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Terre des Éléments

L'Héritier Noir


Helevorn
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I

De fine gouttelettes vibraient sur les stalactites avant de tomber dans les flaques. Douce mélopée minérale. La pierre arborait une couleur singulière, un anthracite aux reflets violacés. Ecchymoses. L'air était lourd et épais, mais cette nuit, un peu de fraîcheur s'était insinuée dans le nid.

Tout autour, une vague rumeur et des chants, lointains, qui pourtant me paraissaient si proche se répercutaient jusqu'à ma cache. La résonance entêtante des refrains d'adoration emplissait les profondeurs, sans cesse, à la gloire de Lloth.

Ma gorge se serra d'angoisse. Je ne voulais pas y retourner. Je craignais qu'on me trouve. J'avais pourtant filé discrètement de la procession, mais je sentais son œil sur moi, partout, et cette nuit là avec davantage de férocité. Mes poings se pressèrent contre ma poitrine comme si je voulais me protéger de quelque chose. Mon corps se raidit de tout son long sur le sol, traversé par une alternance de fièvre et de gelure. Je voyais la Yochlol (1) m'attraper, me traîner jusque dans la cours et m'offrir aux Prêtresses. Cette idée me terrifiait. Bientôt, je savais qu'on partirait à ma recherche, je serais traqué, débusqué comme un gibier, ferré et mené devant la surveillante pour être châtié.

J'avais fugué sans savoir où aller. Le labyrinthe des profondeurs était immense et inquiétant. Si jeune que j'étais il était impossible d'atteindre la surface sans me faire arrêter. Je ne pouvais pas rester là. Si ma fuite m'avait parue longue il n'en n'était rien en réalité, et mettre la main sur moi ne serait qu'une formalité pour mes chasseresses. Que pouvais-je espérer ? A cet instant, la peur était tout près tel une mère possessive, étouffante, je la sentais me couvrir, tenant l'espoir à distance avec une terrifiante facilité.

Seul.

Rien ni personne pour me venir en aide. Un sanglot remonta dans ma gorge. Je me recroquevillais sur moi-même des larmes plein les yeux, et sombra dans un profond cauchemars.

Des griffes dans mon épaule. On me souleva du sol, m'arrachant à mon sommeil. Un cris. Mon cœur sortit de ma poitrine. Terrifié je tentais de me mettre en boule mais on me traîna. Mes yeux recouvrèrent un peu de netteté. Les femelles de la déesse. Elles geignaient leur courroux et leur détestable satisfaction de m'avoir trouvé.

"Z'hin, wanre !" (2)

Une corde fût nouée à mes poignets, et on me ramena.

A mon arrivée, les humains minaient déjà dans la carrière sous la surveillance des maîtresses. J'avais dû dormir jusqu'au petit matin. Ils s'arrêtèrent tous à mon passage avant que le fouet ne claque dans l'air. Après quoi, les coups de pioche reprirent frénétiquement. On me mena jusqu'au poste de la surveillante, Irae Xiltyn, jeune et prometteuse adoratrice de Lloth. Elle me haïssait à la perfection, faisant jaillir sur moi tout le dégoût et le fiel de la déesse.

On me poussa devant elle. Je baissais les yeux comme on me l'avait enseigné. Les mâles avaient pour interdiction de regarder les femelles dans les yeux a moins qu'elles leur adressent la parole ou leur demandent explicitement. Moi, j'avais pour consigne de regarder par terre même lorsqu'on s'adressait à moi. C'était, entre autres choses, ma punition. Elle s'approcha de moi et sans crier gare me décocha une violente gifle qui me projeta au sol. Les chasseresses me remirent sur pieds à la seconde, ne me laissant pas le temps de me remettre.

"Que faisons nous de lui, malla alur ?" (3)

Elle réfléchit un instant.

"Trois coups de knouts", déclara-t-elle.

J'ignorais encore ce que ça signifiait, mais la découverte allait être cuisante. On m'entraîna dans une cabane attenante, me retira ma chemisette et me tourna face au mur, a genoux. On passa la corde qui me liait les poignets dans un anneau suspendu au plafond et l'accrocha à une poignée de métal en face de moi, de sorte a ce que mes bras se lèvent au dessus de ma tête.

Une de mes chasseresse avait été congédiée par Irae qui avait pris sa place. Je ne la voyais pas mais je sentais physiquement sa présence, ma peau se hérissait d'effroi. J'entendis le son d'un objet glissant sur une étagère en fer, un léger balancement dans l'air, et...

SCCCHLLAK

Une lacération raya toute la largeur de mon dos. La douleur fût telle que ma gorge ne parvint pas a pousser un cri tant ma gorge s'était nouée de terreur et de stupeur. Jamais je n'avais ressentis une telle souffrance.

SCCCHLLAAK

Mon dos se contorsionna, brûlant d'un mal suraigu. Mon cœur taraudait jusqu'à l'intérieur de mon crâne. La poignante sensation que le prochain coup me serait fatal me tira un soubresaut musculaire que mon bourreau prit comme une provocation.

SCCCCHHHLLAAAAKKK

Déchirure. Le coup final fût de loin le plus sauvage. La douleur culmina dans une sphère inexplorée, je perdis connaissance à la seconde...

J'avais 8 ans.

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(1) servante de Lloth

(2) marche, esclave !

(3) honorée supérieure.

Modifié (le) par Helevorn
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II

L'adamantite refléta dans la roche.

SCHKLING...SCHKLING...SCHKLING

La maîtresse passa près de moi, le visage sévère. Elle posa les yeux sur le gisement, s'arrêta net, puis tourna les talons et se hâta en direction de la cahute. J'enfouis ma main dans la poche de mon pantalon pour en sortir un carré de tissu, épongea la sueur ruisselant sur mon front, le long de mon torse et de ma nuque et le rangea.

"Oooh !" laissa siffler Reon.

Reon était un humain d'une quarantaine d'années, le corps musculeux, usé par des années d'esclavage dans les carrières. Il avait été fait prisonnier par des chasseurs d'hommes Drows il y a de ça quinze ans, alors qu'il acheminait des marchandises de villes en villes accompagné de sa famille.

Sa femme avait été échangée avec ses filles contre des esclaves mâles, plus robustes pour le labeur des mines. Les traits de son visage étaient tirés par la tristesse et l'épuisement. Il me parlait souvent de son épouse et de ses enfants, rêvant du jour où il pourrait les retrouver. Je l'écoutais sans comprendre l'espoir qu'il plaçait dans sa libération, il touchait à un hiver précoce, et jamais Xiltyn ne l'autoriserait à partir. Il m'inspirait une sorte de compassion, quant à moi, comme aux autres esclaves, je lui inspirais une profonde curiosité.

Il s'approcha de la parois les yeux écarquillés.

"Tu as trouvé de l'adamantite !"

Il me dévisagea.

"La surveillante appréciera", fit-il sur un ton qui se voulait rassurant.

J'esquissais un sourire neutre. La maîtresse revint. Reon retourna prestement à sa place. Elle se planta devant moi, je baissais la tête.

"Irae exige ta présence."

Je posa ma pioche et rejoignis le petit bâtiment. Après avoir toqué, j'entrais dans le bureau, ferma précautionneusement la porte, profitant de cet instant pour prendre une profonde inspiration d'encouragement et me posta devant son pupitre, les yeux rivés au planché.

"Vendui ' malla Jabbress." (1)

"Alors ! "fit-elle d'une voix cinglante. "Tu as trouvé un gisement..."

"Lloth tlu malla. Jal ultrinnan zhah xundus." (2)

Je sentis son regard s'aiguiser sur moi. Elle se leva lentement de sa chaise, contourna son bureau d'un pas leste et se planta devant moi. A cette distance, je pouvais sentir son odeur, mélange de cuir et d'un parfum obsédant. D'un mouvement brusque elle m'attrapa la gorge et enfonça ses ongles dans ma chair. Je serrais les mâchoires.

"Tu as mis trois mois ! TROIS-MOIS !" me hurla-t-elle.

