’un fils. Dans les Maisons nobles, les Mères Matrones ont coutume d’offrir à Lloth leurs fils au-delà du second. En lisant ceci, chacun pourrait se demander ce qui peut bien pousser les drows à adorer une telle déesse. La réponse à cette question tient dans les valeurs du peuple drow, que Lloth a su exploiter en sa faveur, en faisant miroiter à mon peuple des promesses de puissance et d’un rang accru. Lloth confère toutes sortes de pouvoirs à ses fidèles : sortilèges de magie divine, faculté de lire dans les pensées d’autrui, influence sur les morts-vivants, convocation de démons... L’un des plus inattendus – et le plus avilissant, je pense – est de concevoir un rejeton avec un démon. De telles cérémonies sont chose courante dans les chapelles de Lloth, et toutes les Hautes Prêtresses ont connu au moins une union démoniaque, même si aucun rejeton n’en a été issu. De tels êtres confèrent du prestige à leur génitrice, du moins auprès du clergé. Et comme ils héritent d’au moins une partie des facultés surnaturelles de leur géniteur, ce sont des alliés puissants, et fidèles à leur mère. Pour toutes ces raisons, les Hautes Prêtresses de Lloth sont parmi les êtres les plus puissants de la création – et peut-être les plus malfaisants. Le premier symbole de leur caste est le fouet-serpent qu’elles reçoivent à la fin de leur initiation : animé et doté de une à six têtes, ce fouet inflige des morsures douloureuses et venimeuses. Le venin est généralement incapacitant mais cela peut être modifié en faisant appel aux pouvoirs de la Reine Araignée. Heureusement, toute la société drow ne semble pas avoir succombé aux promesses empoisonnées de Lloth. La première cité de Bäthen, Krysten itc, en est un exemple. Là-bas, de ce que j’ai pu en apprendre, ce sont les sorciers mâles qui tiennent les rênes du pouvoir. Si c’est exact, je suis bien sûre qu’ils auront veillé à étouffer dans l’œuf tout embryon de culte consacré à Lloth.
  3. C'est le jour de Karz, ça mérite bien une petite tournée générale. Joyeux anniversaire, Karz !
  4. Suyvel

    Quiz des 15 ans !

    J'avais très largement sous-estimé la durée de la chose, désolée si j'ai empiété sur votre temps de sommeil... En tout cas, un moment de convivialité très sympa, encore merci de votre participation.
  5. Suyvel

    Quiz des 15 ans !

    Je suppose que je suis inscrite d'office? Edit Matagot : J'y réfléchis encore ...
  6. Un petit kawa pour Kiwa? Oui, mais avec un peu de gâteau, alors. Joyeux anniversaire Kiwae !
  7. La société drow répond à des principes qui lui sont propres, issus de sa culture. Il me semble important d'en dire quelques mots et d'ajouter ce passage à l'index de mon journal.
  8. Commençons par tordre le cou à une rumeur persistante : Bäthen n’est pas un royaume. Qui dit royaume dit roi, et il n’y a pas de roi drow. Et aussi loin que les écrits de mon peuple portent, il n’y en a jamais eu. Les cités de Bäthen sont en fait des cités-états, indépendantes les unes des autres, chacun disposant de son gouvernement. Chaque cité est composée de Maisons nobles, et les plus puissantes constituent le Conseil de la Cité, prenant les décisions importantes pour sa gestion et son avenir. Evidemment, lesdites Maisons s’affrontent en permanence – et de bien des manières – pour gagner en influence et limiter celle de leurs rivales, voire les faire disparaître. L’ambition, la puissance et le rang : voilà ce que chérissent les drows. Quiconque ne saisit pas leur attachement à ces valeurs ne peut espérer les comprendre. C’est vrai pour les Maisons nobles, et tout autant pour les individus : chacun œuvre à son ascension sociale. Par tous les moyens : vol, corruption, meurtre... y compris dans les rangs d’une même famille. Ce qui risquerait de mener la civilisation drow au chaos, voire à l’anéantissement. Toute civilisation est basée sur un minimum d’ordre et de règles, et celle des drows n’y fait pas exception. De fait, quelques règles simples sont édictées – mais appliquées de manière cynique. Le meurtre est interdit, mais du moment que l’auteur ne se fait pas prendre sur le fait, il s’en tire sans problème. Nul ne s’amusera à demander une enquête : cela n’intéressera personne. Si le meurtrier s’est révélé particulièrement discret, il sera même encensé pour son habileté – à mots couverts. La puissance et le rang peuvent s’acquérir de bien des façons. Un habile artisan peut devenir un maître dans son art et être courtisé par les plus puissantes Maisons nobles. Même chose pour un négociant, un diplomate ou un intendant. Mais c’est au combat que se trouve la véritable valeur aux yeux des drows. A tel point qu’il existe une Académie de Guerre dans chaque cité, dispensant des cours à tous les citoyens