Les mine d'adamantite avaient été tant exploitées durant ces dernières années que les esclaves ne parvenaient plus à en extraire. Nous avions plusieurs fois changé de site pour découvrir de nouveaux gisements, sans succès jusqu'à ce jour. Le commerce de la citée en avait souffert avec son économie, provoquant la colère des hautes instances de la société.

Je sentis son souffle sur mon visage. Un mélange de dégoût et de rage monta en moi. J'aurai voulu la frapper, mais j'en aurai payé le prix par la torture, et je refusais de lui donner ce plaisir. Depuis toutes ces années je m'étais familiarisé à ses manies, sa façon de me pousser à bout, de m'acculer, de me manipuler, usant du harcèlement, de l'humiliation pour que je cède à la colère et qu'elle puisse exercer son sadisme sous ce prétexte. Alors, j'avais appris à résister aux affronts, à prier et louer Lloth, à obéir docilement à ses servantes, à faire tout ce qu'on me demandait, des tâches les plus ingrates aux plus dangereuses.

Ses lèvres tremblantes de rage s'arrêtèrent a quelques centimètres de mon visage.

"Nelgetha ussa.." (3) fis-je dans un souffle.

Elle grogna et me repoussa violemment, laissant les marques de ses ongles dans mon cou, puis me congédia en désignant la sortie.

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(1) Je vous salue honorée Maîtresse.

(2) Lloth soit louée. Toute victoire est sienne.

(3) Pardonnez-moi.

Modifié (le) par Helevorn
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Une maîtresse me réveilla à coups de pieds.

"Debout !" gronda-t-elle.

Je sursautais, arraché à mon sommeil. Je baissa immédiatement la tête pour ne pas l'incommoder et me redressa.

"Tu vas à Dxjanr'Lo. Dépêche-toi !"

Mon sang ne fit qu'un tour. On m'autorisait à quitter la mine pour une livraison. Je failli demander les raisons de cette autorisation exceptionnelle mais je craignais qu'on m'en prive si je montrais trop de curiosité. Je m'exécutais alors promptement.

Les extractions d'adamantite furent chargées à bord d'une solide charrette. La maîtresse monta à l'avant munie d'un long fouet et ordonna aux esclaves de soulever les deux bras du véhicule, cinq hommes pour chaque. Parfaitement coordonnés, les humains soulevèrent les lourds montants accompagnés par la poussée de mon épaule. Il fallut ensuite appuyer tout notre poids vers l'avant pour enclencher le roulement des essieux et poursuivre l'effort à la force des jambes.

La grande maison de Dxjanr'Lo était à deux jours. Nous avions une longue route à parcourir à travers le dédale caverneux, parfois pentu, parfois sinueux dans les profondeurs de Che'el. Afin de faciliter la circulation entre les sept piliers constituant la Citée, des ponts avaient été bâtis sur toute la surface du territoire, offrant un spectacle grandiose de perspectives architecturales.

Le fouet de la maîtresse claqua, et claqua encore tout au long du chemin, jusqu'à ce qu'elle juge qu'il faille s'arrêter. C'est dans la soirée, à l'approche d'une auberge entourée de maisonnettes qu'elle ordonna le bivouac. La charrette s'immobilisa dans un grincement. Il fallut poser délicatement les bras du véhicule sous les aboiements de la Yochlol avant de pouvoir se retirer. C'est les muscles tremblants de fatigue que je rejoignis l'emplacement de notre campement avant de m'étendre à même le sol, exténué.

Un humain du nom de Kaomal s'accroupit près de moi et me tendit une gourde.

"Tiens, bois."

Il passa sa main sous ma tête et glissa le goulot entre mes lèvres. Je bus avidement, puis essuya ma bouche d'un revers de main. Il me dévisagea avec intérêt.

"Tu as tenu le coup gamin, c'est bien !" fit-il en souriant. "J'ignore quel est ton nom, et pourquoi on t'as réduit en esclavage, mais sache que je suis content que tu fasses partit du voyage."

Je n'ai pas de nom, pensais-je en mon fort intérieur.

Sur ces paroles il déposa une couverture a côté de moi et s'éloigna.

Kaomal était un homme de grande stature. Son corps particulièrement musclé et son visage buriné révélait un peu de ses activités d'homme libre. Il se présentait toujours comme un simple bûcheron mais lors d'une rixe entre esclaves pour une histoire de vol, il avait montré ses talents de combattant à mains nues. Depuis, les humains l'avait érigé au rang de chef, position dont il ne voulait pas entendre parler et qui avait le don de le plonger dans des colères noires.

Son attention à mon égard me surprit, car nous ne nous étions que peu adressé la parole depuis son arrivée il y a cinq ans. Il m'avait vu grandir, travailler durement, subir plus que les autres le courroux des femelles. Toujours en silence. Ma place de souffre-douleur au sein du groupe m'avait offert un certain respect de leur part, respect qui les faisait se tenir à bonne distance de moi la plupart du temps, sans doute par superstition. Mais ce soir là, quelque chose était différent, je le sentais partout dans l'air. Une sorte d'atmosphère étrange qui me donnait le sentiment qu'un évènement allait faire basculer le cours des choses...

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III

La nuit était paisible. Le feu crépitait non loin, m'offrant un peu de sa chaleur. La tête posée sur mon bras, je goûtais à un repos tranquille. Seule la rumeur conviviale de l'auberge venait troubler le silence. La maîtresse nous avait défendu d'y mettre les pieds ; il était inconcevable qu'elle partage le même lieu de repos que nous. Seul Caridd, ancien tavernier de profession, s'était risqué à épier à l'intérieur. Il frottait son épaisse barbe du plat des phalanges en lorgnant sans doute sur quelques choppes mousseuses.

Cette image me fit sourire. Je m'apprêtais à disparaître sous ma couverture, comme j'avais coutume de faire avant de m'endormir, quand un sifflement précédé d'un SCHTAK me fit bondir. Une vibration toute proche. Je tournais la tête de droite et de gauche, cherchant d'où avait pu provenir ce bruit. Rien n'avait remué. Caridd était toujours au même endroit, les autres dormaient profondément. Ma main toucha soudain quelque chose près de mon flanc. Une longue flèche était plantée dans le sol. Enroulée au fût, un fin parchemin. Je scrutais l'obscurité, inspectant les alentours avec vigilance. Aucun mouvement dans l'ombre. Sur mes gardes, j'extirpais la pointe du sol et déroula le papier discrètement. Une écriture serpée et incisive griffait la page. J'eûs alors une pensée pour le vieux Uriel, scribe esclave plongé dans les mines de Che'el, qui m'avait apprit à lire en me traçant des lettres sur le sol, onze ans auparavant. J'ignorais quand son savoir allait bien pouvoir me servir, j'avais désormais la réponse.

Si tu veux te libérer, rends-toi à la Maison Rouge la nuit prochaine.

Ztefano

En bas, sous la signature, un étrange sceau représentant une main noire à six doigts. Mes yeux s'écarquillèrent. Je relus mainte fois ces mots. Libérer. Maison rouge. Ztefano...Jusqu'à ce que le parchemin dégage une étrange fumée. Devant mon regard éberlué, le manuscrit se consuma lentement sans émettre la moindre flamme jusqu'à se réduire en cendre.

"De la magie noire", murmurais-je.

Je me mis à chercher la flèche pour m'en débarrasser quand je m'aperçus qu'elle s'était volatilisée. Je déglutis, à la fois excité et terriblement inquiet. Je me répétais ces mots, sans cesse, Ztefano... Ztefano...Maison rouge...rendez-vous...la nuit prochaine...Maison rouge...Ztefano...signé Ztefano...à la Maison rouge...comment m'y rendre ? Où est-elle ? ...la nuit prochaine. L'agitation envahit ma nuit. C'est au petit matin seulement que je trouvais le sommeil, juste avant que la maîtresse ne vienne ordonner le départ.

Un soupir d'épuisement s'échoua sur mes lèvres. Je me mis debout avec la sensation d'avoir le poids d'un cadavre Orque sur le dos. Kaomal passa à ma hauteur et me tendit une pâte de sucre enrobée de fruits secs.

"Avale ça."

Je me hâta d'ingurgiter le gâteau et prit place sous le bras gauche de la charrette.

La seconde journée fût plus éprouvante encore que la précédente. Mes épaules étaient meurtries par la lourdeur du montant. Chaque parcelle de mon corps m'élançait douloureusement. Les hommes à mes côtés peinaient eux aussi, mais leurs organismes étaient rompus à ce type d'expédition. De temps à autre, on me lançait des regards d'encouragement, comme des pères veillant sur leur fils. A cette époque, la bienveillance de mes compagnons d'infortune m'était surprenante, et ma méfiance à leur égards m'empêchait de me rapprocher d'eux. Je ne connaissais alors vraiment que la souffrance, l'obéissance et le travail.

Nous arrivâmes enfin à Dxjanr'Lo. La haute maison élevait ses tours sombres comme une extraordinaire cathédrale. D'immenses vitraux aux reflets pourpre-violacés paraient le bâtiment. La pierre anthracite répondait aux canons esthétique de Lloth. Tout évoquait dans les lignes les terrifiants appas des driders.

Le fouet cingla l'obscurité, nous indiquant qu'il n'était pas encore temps de s'arrêter. Il fallut avancer encore quelques minutes avant d'arriver dans une arrière cours appartenant à une forge. La Yochlol ordonna l'arrêt. Les bras de la lourde charrette cognèrent le sol dans un geignement.

Les esclaves se mirent en rang et trottèrent jusqu'à une sorte d'étable qui devait nous servir de dortoir. Je suivis le mouvement d'un pas lourd avant de m'écrouler sur le premier banc venu. Kaomal ne tarda pas à m'apporter ma ration avant de s'asseoir à mes côtés.

"Fiiiouuu. Eh bein ! C'est bon quand ça s'arrête n'est ce pas ?" me lâcha-t-il en mordant dans son pain.

Je hochais la tête machinalement avant de l'imiter.

"Demain", m'expliqua-t-il, "nous déchargerons l'adamantite puis nous repartirons. La forge à côté appartient à la Maison Dxjanr'Lo. Un grand maître forgeron y exerce. "

Je l'écoutais attentivement quand l'idée qu'il pouvait peut être m'indiquer où se trouvait le lieu de mon rendez-vous m'incita à lui poser la question.

"Sais-tu où se trouve la Maison rouge ?"

Il leva un sourcil, visiblement surprit par ma question.

"La Maison rouge ! Pourquoi cette question ?"

"Il faut que j'y aille", répondis-je simplement.

Il laissa échapper un rire.

"Pourquoi ris-tu ? Tu y es déjà allé toi ?"

"Non." fit-il en souriant. "En débarquant dans la Citée perdue on ne m'a pas laissé le loisir de faire du tourisme. Mais j'en ai entendu parlé."

Voyant que je commençais a m'impatienter il continua.

"C'est un bordel."

Devant mon absence de réaction, il renchérit.

"C'est un endroit où il y a des prostituées, des jeux, et de l'alcool."

Pourquoi m'avait-on donc donné rendez-vous à cet endroit ? Je ne comprenais pas.

"Que dois-tu y faire ? Parce que notre garde-chiourme n'appréciera pas de te savoir là-bas."

"Je dois y aller, c'est important," fis-je avec détermination.

"Hum...Ce n'est pas très loin d'ici. Je viendrai avec toi."

"Non !" rétorquais-je. "Ce sont mes affaires. Tu n'as pas à te mêler de ça, tu pourrais avoir des ennuis. Je refuse de t'entraîner là-dedans, si je me fais prendre alors j'en payerai le prix, mais seul."

Il fronça les sourcils pour me dévisager.

"Tu es curieux gamin. Je ne peux que te féliciter pour ta bravoure et ton sens des responsabilités, mais je te mènerai là où tu veux aller. Ensuite je partirai. Si tu y vas seul, tu te perdras à coup sûr dans le dédale des ruelles."

"Si tu n'y es jamais allé, comment peux-tu en connaître le chemin ?"

Il resta muet un instant, ne sachant quoi répondre, puis esquissa un sourire.

"On me l'a montré...un jour. Sois prêt avant minuit."

Sur ces mots il se leva et retourna en compagnie des autres humains. Je me cala par terre, dos contre le pieds du banc, et me laissa aller à mes pensées.

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"Réveille-toi."

On me secoua.

"Hey gamin ! Réveille-toi, il est l'heure !"

J'ouvris un œil, c'était Kaomal recouvert de sa couverture en guise de capuchon. J'avais dû m'assoupir quelques heures.

"Allons-y !"

Je me levais tant bien que mal, les paupières pesantes. Il attrapa ma couverture et la mit sur ma tête.

"Dissimule bien ton visage.."il réfléchit un instant. "Quoique...tu passeras beaucoup plus inaperçu que moi, tu es un Drow après tout."

Courbé en deux, il se faufila hors de l'étable, marchant au milieu des esclaves assoupis. Je le suivais de près, excité par ce que j'allais bien pouvoir découvrir. Nous nous enfonçâmes dans de sombres ruelles. La ville semblait déserte. Seul quelques rats piaillent dans les ordures. L'odeur de la nuit emplissait mes poumons, et avec elle, l'exquise sensation d'enfreindre la règle. Grisant. A mesure que nous marchions, je prenais la mesure des risques que nous encourions. La torture. Et si durant ces dernières années j'avais tout fait pour être docile et obéissant, frustrant le plaisir de Xyltin, cette fois elle aurait bien là un prétexte de taille pour me faire goûter aux plus douloureux sévices. Le désir de m'enfuir à nouveau, comme il y a dix ans, s'insinuait dans mon esprit. Si par malheur on s'apercevait de mon absence et qu'on me ramenait à elle pour une punition, je me faisais la promesse de faire une nouvelle tentative et de rejoindre la surface. J'étais plus âgé cette fois, plus fort, plus rapide, et surtout je connaissais bien mieux Che'el. Ce voyage à Dxjanr'Lo était un signe. Ce message de Ztefano était un autre signe. Les choses devaient forcément changer.

"On y est !", souffla Kaomal, me tirant de mes pensées.

Dans l'angle de la rue, une maison cossue de pierres sombre, recouverte de longues étoffes pourpre dansant dans la brise. Les fenêtres avaient été soigneusement condamnées de l'intérieur par de grands panneaux noirs.

Mon accompagnateur posa sa grosse main sur mon épaule.

"Je te laisse ici," chuchota-t-il en me regardant. "Je retourne à l'étable. Tu te souviendra du chemin ?"

Je hochais la tête, le remercia brièvement et sans plus de cérémonie trotta jusqu'à la porte, brûlant d'impatience.

L'entrée se trouvait dans un renfoncement. Il fallait gravir quelques marches avant d'atteindre un palier. Déjà, une odeur particulière envahissait le petit porche. A mon approche, une glissière en bois s'ouvrit dans la porte, découvrant un œil fardé. Il me lorgna un instant, regarda derrière puis referma d'un coup sec. J'attendis un instant, déconfit, pensant qu'on ne me laisserait pas entrer quand le son mécanique d'un loquet retentit.

J'entrais dans un large salon élégamment décoré. Je n'avais jamais mis les pieds dans un endroit si prestigieux. Mes yeux s'écarquillèrent devant la pléthore de tapisseries fines aux murs, de tables en bois précieux, de récipients étincelants accueillants des fruits exotiques, des coupes en argent, des tapis aux motifs sophistiqués, et une foule de clients le visage dissimulé sous des masques aux expression étranges, allant du comique au lubrique, ainsi que des femmes en tenue légère. Une senteur d'encens et de bougies mêlé à un joyeux brouhaha de conversations emplissait la pièce. Il faisait bon. Si je n'avais pas été si mal fagoté je me serai séparé de ma couverture qui trônait sur mes épaules.

La personne qui m'avait ouvert se pencha vers moi. C'était semble-t-il une femelle, mais les traits grossiers de son visage me mirent le doute. Sa peau était recouverte d'un fond de teint très pâle, ses lèvres étaient maquillées d'un rouge vif, ses yeux charbonneux arboraient des faux cils d'une longueur extravagante. Je la dévisageais du coin de l'œil, comme j'avais appris à faire avec mes interlocutrices féminines depuis toujours. Elle fumait une sorte de long calumet en ébène orné de plumes rouge. Elle tira lentement dessus avant de me souffler la fumée au visage, puis m'examina. Ses sourcils se froncèrent.