qui peuvent s’offrir le prix du savoir. Les maîtres y enseignent la voie des armes, celle de la sorcellerie, et celle de la magie divine. Le triple socle de l’immense puissance militaire du peuple drow. Cela se retrouve dans l’organisation de la défense et de la sécurité des cités : des patrouilles d’une dizaine de soldats sont envoyées quadriller la périphérie, et on adjoint généralement un mage et une prêtresse à chacune d’elle. A la base, les drows étaient portés sur l’isolationnisme et l’autarcie. Lorsque l’on se retrouve exilé sur des terres étrangères, en butte à l’hostilité générale, tout étranger représente une menace, et on apprend à ne compter que sur soi. Les choses ont bien évolué. Lentement, mais le chemin parcouru est énorme. Avec le temps, les cités drows sont devenues grandes et prospères. Une vaste clientèle, avec de l’or à dépenser : voilà qui ne pouvait très longtemps perdurer sans attirer des marchands. Au début, seuls les plus téméraires osèrent tenter une approche d’une cité drow – mais lorsque certains revinrent, plus riches et détenteurs de lucratifs accords commerciaux, la voie au commerce fut définitivement ouverte. Les marchands proposent toutes sortes de victuailles des terres du sud, du vin, des étoffes, des produits artisanaux, des articles de luxe comme du parfum, et repartent avec du minerai des montagnes, de l’or, de l’argent, du fer, des gemmes... ce ne sont pas les richesses naturelles qui manquent dans le sous-sol de Bäthen. Ni les magnifiques produits de l’artisanat drow. Toutes les cités drows sont désormais dotées de vastes marchés fort bien achalandés. Le commerce a constitué la meilleure porte d’entrée pour les autres peuples. Pour autant, tout n’est pas rose pour les marchands étrangers, victimes régulièrement d’abus de pouvoir des autorités drows, de vols et d’escroqueries diverses. Mais oui, les cités drows sont depuis longtemps ouvertes aux étrangers – pour peu que leur visite puisse augurer d’un possible profit pour les drows. S’il est un domaine dans lequel les artisans drows sont réputés, c’est bien celui des armes et des armures. Celles-ci sont des chefs-d’œuvre d’ingéniosité et de virtuosité, rivalisant avec les créations des maîtres forgerons du peuple nain. Les artisans drows font largement appel à la sorcellerie pour enchanter leurs créations et les rendre ainsi encore plus performantes. Bien entraînés, formidablement équipés, les guerriers drows de l’élite sont précédés d’une terrible réputation, largement méritée. Leur valeur est indéniable. Beaucoup de marchands étrangers donneraient cher pour acquérir de tels objets, mais les drows n’aiment pas voir partir ce qui fait – au moins en partie – leur force au combat. Par le passé, certains soldats ont eu la désagréable surprise de devoir lutter contre des ennemis équipés de leurs propres armes, et depuis, tout commerce de ce type est strictement interdit aux étrangers. Les artisans drows incluent désormais des sortilèges de garde dans leurs créations, dont les enchantements ne se déclenchent plus que si elles sont maniées par des drows. Ils poussent parfois le vice jusqu’à fabriquer des objets maudits : l’inconscient qui fait main basse sur de telles créations est victime d’une malédiction qui peut être très handicapante, voire mortelle. Bref, les armes et armures drows sont devenues moins tentantes pour l’étranger de passage. Avec la croissance des cités, les besoins en main-d’œuvre ont augmenté. Avec la prospérité, leurs citoyens ont commencé à dédaigner des tâches qu’ils jugeaient indignes d’eux. Les dirigeants drows ont alors commencé à revoir leur stratégie : à quoi bon tuer des étrangers s’ils peuvent servir de main-d’œuvre pour les basses besognes – surtout s’il n’est pas besoin de les payer pour cela ? Le peuple drow, très pragmatique et xénophobe, est devenu esclavagiste le plus naturellement du monde. Orcs, gobelins, nains... et même quelques humains, tout est bon pour travailler dans les exploitations agricoles ou minières, chasser dans les forêts ou servir sur les bateaux de pêche et les ports. Seuls les elfes sylvains y échappent : ils sont trop haïs pour avoir la chance de vivre, même en esclavage. Du coup, les étrangers qui se risquent sur les terres de Bäthen risquent à tout moment d’être capturés par des chasseurs d’esclaves désireux de s’enrichir rapidement. Car un bon esclave se vend bien. Un combattant finira probablement dans les arènes de la cité, un haut lieu de distraction pour les drows. Ou bien il intégrera les troupes d’une Maison noble où il servira de cible d’entraînement pour les jeunes drows, ou de chair à canon dans les batailles rangées. Voilà ce que je puis donner comme premier aperçu de la société drow.