"Tu viens voir Ztefano ?" me demanda-t-elle d'une voix gutturale.

Mon cœur sauta dans ma poitrine. On savait que j'étais attendu. Je hochais rapidement la tête.

"Suis-moi."

Elle tourna les talons d'un air presque méprisant et slaloma entre les tables jusqu'à une porte matelassée de cuir rouge, puis fit résonner une clochette accrochée au mur. La porte s'entre-ouvrit, elle y glissa la tête, marmonna quelque chose que je ne compris pas et m'ordonna d'entrer.

Deux femelles à moitié nues sortirent prestement de la pièce, manquant de me percuter. Mon rythme cardiaque s'accélérait de seconde en seconde. Le sang me montait aux joues. La couverture commençait a me gratter le pourtour de la nuque et me donnait affreusement chaud. J'entrais dans la pièce. On referma la porte derrière moi...

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  • 2 weeks later...

IV

A la lueur des bougies, je distinguais quelques fauteuils, une table basse sur laquelle était posée une carafe dorée avec ses gobelets assortis, et un divan devant lequel se tenait un homme de grande taille recouvert d'une longue cape sombre, le visage dans l'obscurité. Des manches et du bas de son vêtement suintait une brume blanche aux reflets vert clair. Mon sang se glaça. Elle léchait le sol et s'enroulait lentement autour de tout objet à proximité. J'étais pétrifié. Je sentais une énergie phénoménale se mouvoir dans la pièce, glisser jusqu'à moi comme un serpent. Un silence lourd et bourdonnant taraudait mes tympans tel une marche funèbre. A cet instant j'aurai voulu m'enfuir, mais j'étais tétanisé par une force irréelle.

Il avança son visage, alors plongé dans les ténèbres, vers la lueur des bougies. Sa face apparue, extrêmement pâle et anguleuse. Presque translucide. Sa bouche était dépourvue de lèvres, figée dans l'impassibilité. Ses yeux reflétaient une lueur terne et livide. Il accrocha mon regard avec une telle puissance psychique que je ne put m'en délivrer. Ses prunelles s'insinuèrent au plus profond de mon être, violant mon âme, mon esprit, jusqu'au dernier de mes souvenirs. Un froid glacial m'envahit. Les mâchoires scellées, je balbutiais quelques mots.

"Qui..qui êtes...vous ? Que...que voulez-vous ?"

Je cru le voir esquisser un sourire avant de se reculer soudainement dans l'ombre.

"Assis-toi.", dit-il d'une voix inhumaine, à la fois sifflante et émanant des abysses, comme un vent mauvais.

Je m'assis sur le fauteuil le plus proche, tremblant de tous mes membres, ne lâchant pas des yeux sa forme suintante. Il laissa échapper une sorte de grognement satisfait. Je déglutis difficilement, la gorge sèche comme un vieux parchemin.

"Je suis content que tu sois venu."

Sur ces paroles il s'assit sur le divan, sortit une main aux longs doigts griffus émanant la brume et d'un simple geste de l'index souleva la carafe sans même la toucher et remplit deux gobelets. Après quoi il en prit un et le porta a sa bouche, dans les ténèbres.

"Je suis Ztefano."

A ces mots, il rapprocha sa tête de la lumière. J'eûs un léger recul quand je découvris un tout autre visage. Sa peau était toujours aussi blême cependant ses traits et son regard étaient plus avenants, voir même plus séduisants.

"Lui ?"

Il me dévisagea un long moment avant de reprendre, ce qui me mettais terriblement mal à l'aise.

"...Vous allez me libérer ? Vous allez m'aider à rejoindre la surface ?" m'enquis-je.

"Oui. Si c'est ce que tu souhaites."

Sa réponse me parut étonnante. Devant mon expression il planta ses yeux dans les miens. Un long frisson me remonta dans le dos.

"Si tu savais seulement qui tu es..."

"Mais...je ne comprend pas. Qui êtes-vous ? Pourquoi m'avoir envoyé ce message ? "Tu savais."

Je restais muet.

"Tu le sentais, Helevorn."

Mon cœur s'arrêta de battre.

"Co...comment m'avez-vous appelé ? Vous faite erreur. Je n'ai pas de nom !"

Un nouveau sourire raya le visage de Ztefano.

"Bien sûr que si. Tu l'ignorais, simplement."

Mes sourcils se froncèrent.

"Ma mère m'avait donné un nom ?"

"Toute ta vie n'est qu'un tissu de mensonges, et de peur."

Je restais silencieux, les yeux grands ouverts face à mon destin, prêt à accepter chacune des révélations qu'il pourrait me faire, comme une dangereuse libération.

"Pourquoi es-tu esclave ?"

Mon regard s'assombrit soudain.

"...Parce que..."

Modifié (le) par Helevorn
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"Parce que ?" répéta-t-il.

"Parce que ma mère est morte."

Il me regarda avec plus d'insistance, visiblement insatisfait par ma réponse. La colère et la culpabilité ressurgirent en moi.

"Je ne suis pas là pour vous raconter ma vie ! C'est vous qui m'avez fait venir, vous qui m'avez contacté ! C'est a vous de me dire ce que vous voulez !" répondis-je avec emportement.

Immédiatement ma gorge se serra d'angoisse rien qu'en imaginant la réaction de mon interlocuteur.

"Les femelles de Lloth t'ont élevé comme un ver. Rampant, soumis, depuis ta naissance. Tu échafaudes ta vengeance depuis des années, dans le silence et l'obéissance, comme un serpent, attendant froidement et patiemment le moment propice..."rétorqua-t-il calmement.

Mon sang ne fit qu'un tour.

"Que connaissez-vous de moi ?" dis-je en fronçant les sourcils.

"Bien plus que tu en sais toi-même."

Mon rythme cardiaque s'accéléra, à la fois terriblement excité et profondément anxieux.

"Mais avant de te révéler certaines choses, je veux être sûr de ce que tu crois savoir. Je veux connaître les mensonges qu'on t'a appris..."

Il posa son gobelet sur la table basse.

"Pourquoi es-tu esclave, seul et unique Drow au milieu des humains ?"

Je pris une profonde inspiration, m'encourageant a parler de quelque chose que je n'avais révélé à personne. J'aurai pu décider de me taire, mais je sentais en Ztefano quelque chose de si particulier que mes secrets semblaient prêt à se déverser devant moi, comme des trombes d'eau faisant céder un barrage.

"Parce que j'ai tué ma mère."

La phrase tomba comme un couperet.

"Elle est morte en me donnant la vie."

"En te l'infligeant, plutôt," rétorqua-t-il dans un demi-sourire.

J'aurai voulu le contredire mais il avait raison.

"Qui était ta mère ?"

"Une Faerz'un'arr(1) de la grande maison Aleanrahel (2)."

Mon interlocuteur jeta sa tête en arrière dans un rire démoniaque. Sans me laisser le temps de lui demander la raison de son hilarité, il enchaina.

"Et c'est donc là, la justification qu'on t'a fournie pour expliquer ta servitude ?"

Je hochais la tête et me justifiais.

"Ma mère était très importante pour la maison Aleanrahel !"

"Helevorn..."fit-il en avançant son visage vers moi. "Oubli tout ce qu'on t'as dit, car tout est mensonge dans ta vie."

"Alors expliquez-moi ! Et ce nom par lequel vous m'appelez !"

"Il te vient de ton père."

Mon père...on ne m'en avait jamais parlé, on avait tant éludé le sujet au cours de ma vie que j'avais oublié que j'en avais un, et qui il pouvait bien être.

Il plongea sa main dans un replis de sa cape, et en sortit un collier au métal étrange au bout duquel se balançait un pendentif circulaire. Il le mit sous mes yeux pour que je puisse le contempler. Une main noire à six doigts.

"Pourquoi me montrez-vous ça ? C'est le sceau que vous avez apposé en bas du message."

"Lorsque tu es né, ta peau était à la fois sombre et limpide comme du verre. Voilà d'où vient ton nom."

En langage drow, Helevorn signifie « verre noir ». Je restais figé.

"Pourquoi as-tu pour interdiction de croiser le regard des femelles ?"

"Tous les mâles ont cette interdiction." rétorquais-je.

"Tu sais que non. Les mâles n'ont pas le droit de regarder les femelles dans les yeux sans qu'elles leur adressent la parole ou leur demandent."

"Parce que j'ai tué ma mère. C'est ma punition."

"Tu n'as pas tué ta mère."

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(1) voyante

(2) la plus puissante des grandes maisons de Lloth

Modifié (le) par Helevorn
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Mon cœur sembla sortir de ma poitrine.

"C'est un assassin de la Griffe Noire qui s'en est chargé, commandité par Lloth."

Une chape de plomb s'écrasa sur ma nuque.

"Que voulez-vous dire ?"

"Ta mère n'était pas une Faerz'un'arr mais l'Ulathtallar(1) de la déesse araignée. "

Mon sang se glaça tellement que je cru mourir sur place.

"La haute maison Aleanrahel ordonna à sa guilde d'empoisonner l'enfant qu'elle portait. Les meilleurs empoisonneurs de la Griffe Noire furent mis à contribution pour confectionner un philtre mortel spécial. Ils travaillèrent jour et nuit pendant des semaines avant de le mettre au point, allant même jusqu'à capturer des femmes enceintes à la surface pour réaliser leurs expérimentations. Ils ne voulaient pas prendre le risque de tuer ta mère au départ. Un jour, ils pensèrent détenir le poison parfait. Malheureusement pour eux, il n'eût absolument aucun effet sur le fœtus. Ton père veillait sur toi..."

"...Qui est mon père ?"

"Ton père est Jeggred Dhuunyl, mage-lame extrêmement puissant, craint par Selvetarm (2)même. Il était à la fois le Qu'el'saruk (3) et le Qu'el'faeruk (4) de la haute maison Helviiryn..."

Mes yeux s'écarquillèrent.

"Sa maîtrise des arts du spiritisme, du mysticisme ainsi que sa connaissance des lames était reconnu à travers tout Che'el. Il était l'un des mâle les plus respecté et les plus influent du royaume, jusqu'à ce que Lloth l'exil à jamais dans les profondeurs..."

Je buvais ses paroles comme un assoiffé, plus effaré de seconde en seconde.

"Le Maître partagea un amour clandestin avec l'Ulathtallar, sous les yeux désapprobateurs de leurs maisons."

La grande maison Aleanrahel et Helviiryn étaient les plus dévouées et les préférées de Lloth parmi les sept, qui avait un léger penchant pour cette dernière.

"Un jour, l'Archi-prêtresse de la déesse tomba enceinte. Tes parents étaient heureux, mais ils savaient ce qui les attendait au bout du chemin, et leurs craintes se confirmèrent rapidement. La maison Aleanrahel, craignant de voir destituée son Ulathtallar, et donc de perdre toute influence, conclu un sombre pacte avec la maison Helviiryn, qui elle aussi redoutait de perdre les faveurs de Lloth. L'empoisonnement dont je t'ai parlé fût commandité. Ce fût un échec cuisant, le Maître veillait puissamment sur toi et sur ta mère. Au pied du mur, la maison Aleanrahel fit alors quelque chose qui plongea la maison favorite de Lloth dans les profondeurs. Elle accusa Jeggred Dhuunyl de viol. La déesse araignée, folle de rage, n'écouta pas la voix de la maison Helviiryn et bannit ton père dans les strates inférieurs. Dans son infini cruauté, elle laissa son Archi-prêtresse te mettre au monde afin de te réduire en esclavage, et fit empoisonner ta mère juste après ta naissance. "

Je restais muet de longues minutes, les yeux plongés dans un chaos infini avant de dire quoi que ce soit.

"Pourquoi...pourquoi Lloth n'a-t-elle pas tué mon père ?"

"Il avait trop d'influence et de puissance pour se faire empoisonner comme n'importe quel c'rintri (5), de plus, la déesse craignait une confrontation directe avec lui. Elle a préféré l'exiler et l'emprisonner dans les limbes, et savoir qu'il serait le spectateur impuissant de ta servitude...sauf qu'elle l'a sous-estimé. S'il ne peut plus revenir à Che'el, il peut y envoyer son plus fidèle serviteur..."

Sa phrase resta en suspend, je regardais Ztefano sans le voir, écrasé par le poids de ses révélations.

"Tu es envoyé par mon père..."

"Oui, Helevorn."

Ma tête s'inclina contre ma paume.

"Et qu'attend-t-il de moi ?"

"Que tu te libère... Tout à l'heure, je t'ai demandé si tu savais pourquoi on t'interdisait de regarder les femelles dans les yeux."

Je hochais la tête.

"Parce que tout le pouvoir du Maître réside là," fit il en désignant mes yeux de son index brumeux. "Tu as hérité d'une part de sa puissance. Elle dort depuis des années au fond de toi. La maison Aleanrahel qui dirige les Yochlol leur ont interdit de croiser ton regard, par crainte que le pouvoir psychique de ton père ne les soumette à sa volonté. Si elles enfreignent la règle, elles risquent la mort."

Elles aussi vivent avec une menace perpétuelle au dessus de leur tête, jamais je n'aurai pu l'imaginer...

"Mais ne ressent aucune clémence envers elles. Si elles ont ordre de fuir ton regard, leurs sévices et particulièrement ceux de Xyltin sont le fruit de leur adoration pour Lloth. "

Il avait sans doute capté mes pensées pour me dire ceci, mais je ne ressentais qu'une rage sourde au fond de moi. Une colère si grande pour mes bourreaux, les machinations des maisons et la déesse, que j'aurai pu les tuer de mes propres mains s'ils avaient été devant moi.

"Tu es furieux, je le sens."

Je serrais les poings.

"Ils vont payer. Pour les mensonges, pour le meurtre de ma mère et le bannissement de mon père, et pour ce qu'ils m'ont fait subir toutes ces années..."

"Oui Helevorn, tu vas leur faire payer. Chèrement. Tu vas faire payer Lloth, car si tu la soumet à ta volonté, tu libéreras le Maître de sa prison..."

Une décharge d'énergie maléfique parcourra mes membres, « Tu libéreras le Maître ». Cette perspective me donna encore plus de hargne.

"Je soumettrai Lloth, et je libérerai mon père. Ztefano, dis moi ce que je dois faire."

Un sourire démoniaque s'afficha sur son visage. Il recula dans l'ombre puis en ressortit d'un pas. Il avait retrouvé son apparence originelle, mais il ne m'effrayait plus. Nous étions liés à présent. Il s'approcha de moi et approcha sa face de mon visage. Une sensation de froid tétanisa mes membres. Le liquide vaporeux suintant de sa peau s'enroula autour de moi. Son regard vitreux plongea dans le miens, il ouvrit la gueule et s'en répandit un flot de puissance spirituelle étincelant. Il me léguait le pouvoir...

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(1) Archi-Prêtresse, grade le plus haut dans la hiérarchie du temple de Lloth.

(2) Champion impitoyable de la déesse araignée.

(3) Maître d'arme d'une grande maison

(4) Maître mage d'une grande maison

(5) Drow noble

Modifié (le) par Helevorn
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  • 2 weeks later...

V

"Gamin ! Lève-toi. La Yochlol va arriver d'une minute à l'autre."

J'ouvrais les yeux sur le plafond poussiéreux de l'étable. Kaomal était accroupit près de moi, les traits tirés.

"Je ne t'ai pas entendu rentrer cette nuit. Tu as trouvé ce que tu cherchais ?" me chuchota-t-il.

"Oui..."lançais-je machinalement.

Je me redressais, plissant mes paupières chaudes de sommeil. A travers mon corps, je ressentis soudain quelque chose d'étrange, bouillonnant dans mes entrailles, parcourant mes muscles, fourmillant dans mon crâne jusqu'à l'extrémité de mes cheveux. J'étais comme revigoré. Mon regard croisa celui de l'humain. Son expression se figea un court instant, ses lèvres esquissèrent un mouvement quand la maîtresse arriva. Il saisit mon bras pour que je le regarde à nouveau.

"Quoi ?" demandais-je.

Il ouvrit légèrement la bouche.