  9. Ombre un jour, ombre toujours... et c'est son jour. Joyeux anniversaire, Ombre !
  10. Bien entendu, le lecteur avisé se doit de se familiariser quelque peu avec le peuple dont je suis issue. Je vais donc rédiger quelques notes à ce sujet et ajouter ces pages à l'index figurant sur la première page.
  11. Parler de mon peuple, du sang qui coule dans mes veines... voilà bien une tâche ardue pour mon objectivité. Je vais essayer de rester factuelle tout partageant mes connaissances... car je les connais, oh ça oui. Trop pour mon propre bien. J’ai parfois été blessée par toutes les rumeurs sur mes semblables qui peuvent circuler parmi les humains. Non pas parce qu’elles étaient mensongères, mais parce qu’elles étaient souvent fondées – et que je m’assimilais à eux. Pour autant, tout n’est pas exact non plus. Les drows suscitent une peur légitime, mais propice à l’affabulation et la calomnie. Voyons si je peux dresser un tableau plus fidèle à la réalité. La première chose qui me vient à l’esprit est la croyance de certains individus que les drows vivent dans les forêts, comme leurs cousins elfes. Historiquement, c’est exact, puisqu’au début tous les peuples elfes partageaient les mêmes terres et un seul mode de vie, très proche de la nature. Puis il y eut le grand schisme, et les elfes sombres s’isolèrent des autres tribus, choisissant les ténèbres du monde souterrain pour des raisons de sécurité d’abord – il était malaisé de les débusquer en ces lieux – , et pour d’autres considérations ensuite, comme la rudesse du climat de Bäthen en surface. Là, loin de leurs forêts natales, ils se mirent à construire des cités dans la pierre, les premières de ce monde, si ce n’est les cités Sirathiennes. Tant et si bien qu’en quelques millénaires, leur nature d’êtres de la surface et des bois fut rejetée, oubliée, balayée. Ce sont aujourd’hui des citadins, plus que tout autre peuple. La première cité du pays, Krysten itc, abrite plus de cent mille âmes. Et comme tous les citadins ou presque, ils ne se soucient aucunement de la nature, ne songeant qu’à la piller sans vergogne et sans ménagement, quitte à la détruire. Physiquement, les drows ressemblent beaucoup aux autres elfes : ils sont un peu plus petits que les humains, plus minces, élancés, et dépourvus de toute pilosité corporelle, hormis leur chevelure. Et ils ont des oreilles pointues, bien évidemment. Venons-en à ce qui les différencie. Le plus évident est la couleur de leur peau, foncée mais très variable : de simplement mate à franchement noire comme l’obsidienne, en passant par le brun ou le bleu ardoise. Ceux qui vivent régulièrement à la surface ont tendance à avoir le teint plus clair. Leur chevelure blanche est bien évidemment une particularité notable de l’ethnie. Les autres elfes ont des cheveux blonds, châtains, roux, bruns... comme les humains. Les drows, jamais. Les femmes de mon peuple font souvent usage de teintures diverses, par coquetterie, généralement sur une mèche de leurs cheveux. Et puisque j’en parle, elles ont une particularité qui ne se retrouve pas dans d’autres peuples elfes : elles disposent d’un surcroît de vigueur physique. Les femmes de mon peuple étant en outre entraînées au maniement des armes dès leur plus jeune âge, elles sont en général plus fortes que les hommes. Ce n’est là qu’une moyenne, certains individus mâles peuvent largement surpasser certaines femmes, mais c’est une tendance de fond. Et les femmes ne sont pas non plus des monstres de puissance physique comme le décrivent certaines fables grotesques que j’ai pu ouïr. J’ai hérité de cette vigueur, même si étant magicienne, je ne l’ai guère développée ; pour autant, je ne m’amuserais pas à aller défier les guerriers humains au bras de fer. En dépit de tout ce que l’on peut dire d’eux, les drows ont des traits réguliers, bien dessinés, et donc des visages agréables. Cela dit, même l’individu le plus avenant perd de son attrait lorsqu’il pointe une lame sur votre gorge... Certains racontent que les drows sont immortels, que le temps n’a aucune emprise sur eux. Il est vrai qu’un œil humain peut avoir cette impression, car les gens de mon peuple, passé un certain âge, changent très peu. Et ce n’est qu’à la toute fin de leur longue, très longue vie – un drow peut vivre sept siècles, parfois plus – que les marques de l’âge apparaissent. Du fait de leur espérance de vie, les gens de mon peuple sont également moins empressés que les humains : un drow peut très bien décider de consacrer deux ou trois siècles à la réalisation d’un objectif important, là où un humain ne dispose que de quelques courtes décennies. Cela se ressent dans leurs études, notamment : avant de passer maître, un sorcier drow doit étudier à l’université pendant trente ans. Les magiciens humains, eux, sont considérés aptes à exercer leur art librement avant même la dixième année d’étude... Pour aborder la question de la psychologie de mon peuple, voici quelques grandes lignes. La plupart des drows sont intelligents, cultivés, voire érudits, mais prétentieux, car ils s’estiment supérieurs aux autres races. Ils ont une tendance au cynisme et à la paranoïa, se méfiant de tous et de chacun, surtout de leurs proches. Ils sont dénués d’empathie, voire cruels, et très imaginatifs quand il s’agit de susciter la douleur chez autrui. Ils n’hésitent jamais à duper et trahir, si cela peut leur être profitable ; mais si leurs intérêts convergent avec les vôtres, ils peuvent s’avérer fiables. Ils méprisent les autres races, et détestent par-dessus tout les elfes sylvains, leurs cousins de la surface, qu’ils accusent de trahison et de complot contre eux, et qu’ils tiennent pour responsables du grand schisme et de leur exil en Bäthen. Pour eux, ce sont les ennemis héréditaires, la cible à abattre à tout prix. Pour avoir pu échanger avec des elfes de la surface, je sais désormais que cette vision est largement faussée, et que les dirigeants drows maintiennent leur peuple dans cette image erronée de leur passé. On peut dire que les drows sont conditionnés dès l’enfance pour haïr les autres peuples. Pour autant, ils sont sensibles à l’art sous bien des formes, comme la musique, le chant, la peinture, la sculpture et la littérature. La poésie en particulier. Certains poètes sont très prisés et leurs prestations s’arrachent à prix d’or. Et il suffit d’un coup d’œil pour que la magnificence des cités vous convainque de la véritable nature des drows, portée sur l’esthétisme sous toutes ses formes. Les drows possèdent des talents innés : une vue exceptionnelle dans le noir, meilleure que celle de leurs cousins de la surface. Après avoir vécu si longtemps dans le noir complet, il était assez prévisible que ce don se développerait encore. Pour les mêmes raisons, ils disposent d’une ouïe évidement au-dessus de la moyenne. Ils sont agiles et extrêmement vifs, adroits de leurs mains. Ils sont doués pour la magie, et férus de magie noire. Pour le voyageur de passage, voici quelques phrases qu’il pourrait régulièrement entendre : Oloth plynn dos ! (Que les ténèbres vous prennent !) (et s’il vous semble que cette phrase vous est adressée, l’heure de recommander votre âme à l'Unique a sonné...) Loth kyorl dos. (Lloth vous garde.) L'alurl abbil zhah dosstan. (Le meilleur ami de confiance est soi-même.) L'elamshin d'lil Ilythiiri zhah ulu har'luth jal. (La destinée d'une elfe noire est de tout conquérir.) Nindyn vel'uss kyorl nind ratha thalra elghinn dal lil alust. (Ceux qui surveillent leurs arrières rencontrent souvent la mort de face.)
  12. « Raconte-moi ton histoire. » Les mots de ce musicien me trottent en tête depuis qu’il m’a adressé cette requête. Car je ne l’ai jamais fait. A ma décharge, personne ne me l’avait demandé, du moins de manière aussi directe. Et de toute manière, je n’en avais aucune envie. Les raisons à cela ne m’ont jamais manqué : la longueur d’un tel récit – j’ai désormais plus de cent-vingt printemps – , l’incompréhension qu’il susciterait auprès des humains, largement ignorants de ce que sont la culture et la civilisation drow... De bonnes raisons, en partie, et d’autres moins bonnes. La peur, entre autres. Peur d’être incomprise. D’être jugée et rejetée. Peur d’être trahie. En prenant le temps d’y songer, je me dis que ces craintes sont ridicules. Les humains que je côtoie m’ont depuis longtemps fait la preuve de leurs bonnes intentions à mon endroit, et même de leur attachement. Cela fait une douzaine d’années que je vis parmi eux, sur les terres de Melrath Zorac et d’IssCaNak. Ceux qui me témoignent leur amitié depuis si longtemps ne me rejetteront pas à cause de mon passé : ils savent qui je suis aujourd’hui. Quant aux autres... de toute manière, ce n’est pas à des étrangers – ou pire, à des ennemis – que j’irai faire des petites confidences. Pour autant, il m’est pénible de raconter mon histoire. Plus que je ne saurais le dire. Le passé est mort et enterré, autant le laisser en paix. Mais je sais bien que je me cherche encore des excuses pour éviter d’avoir à le faire. Ma prime jeunesse ne fut pas que bonheur et insouciance. Oh, il y a eu de bons moments, certes – rien n’est tout rose ni tout noir, je présume. Ce sont les autres souvenirs que je répugne à convoquer. Car avec eux revient la douleur. Un mal-être quotidien. Une souffrance permanente qui m’a poussée à tout abandonner, à renoncer à tout ce que j’avais et ce que j’aurais pu avoir. On ne quitte pas tout – son pays, sa ville, ses amis, sa famille – lorsque tout va pour le mieux. Il faut une bonne dose de souffrance pour s’y résoudre. Et me replonger dans mon passé attise cette douleur. C’est comme gratter une plaie à