"TOI !" lança la Yochlol en me désignant de l'index, coupant mon compagnon.

Mon sang ne fit qu'un tour.

"Tu es attendu à la forge, dépêche-toi !"

La maîtresse se retira. Les esclaves se tournèrent vers moi pour me dévisager avant de reprendre leurs activités.

"Pourquoi la forge ?" demandais-je à l'humain. "Le déchargement de l'adamantite est repoussé ?"

"Non...Nous y allons. Je ne sais pas pourquoi on te demande à la forge, mais en tout cas prend-le comme un privilège, tu y rencontrera le Maître Forgeron."

Je me levais sans un mot.

"Regarde-moi."

Je levais les yeux sur lui, ses prunelles semblèrent se perdre dans des miasmes ténébreux.

"Je ne sais pas ce que tu es allé faire à la Maison Rouge, mais quelque chose à changé en toi... Ne tarde pas ! "finit-il par me dire en me donnant une tape sur l'épaule.

La Maison Rouge...mon esprit s'éveilla soudain dans le souvenir de cette nuit irréelle. Ztefano. Mes parents. Ma mission...Un frisson me parcourut les membres.

Lloth...murmurais-je.

Sans plus d'explication, je sortis de l'étable d'un pas déterminé et rallia la forge. Là, plusieurs nobles de la maison Dxjanr'Lo discutaient avec la Maîtresse. Je ne pris pas le risque de lever les yeux vers leurs visages, m'avançant modestement en silence.

"Le voilà."

"Aaah, enfin !" fit-une voix masculine. "Voilà le sauveur de l'économie de Che'el !"

"Ne lui donnez pas plus d'importance qu'il en a, il n'en vaut pas la peine."

"Hmm. Mais c'est un Drow !"

"Oui, c'est ce que la servante de Lloth nous expliquait tout à l'heure, si vous étiez un peu plus attentif..."

"Oh ! Mille excuses pour la bavure Malla Ilharess (1). Mon enthousiasme m'a rendu sourd."

La forge était ouverte vers l'extérieur. L'odeur du métal chaud me picotait les narines. Sur des tables en bois étaient disposé des tenailles, des pinces, des marteaux de différentes tailles. Au cœur, un four de pierre recueillant un réceptacle rempli d'un liquide en fusion, fumant et bouillonnant.

Alors que les c'rintri s'éloignaient avec la Yochlol pour discuter de moi, un tablier de cuir boucha mon champ de vision.

"Quel est ton nom ?" me demanda une voix féminine.

"Je suis né sans nom," répondis-je sans lever les yeux.

Un court silence s'installa.

"Quel âge as-tu ?"

"Je crois 17, ou 18 ans..."

Elle soupira sèchement puis retira ses gants d'artisan.

"Je suis Belarbreena Pharn, Maîtresse Forgeron de la Maison Dxjanr'Lo. Les conseillés d'Elvraema voulaient rencontrer l'esclave qui a mit fin à la crise, mais ta surveillante à tout fait pour les en dissuader. Je n'ai pas tout écouté de ce qui s'est dit sur toi et à vrai dire peu m'importe. Si Lloth t'as réduit en esclavage, c'est qu'elle avait ses raisons, et ce qui concerne la Déesse ne me regarde pas..."

Une idée éclot dans mon esprit. Une idée pour échapper aux griffes de Xyltin et de ses sbires. Une opportunité à ne pas laisser filer. Je devais tenter quelque chose que je n'avais jamais tenté auparavant, tenter quelque chose qu'on m'a toujours interdit. Comme un appel, je sentais cet instant se figer dans le temps. Je levais alors les yeux sur cette femme, plongeant mon regard dans le sien, relevant la tête pour lui répondre.

"Je suis honoré de faire votre connaissance, Maîtresse."

Mes prunelles s'imprimèrent aux siennes, lui transmettant aussi fort que je le pouvais mon désir de travailler à ses côtés à la forge avant de baisser les yeux à nouveau, prenant garde à la vigilance de la maîtresse. Je n'eûs pas le loisir d'apprécier l'expression de son visage, à peine avais-je eu le temps de regarder ses traits. Le message que je devais lui transmettre primait sur tout, à présent, je devais attendre, et voir...

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(1) honorée matrone

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  • 3 weeks later...

Derrière moi, les pas de la Yochlol se rapprochèrent.

"Va décharger l'adamantite avec les autres, dépêche-toi !"

La forgeronne ne dit mot. L'espérance m'emplissait, se débattant face à la fatalité qui chaque seconde de plus gagnait du terrain. Je ne bougeais pas, avec l'espoir que Belarbreena dise quelque chose. Il n'en fût rien. Un coup de pied dans le tibia me rappela a la dure réalité.

"Qu'est ce que tu attends !" éructa-t-elle.

Mes poings se serrèrent, ça n'avait pas fonctionné. Je m'en retourna alors le dos courbé sous les coups de knouts en direction du chariot autour duquel s'activait les humains. Mon esprit était tant accaparé par mes tourments que ma chair ne ressentit rien à la rossée.

Pourquoi ça n'a pas fonctionné ? Ztefano m'aurait-il mentit sur mes pouvoirs ? Comment vais-je réussir à m'arracher au joug de Xyltin à présent ? L'occasion était parfaite, et mon plan a échoué ! Pourquoi ? M'y suis-je mal pris ? Que devais-je faire ? ...

La colère grandissait face a mon échec et mon impuissance. Ma défaite était d'autant plus cuisante que pour la première fois dans ma vie j'avais cru en une libération, véritablement. Je me sentais trahis et incapable.

Tel un pantin articulé par le bon vouloir de mes bourreaux, mes mains se saisirent des minerais. Lourds et coupants. Je rentrais dans le rang, suivant la procession qui menait au dépôt. L'odeur de sueur des hommes me donna la nausée. Kaomal croisa mon regard vide, je ne le vis même pas. En mon for intérieur, un refrain tourbillonnait.

Assez de cette vie...assez....assez...

L'adamantite s'entassait dans des coffres en métal jusqu'à rebord avant d'être fermés à clés et transportés en lieux sûr par deux apprentis forgeron. Mon regard s'aiguisa sur eux. Je convoitais leur place, mais il n'y en avait pas pour moi, fils de personne et meurtrier aux yeux de tout un peuple...

Soudain, un hurlement de douleur m'arracha à mes pensées. Un coffre venait d'échapper aux mains d'un apprentis et avait fini sa chute sur son pieds. Immédiatement, un attroupement se forma. Caridd s'empara le premier du coffre pour le soulever quand la Yochlol dispersa l'attroupement suivie de la forgeronne.

"IBLITH DEL RIVVIL (1) !" mugit-elle.

Elle décocha un violent coup de knouts en plein visage de Caridd qui tomba à la renverse en tenant sa tête entre ses mains.

"Tu mourras pour ta maladresse !"

La surveillante croyait l'humain responsable de l'accident, Kaomal intervint immédiatement pour plaider sa cause mais n'en récolta qu'un coup brutal suivi d'une menace de mort.

Le coffre fut dégager et l'apprenti emmené dans la forge pour être soigné accompagné de ses geignements de douleur.

Belarbreena avait assisté à la scène le visage fermé, elle n'avait rien dit jusque là mais son regard en disait long. Lorsque la maîtresse ordonna le retour vers les mines, la forgeronne la prit à part. Elles discutèrent quelques instants tandis que nous nous mettions en place sous les bras de la charrette. Elles se tournèrent vers moi. Je baissa immédiatement les yeux.

La conversation sembla monter d'un ton et pris fin brutalement. La Yochlol revint vers le chariot en maugréant, me saisit par le bras et m'entraîna sans ménagement jusqu'à Belarbreena devant qui elle me poussa d'un geste méprisant.

"Irae Xyltin sera prévenue dés mon retour. Je doute qu'elle accepte une telle chose, vous savez aussi bien que moi pour quelle raison."

"Je m'entretiendrai avec udossta malla Ilharess (2) quant à son devenir, et avec Jabress Xyltin (3). Mais sachez qu'après l'acte impardonnable de votre esclave sur mon apprenti, vous n'avez pas grands arguments pour vous y opposer."