peine cicatrisée. Pour autant, je commence à ressentir le besoin de le faire. Nul besoin d’être grand clerc pour deviner les pensées de mes amis : tous s’étonnent de l’absence de confidences de ma part. Au bout d’un moment, je dois admettre que eux m’ont raconté beaucoup de choses sur eux, et moi... rien, ou presque. La confiance ne doit pas – ne peut pas – être à sens unique. Alors je dois surmonter ma répulsion et mes craintes. Me lancer. Reste à trouver la meilleure manière de procéder. Je viens d’avoir l’idée de commencer un journal. Je me dis qu’il me serait peut-être plus facile de me confier à un livre qu’à une personne, fût-elle un ami. Et cela me permettrait de faire un peu de tri dans mes souvenirs, de structurer mon récit, de classer les anecdotes qui me viennent à l’esprit. Pour bien comprendre mon histoire, il faut savoir d’où je viens. Une telle connaissance étant quasi-absente de ces contrées, je suppose que je devrais commencer par là et combler les vides. Avant de jouer une pièce de théâtre, on se doit d’installer le décor. Et il y a des choses à dire. Bien des choses... Voici ce qu’il me semble important de savoir avant d’entreprendre la lecture de mes mémoires. Le lecteur devrait déjà se familiariser avec mon monde natal et mon peuple. Pour cela, il peut consulter les notes de l'index ci-dessous. Préambule Terres de Bäthen: rapide survol Terres de Bäthen: peuple drow Terres de Bäthen: société et culture drow Terres de Bäthen: peuple drow et religion Terres de Bäthen: histoire et géopolitique
  13. Des steppes glacées et vides. Voilà la première image qu’aurait le voyageur arrivant sur les terres de Bäthen. Situées au nord-ouest du continent, ces contrées sont froides, sauvages et inhospitalières, composées de plaines gelées, de plateaux enneigés, et de montagnes rocheuses. Et pourtant, cette image serait erronée. Baignées par l’océan de Northee, donc sujettes à un climat océanique froid, ces terres connaissent des hivers longs et rudes, et sont souvent recouvertes de neige. Malgré tout, lorsque l’été survient, la neige disparaît, les sols dégèlent et des toundras se révèlent, permettant à une végétation rase de pousser durant cette brève saison propice, ce qui fait le bonheur de tous les herbivores locaux. Et toute l’année, de vastes forêts de conifères prospèrent, abritant une faune riche. Seules les côtes tout au nord subissent une glaciation permanente. Pourtant, là aussi, on y trouve de la vie. Parfois plus que l’on pourrait le penser. Les forêts abritent des groupes d’ents, qui sont les protecteurs de la sylve. Et les énigmatiques dolmans peuvent régulièrement être aperçus sur ces terres. Les plateaux et les montagnes abritent de nombreux clans orcs. Enfin, les hauts sommets sont le domaine des dragons. La civilisation elle-même est présente, également. Dans les terres, elle se manifeste par des fermes, des installations agricoles, désertes la plupart du temps, mais très actives durant la belle saison. Des cabanes de chasseur, souvent désertes, sont néanmoins régulièrement utilisées et entretenues, dans les forêts giboyeuses. Et sur les côtes, on peut découvrir de nombreux ports de pêche, car l’océan est généreux en poissons de toutes sortes, et les côtes abritent de nombreux crustacés : crabes, homards, araignées de mer... Pourtant, les villes brillent par leur absence. Ce n’est là qu’une illusion. En fait, les villes ne sont tout simplement pas visibles depuis la surface. En revanche, s’il parvient à trouver un passage vers les profondeurs de la terre, le voyageur peut avoir la surprise de découvrir des villes profondément enfouies. Une découverte qui risque fort de lui être fatale. Car ici commence le royaume des elfes sombres. C’est sous terre qu’une des plus anciennes civilisations a élu domicile. Une des plus maléfiques, également. Ici, à des centaines de mètres sous la surface, le climat est clément et constant. Il y fait une quinzaine de degrés toute l’année. Bien évidemment, la lumière en est absente, mais cela ne gêne en rien les habitants de ces grottes immenses – la plus haute culmine à trois-cents mètres. Et dans les stalactites et stalagmites géantes, qui se rejoignent parfois en immenses colonnes de pierre, les drows ont taillé leurs demeures. Leurs cités sont des chefs-d’œuvre d’architecture et d’esthétisme : la moindre surface est travaillée, polie, gravée, sculptée, et de nombreux feux féériques projettent leur lumières douces et dansantes sur les bâtiments sombres. Entre les cités s’étirent de longs tunnels ramifiés, formant un labyrinthe naturel, dont les sorties sont souvent gardées ou scellées par magie. Ajoutez à cela la présence des drows et d’une faune souterraine très dangereuse et vous comprendrez aisément pourquoi autant de voyageurs et d’aventuriers ont disparu sans laisser de traces...