"Vous verrez ceci avec elle, Aluve'."

"Aluve' Yochlol."

Un léger sourire s'esquissa sur mon visage...

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(1) Vermine d'humain

(2) Notre Honorée Matrone

(3) Maîtresse Xyltin

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  • 2 weeks later...

Belarbreena s'en retourna vers la forge. Avant de la suivre je jetais un œil par-dessus mon épaule. Kaomal me regarda d'un de ces regards à la fois interrogateurs et confiants. Il me fit un léger signe de tête avant que la Yochlol ne fasse claquer le fouet au dessus de leurs crânes, signe qu'il était grand temps de partir. La charrette produisit un léger grincement et avança avec légèreté, maintenant qu'elle était libérée de son colossal chargement.

Sans perdre plus de temps je rejoignis ma sauveuse à l'intérieur du bâtiment. La guérisseuse dépêchée pour le blessé quitta le chevet de ce dernier en rangeant un monocle dans la poche intérieur de son veston. Elle s'avança, le visage concentré pour annoncer le diagnostic.

"Les os de son pieds sont brisés, il ne pourra pas remarcher avant plusieurs mois...s'il remarche. Il risque d'être boiteux."

La forgeronne poussa un profond soupire.

"Je lui ai appliqué un puissant onguent antihémorragique cicatrisant, et lui ai donné une potion d'insensibilité afin d'amoindrir sa souffrance. L'onguent doit s'appliquer tous les jours dans un premier temps, quant à la potion, elle doit lui être administrée toutes les 3-4 heures..."

"Je ne peux le garder ici. Il faut qu'il soit emmené dés maintenant dans un endroit où il pourra être soigné. La forge n'est pas un lieu adéquat et j'ai trop à faire pour m'occuper de ça."

La guérisseuse baissa la tête en signe d'acquiescement.

"Prévenez son père, vous le trouverez à la Grande Maison."

"Je suis là !" fit une voix de l'extérieure.

Un homme vêtu richement pénétra dans la forge, les sourcils froncés.

"Bonjour Malla Qu'el'saruk."

"Maître forgeronne, où est mon fils ? J'ai été prévenu a l'instant de l'accident."

"Dans la pièce à l'arrière," répondit la guérisseuse. "Il s'est endormit sous les effets de la potion, mieux vaut le laisser dans les ténèbres pour le moment..."

Il hocha la tête avec gravité.

"Et son pieds ? Il va pouvoir continuer son apprentissage ?"

"Non," répondit Balerbreena sans demi mesure. "Il en a pour plusieurs mois, je ne peux le garder ici. Ramenez-le chez vous pendant sa convalescence ..."

Il poussa un soupir sec, s'engouffra dans la chambre et en ressortit avec son fils assoupit entre les bras.

"Je veux voir l'esclave responsable de ceci écartelé sur la place publique."

"Ce sera fait Malla Qu'el'saruk, n'en doutez pas. Irae Xyltin compte se déplacer jusqu'ici pour faire justice..."

L'homme grogna pour toute approbation et quitta les lieux suivie de près par la guérisseuse. Belarbreena se tourna ensuite vers moi, plongeant son regard dans le miens.

"Il semblerait qu'une place d'apprenti se soit libérée..."

Ma bouche afficha un sourire réservé, ne sachant si je devais me réjouir ou déplorer cet évènement. N'ayant aucune idée du caractère de cette femelle, je décidais de prendre le moins de risque possible.

"Aunrae !" appella-t-elle.

Une jeune drow aux yeux de chats apparut.

"Ah, tu es là ! "

"Je nettoyais le sang sur le linge..." son regard se posa sur moi.""Qui est-ce ?"

"Le nouvel apprenti."

Ses yeux s'écarquillèrent.

"Mère, tu ne peux pas prendre la place de Nadal pour la lui donner..." protesta-t-elle.

"Je fais ce que bon me semble Aunrae. Il n'est plus en état de travailler quoi qu'il en soit."

"Et quand il sera guérit ?"

"Nous en reparlerons...puis ça lui évitera de te tourner autour sans cesse."

La jeune drow leva les yeux au plafond.

"Et ne discute pas."

Elle haussa les épaules brusquement et disparut de la pièce. La forgeronne se tourna vers moi.

"Officiellement tu es l'esclave de la forge, officiellement aussi je ne prend aucun remplaçant et j'attends le rétablissement de Nadal. La surveillante en chef de ta garnison d'esclave n'acceptera jamais que je te prenne comme apprenti, alors tu devras faire profil bas sous peine de retourner là d'où tu viens, est-ce clair ?"

"Très clair Malla Jabress." fis-je sur un ton des plus respectueux.

"Quant à ma fille, elle n'en dira rien, j'ai une confiance totale en elle." Elle jeta un œil vers la porte. "Elle a juste son caractère..."

Modifié (le) par Helevorn
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"Tu prendras la chambre de Nadal, elle est rustique pour un crint'ri mais pour toi, j'imagine que ce sera le grand luxe...Aunrae te donnera un tablier et te montrera où sont les outils dont tu auras besoin pour commencer."

L'idée d'entamer mon apprentissage m'excita grandement jusqu'à ce qu'elle m'annonce le programme...

"Tes tâches sont simple et incombent à tout apprenti dés le départ. Tous les matins tu nettoieras et rangera la forge de fond en comble avant que nous ne commencions le travail, prévois trois heures, sachant que nous mettons la machine en marche dés 7h. Tu te chargeras ensuite d'allumer les fours, de les alimenter, de changer l'eau des bacs, de ranger les outils au fur et à mesure, de trier dans les caisses les différents métaux, ceux à refondre et ceux à jeter, de classer les productions dans les coffres adéquats en fonction de leur type, puis de leurs livraison une fois l'objet fini. Voilà, je crois n'avoir rien oublié. Des questions ?"

Tentant d'emmagasiner le flot d'informations qu'elle me donnait sans rien omettre, je restais silencieux quelques instants.

"Y'a quelqu'un ?!" fit-elle en tendant le cou vers moi, un sourcil levé.

"Euh...non Maîtresse, pas pour le moment. J'ai bien compris."

Elle me dévisagea un instant avant de reprendre avec davantage de sérieux.

"Je vais devoir te trouver un nom, je ne vais pas pouvoir te faire travailler sans jamais te nommer, et les insultes des Yochlol ne sont pas à mon goût. Tu as une proposition ?"

Je fis mine de réfléchir puis hochais la tête. Personne ne connaissait mon prénom de naissance, alors a quoi bon le lui cacher ...

"Helevorn ?"

"Hum..."fit-elle pensive. Alors Helevorn, tu me feras le plaisir de prendre un bain !"

"Oui Maîtresse..."

Je crû rougir de honte. Pour vivre dans la crasse depuis si longtemps, mon odorat avait dû s'accoutumer aux odeurs les plus désagréables, et il est vrai que mon dernier bain remontait à plus d'un mois dans une rivière souterraine près d'un site minier. Je comprenais mieux le dégoût et le mépris que nous esclaves, inspirions si facilement aux autres.

Belarbreena s'éclipsa, me laissant seul au milieu de la forge quand la voix d'Aunrae retentit.

"Hey !"

Je me retournais.

"Si tu veux voir ta chambre viens avec moi."

Je lui emboîta le pas sans tarder.

Après avoir emprunté un escalier de bois descendant au sous-sol, elle ouvrit une porte sur sa gauche et entra. Je la suivis, scrutant le lieu qui serait ma future chambre. Mon hôte rassembla quelques affaires de mon prédécesseur avant de se tourner vers moi pour me désigner les différents meubles de la pièce, qui se résumaient a deux...

"Voilà ton armoire pour ranger ton habit de travail, et ton lit."

L'endroit était épuré mais la simple idée d'avoir une chambre privative me remplissait de joie. En presque deux décennies ça ne m'était jamais arrivé, si on ne compte pas les quelques fois en isolement...Je hochais la tête dans un sourire sous le regard antipathique d'Aunrae. Sans doute devait-elle trouver mon enthousiasme ridicule, et je sentis rapidement qu'elle me prenait pour un opportuniste même si la décision de me prendre à la forge avait été prise par sa mère.