  14. « J’te jure, mon gars ! C’est comme j’te l’dis ! Il est vivant et il s’promène dans l’coin ! » Ce jour-là, à la taverne de Melrath Zorac, les conversations allaient bon train. Elles prenaient même une allure franchement débridée. Il faut dire que la dernière rumeur en date faisait sensation, non sans raison d’ailleurs. « Qu’eusses-tu me chantes là ? Tout ça, c’est sornettes et calembredaines... - Meuh non ! Je l’avions vu ! De mes yeux vu ! - Je m’demandions justement si tu devrais pas t’acheter des lorgnons... - J’avions point besoin d’lorgnons pour voir qu’t’es plus borné que ton âne ! » La rumeur en question n’était pas sans générer un certain scepticisme parmi l’auditoire. Mais le narrateur, lui, n’en démordait pas. « J’te disions qu’il est bien vivant et que j’l’avions vu déambuler près des tentes des nomades ! Et hier, le gars Rouvy l’avait repéré près du moulin... - Oui ben l’gars Rouvy, il devrait se calmer sur la boutanche, moi j’dis... - Ca, c’est pas le gars le plus sobre du patelin, j’te l’accordions, mais il picole pas avant midi, et c’est hier matin qu’il dit l’avoir vu. - M’a tout l’air d’un délirium très mince, cette histoire... - Alors comment t’expliques que j’l’avions vu aussi ? J’étions sobre comme un chameau ! » Le delirium tremens est une conséquence neurologique grave du sevrage alcoolique, c’est-à-dire de l’arrêt brutal ou de la diminution drastique d'une consommation excessive et prolongée d’alcool. Cette complication se traduit essentiellement par un état confusionnel et délirant. Mais même si Rouvy en avait effectivement été atteint, en aucun cas il n’aurait pu contaminer son entourage. « Je l’avions vu, j’te dis ! - Admettons que t’aies vu un truc, ça , j’disions pas. Meuh ça peut pas être lui... - Allons donc ! Qui c’est-y qu’irait se fringuer de la sorte, je te l’demandions ! Un grand manteau noir en haillons, qui claque au vent, t’en vois beaucoup des comme ça ?! - Non, mais... - Y a pas de mais qui tienne ! C’était lui, j’te le disions ! L’épouvantail du père Gaborit ! Il a quitté son champ et il se balade près de Melrath !!! » Suite à cette proclamation, un silence s’abattit sur l’assemblée comme une chape de plomb. Si maintenant les épouvantails venaient à la vie, il y avait de quoi s’inquiéter. « J’étions sûr qu’il cherchait quelqu’un pour lui faire subir un sort pire que la mort, alors j’avions pris mes jambes à mon cou sans attendre de voir ! - J’comprenions bien, mais que ça peut point être lui. Un épouvantail, ça se baguenaude pas... - Allons donc ! Il s’promène les bras tout raides, en croix ! Qui c’est-y qui se balade de la sorte ? Hein ? - Ben... y a bien le père Fauchou, quand il a une grosse crise d’arthrose. - Le père Fauchou ! Tu croix que je l’aurions point reconnu ? Et puis il tenait un grand bâton noir ! L’en a un comme ça, le père Fauchou ? - Ca, je savions point, mais p’têt ben que oui... - Et le chapeau de paille ? Hein ? Il porte un chapeau de paille comme celui de l’épouvantail, le père Fauchou ? - Heu non, ça j’croyons point... - C’était lui, j’te disions ! L’épouvantail du père Gaborit ! Je savions point comment, mais il marche ! » Un nouvel arrivant fit son entrée dans la taverne en hélant l’assemblée d’un moyennement cordial : « Salut les bouseux ! » Vingt paires d’yeux se tournèrent vers l’individu. C’était LUI. L’épouvantail. Le narrateur eut un terrible sursaut, puis prit la fuite en hurlant comme un beau diable, suivi par les deux tiers de l’assistance. Le dernier tiers, lui, resta tranquillement dans la taverne. Très tranquillement même, vu qu’il s’était évanoui. L’arrivant souleva son chapeau de paille pour se gratter le crâne. Il avait certes l’habitude de répandre la peur, mais là, c’était sans commune mesure avec ce qu’il observait au quotidien. Et il ne se battait pas dans la taverne, non plus. Une nouvelle arrivante le salua. « Messire Yaninho, bien le bonjour. - Ah, Gertrude, ravi de vous voir. - De même. Très joli, votre nouveau chapeau. Très seyant, tout en étant moins formel que tout ce que portent les mages. - Ah oui, merci. Et vous au moins, vous ne prenez pas la fuite... - Ca ne m’aiderait pas à encaisser ce qui m’est dû, vous savez. - Certes... d’ailleurs, je vais vous prendre une chambre pour la nuit. - Bien sûr... dès que vous aurez réglé votre ardoise. La maison ne fait toujours pas crédit, vu ? » Le mage se mit à transpirer à grosses gouttes tandis qu’il fouillait ses poches à la recherche de quelques pièces d’or égarées. A chacun ses épouvantails. [HRP] Merci à Tigrrr pour l’illustration. [/HRP]
  15. C'est l'été, il fait beau et chaud, les papillons sont de sortie et Papp aussi ! Joyeux anniversaire !
  16. Joyeux anniversaire Karamel dansant !
  17. @baracil je me permets de te citer: "sa petite farce de mauvais diable lui avait fait prendre un peu de retard. Ce n'était pas digne d'un magicien. " Je te le confirme, ou plutôt Gandalf te le confirme: "Un magicien n'est jamais en retard, ni en avance d'ailleurs. Il arrive précisément à l'heure prévue."
  18. Si un jour, quelqu'un me demande de définir ce qu'est la chance, je pense que je lui répondrai: "La chance, c'est taper un ours des cavernes - un seul - et obtenir tout ça d'un coup." Douze ans que je joue à TDE et ça ne m'était jamais arrivé. Je n'ose même pas calculer la probabilité que ce genre de choses arrive...
  19. De mémoire, l'idée de la quête 'le loup et la dague' est de récupérer les marchandises du négociant Khal Himero (une caravane en perdition). Il faut avoir rendu visite à Hécate Homb et obtenu sa coopération de gré ou de force. Puis on va voir le chef brigand (Arsène) pour commencer cette quête. Son succès permet de conclure celle de la caravane en perdition.
  20. Une nouvelle arme pour fêter un jour spécial...? Joyeux anniversaire Hephaïstos !
  21. Raconte-moi ton histoire. Suyvel en restait figée. Muette. Elle ne s’était pas attendue à celle-là. Pourtant, cela faisait un moment déjà qu’elle se mettait en quatre – une expression qui faisait référence aux Seigneurs des Eléments, sans doute – pour le musicien qui lui faisait face. Le troubadour n’ayant pas l’air bien dégourdi, elle avait accédé à toutes ses demandes. Elle n’avait même pas émis de réflexion ironique, c’était dire... Et maintenant, ça ? Grant ne doutait de rien ! Ou plutôt, il n’avait guère idée de ce qu’il lui demandait. L’elfe noire avait beau être jeune au vu des critères de sa race, elle avait franchi le cap des cent-vingt printemps. Si elle devait tout reprendre du début, elle n’était pas sortie de l’auberge. Elle ferait mieux de l’acheter, d’ailleurs, vu le temps qu’elle allait y passer – et les tarifs qu’infligeaient les sœurs Gerger. Raconte-moi ton histoire. Que faire ? Un bref résumé ? Cela risquait de lui attirer plein de questions plus ou moins indiscrètes, et le bref résumé se transformerait inéluctablement en interminable explication de texte. Se concentrer sur un épisode significatif ? C’était certainement plus raisonnable... Mais à peine avait-elle commencé à plonger dans sa mémoire que certains souvenirs déplaisants cherchaient déjà à imposer leur importune présence. Des images défilèrent dans son esprit – une ténébreuse cité souterraine, les visages de proches, comme celui de sa mère, et de ses frères et sœurs... Elle rejeta le tout brutalement. Raconte-moi ton histoire. Elle se sentit piégée. Un refus sec susciterait l’incompréhension, voire la curiosité, pour ne pas dire des investigations intrusives. Et puis Grant était ménestrel, après tout : comme tous ses semblables, il était simplement à l’affût de nouvelles histoires à ajouter à son répertoire. Aucune malice dans sa demande, elle en était convaincue. Le musicien ne demandait qu’un récit qui fût digne d’intérêt. Elle n’avait pas de raison sérieuse de le débouter de sa requête. Mais plutôt que de plonger loin dans son passé, elle allait s’en tenir à des événements plus récents. Suyvel soupira et secoua ses boucles blanches. « Très bien, Grant. Laisse-moi te parler d’une elfe noire et de ce qui lui advint, en ce jour printanier de l’année cent-trois... » * * * * * Alors qu’elle foulait les terres Aérides pour la première fois, Suyvel se sentait ragaillardie. Il y avait dans l’air un elle-ne-savait-trop-quoi de pétillant, de revigorant... Elle qui avait longtemps vécu sous terre se sentait bien sous ce ciel immense. Ici, la lumière était partout, chassant loin les ténèbres de sa ville natale. Une statue attira son attention. Elle représentait une femme – une humaine, de prime abord, mais elle n’aurait su l’affirmer. Une femme à l’allure altière, qui semblait s’élancer vers les cieux. L’elfe noire héla une autochtone. Celle-ci répondait au nom de Schima et lui apporta quelques éclaircissements le plus volontiers du monde. « Il s’agit d’une représentation de la déesse Eolia, notre protectrice. » Instinctivement, Suyvel recula d’un pas, une foule de souvenirs liés au culte de Lloth assaillant sa conscience. La Reine Araignée était la ‘protectrice’ de son peuple – mais à quel prix ! La sombre déesse aimait le désordre. Il n’existait pas de souverain dans le pays des drows, juste des Maisons nobles qui se déchiraient pour quelques miettes de pouvoir supplémentaire. Aucune alliance ne durait, aucune relation non plus – le mariage n’existait tout bonnement pas, et l’idée de s’unir durablement à un mâle aurait fait hurler n’importe quelle femme drow, ou presque. Et Lloth était aussi malveillante qu’assoiffée de sang – y compris celui de ses fidèles, s’ils cessaient de plaire. Elle détestait les mâles et faisait en sorte qu’ils soient infériorisés, opprimés, voire humiliés. Mais elle les acceptait volontiers en tant qu’offrande, en sacrifice sanglant. Elle cultivait l’ambition chez ses fidèles, pour les pousser à s’entretuer, ce qui était une façon indirecte de récolter encore plus d’âmes. Suyvel regarda autour de la statue, s’attendant à y découvrir quelque autel ensanglanté. Mais rien de tel n’existait ici, et elle s’enquit auprès de Schima des voies d’Eolia, et des rites de son culte. « Des sacrifices... ? Non, la bienveillante Dame de l’Air ne demande rien de tel. Ceux qui souhaitent la célébrer ou la remercier lui adressent des louanges, ou apportant des offrandes dans ses lieux de culte. De menus objets, de la nourriture, ce que bon leur semble. De l’or, parfois, pour les plus fortunés d’entre nous, même si la déesse ne prise guère ce genre de don. Mais elle est sensible au geste que cela représente. - Pas de sacrifices ? Je vois... » En fait, Suyvel était un peu perdue. N’ayant guère connu que cela comme modèle religieux, elle n’imaginait guère qu’il puisse en aller autrement. Ce qui amena d’autres questions. « Et que vous enseigne votre déesse ? - Eolia patronne les artistes, chanteurs et musiciens. Elle aime la musique et les vents la répandent aussi loin qu’ils le peuvent. Elle aime la vie et la nature, ses enfants essaiment les graines des plantes pour qu’elles se multiplient et prospèrent... » Suyvel en était décontenancée. Une déesse bienveillante ? Qui aime la vie ? Qui ne demande pas de sacrifice ? Qui apprécie la musique ? Elle avait l’impression d’avoir été privée de tous ses repères d’un coup. L’elfe noire détailla plus avant la statue qui lui faisait face. Non, décidément, il n’y avait rien d’inquiétant dans cette représentation. Aucune promesse de châtiment, de courroux divin qui s’abattrait sur le fidèle qui ferait un pas de travers. En quittant son pays, Suyvel avait quitté sa religion avant toute chose, et s’était promise de ne jamais tomber dans les rets d’un culte quel qu’il soit. Mais là, elle ne voyait plus très bien au nom de quoi repousser une déesse telle que décrite par Schima. Elle allait devoir se renseigner plus avant. Pour l’heure, elle se contenta de remercier la jeune villageoise et d’en prendre congé. Dans les jours qui suivirent, Suyvel entra en contact avec les prêtres d’Eolia et put leur poser librement toutes les questions qui l’assaillaient. Elle était venue pleine de méfiance et de suspicion. Lorsqu’elle eut obtenu les réponses, Eolia avait gagné une nouvelle adepte – assez différente de ses adorateurs habituels, mais non moins fidèle. Ce jour-là, une drow mourut. Et une Aéride naquit. * * * * * « Voilà, Grant, tu as ce que tu voulais. - Merci à toi pour ce récit. Et pour ces confidences. » Confidences ? Certes, mais pas tant que ça. En fait, de ce côté-là, Suyvel estimait s’en sortir à bon compte. A très bon compte, même. Mais quelque chose en elle lui disait qu’il n’en irait pas toujours ainsi. Un jour ou l’autre, il lui faudrait bien raconter son histoire. Toute son histoire. Aussi déplaisante que cette perspective puisse être...
  22. Un petit oeuf en chocolat? (Pour certaines, ce sont les cookies, pour moi ce sont les oeufs...)

  23. Merci à vous trois. Plein de bisous.
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