"Je ne te donne pas la clés de la porte, je pense que tu n'as rien à cacher n'est ce pas ?"

Je secoua la tête sans croiser son regard. Elle ouvrit la penderie pour en sortir un pantalon et une chemise en toile simple avant de s'engouffrer dans le couloir. Sans savoir si je devais la suivre ou rester là, j'eus un instant de flottement. Ses pas s'arrêtèrent...

"Tu viens ?!"

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Je refermais la porte et la suivis docilement. Elle me désigna une autre porte.

"Ici, c'est ma chambre...et là," fit-elle en s'arrêtant face à une nouvelle porte, "c'est ma salle de bain."

Son insistance sur le « ma » me fit clairement comprendre que je n'y aurai pas accès souvent, elle confirma d'ailleurs très vite mes suppositions.

"Ma mère veut que tu prennes un bain, et il est évident que c'est indispensable...mais cette salle de bain reste ma salle de bain, ce qui signifie que tu n'auras plus le droit d'y entrer après aujourd'hui. Pour faire ta toilette tu iras tirer de l'eau au puits et tu la feras à la vasque, comme tous les mâles."

Elle posa sa main sur la poignée.

"Et surtout ne touche à rien."

Je hochais la tête, les yeux rivés au parquet quelque peu agacé par ses airs supérieurs, même si comparé aux Yochlol elle était plutôt aimable ...

La pièce n'était pas particulièrement grande. Sur un tapis trônait une baignoire en fonte. Des linges blancs étaient tendus au plafond et glissaient jusqu'au sol. Dans une cheminée crépitait un feu dont les flammes léchaient une marmite d'eau. La jeune femelle me désigna un paravent en bois sertit de pièces de métal.

"Déshabille-toi."

Je disparu derrière le panneau et commença a retirer mes vieilles fripes crasseuses. Dans une rainure, je pu observer Aunrae qui s'affairait à remplir le bain. Je n'avais pas encore eu le loisir de la détailler, à vrai dire je n'avais pas osé de peur qu'elle me rabroue. Cette méfiance me mit soudainement en colère. Ces années d'esclavage m'avaient formaté, avait fait de moi une chose docile et craintive. Ce sentiment de peur qui m'habitait était insupportable depuis longtemps, même s'il m'avait sauvé la vie plus d'une fois, mais depuis ma rencontre avec Ztefano je sentais qu'un besoin imparable de m'arracher à cette soumission, à cette fatalité malsaine m'assaillait avec davantage de force. A mesure que j'observais mon hôte, un désir ardent de manipulation s'empara de moi...

Gagne leur confiance, montre qui tu es, de quoi tu es capable, reste discret face à tes ennemis, sais courber l'échine pour mieux redresser le dos au moment propice, et agir au moment où ils ne s'y attendent plus...

Impétueuse. La fille de Belarbreena arborait une chevelure de feu qui frôlait ses épaules en mèches distinctes et effilées. Ses traits étaient à la fois fins et précis. Ses pommettes légèrement bombées soutenaient deux grands yeux en amande aux reflets argentés, limpides comme une source claire. La couleur de sa peau était chaude comme le bronze. Son corps élancé donnait une fausse impression de fragilité. Elle devait être tout juste plus âgée que moi.

Mon pantalon glissa sur mes chevilles. J'étais un esclave puant et crasseux, cela faisait une éternité que je n'avais pas croisé mon reflet, ce bain serait l'instant de ma purification, du renouveau, et sans doute de ma rencontre avec moi-même ...

L'apprentie vida une dernière marmite d'eau chaude dans le bain.

"C'est prêt !"

Elle se tourna pour raccrocher le récipient dans la cheminée. A cet instant, je savais qu'elle éprouvait pour moi une profonde indifférence teintée de dégoût. Jamais une femelle de son âge normalement constituée aurait accepté de voir un mâle nu devant elle. Je pensais alors qu'elle ne me considérait même pas comme tel. Je devais avoir autant d'attrait que le pichet posé sur la table, à la différence prêt que le pichet était utile et décoratif.

Je fronçais les sourcils, le cœur palpitant. Jamais je ne m'étais retrouvé dans pareille situation. Jamais une femelle n'avait eu l'occasion de me voir ainsi. Mes mâchoires se serrèrent. Tandis qu'elle était encore retournée, un flot de rage déferla en moi. J'étais tiraillé entre le besoin d'exister, de me montrer sans me cacher pour qu'elle se rende compte de ma présence, et l'envie de me réfugier dans ce bain et d'y disparaître. J'accélérais brièvement le pas jusqu'à plonger mon pieds dans l'eau chaude. Ma tête me disait tout et son contraire.

Entre ! Reste-là ! Attends qu'elle se retourne ! Cache-toi ! Affirme-toi ! Tu n'es pas un meuble ! Tu es crasseux ! Va dans l'eau !

L'instant de réflexion de trop, elle se tourna vers moi sans se douter que j'étais encore debout. Un pieds dans la baignoire, l'autre sur le parquet dans une position des plus impudique. Ses yeux se perdirent un instant sur mon corps avec affolement avant de se détourner, le feu aux joues. Je déglutis bruyamment, la gorge serrée dans un étau de fer, a la fois vert de honte et ravi d'avoir provoqué une réaction chez elle. Je m'immergea immédiatement ensuite dans le bain.

"Hum..bon..Je...vais te laisser te laver...Tiens, voilà du savon."

Elle le jeta dans l'eau dans un plouf précipité et quitta la salle d'eau. Mon rythme cardiaque tambourina encore un moment ma poitrine avant de retrouver sa mélopée naturelle. Je plongea la tête sous l'eau chaude en souriant...

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VI

Après d'âpres négociations entre Belarbreena et Xyltin, il fût convenu que je deviendrais esclave de la Maison Dxjanr'Lo au service particulier de la Maîtresse forgeronne.

Mon bourreau obtenu un droit de visite mensuel visant à surveiller mon intégration au sein de la Haute Maison. Ma sauveuse ignorait au départ de quoi il allait s'agir, j'étais le seul à le savoir, accoutumé au sadisme d'Irae depuis mon enfance, mais je décidais de garder le silence. J'avais un plan.

Le jour de sa venue arriva. J'étais si excité par mon stratagème que la punition qu'elle allait m'infliger ne me tracassa pas. La douleur était une donnée familière que j'avais appris à accepter comme inhérente a mon existence. Cette fois-ci, sans doute se déchainerait-elle plus qu'a l'accoutumée. Le fait que je lui échappe de cette manière avait dû la plonger dans une noire colère, et ce n'était rien comparé a la furie qui allait s'emparer d'elle...

Je triais consciencieusement les métaux depuis une bonne heure quand j'entendis sa voix s'élever sur la place. Elle venait d'arriver. Belarbreena échangea quelques banalités avec elle avant de venir me chercher.

Mon rythme cardiaque s'accéléra, je la suivis jusqu'à l'extérieur, les yeux rivés au sol. Le parfum caractéristique de ses vêtements de cuir crispa tout mon être, me giflant d'un millier de souvenirs tous plus cuisants les uns que les autres.

"Nous allons faire une petite promenade lui et moi."sur un ton qui ne laissait aucun doute sur la suite des évènements.

Belarbreena eu un instant d'hésitation.

"Hum...eh bien a tout à l'heure, ne tardez pas trop il reste beaucoup de travail", finit-elle par dire sur un ton sec avant de s'en retourner au cœur de l'atelier.

Irae laissa échapper un soupir de satisfaction avant de me pousser brutalement du plat de la main.

"Avance !"

Un silence pesant s'abaissa tandis que nous marchions le long de la route. J'ignorais tout de l'endroit où nous allions.

Passé la citée, elle m'entraîna sur un chemin descendant vers un ancien site minier. Une cabane délabrée semblable à celle du dernier site où je m'éreintais trônait piteusement au pied d'un immense rocher calcaire. C'est là que nous allions.

Elle avait déjà préparé de quoi passer ses nerfs. Sur un établi, des fers, un knout, un fouet à lanières tressées, des chaînes et encore deux ou trois objets sur lesquels je ne m'attardais pas.

Avec le calme de ceux qui se délectent d'un moment longtemps attendu, elle ferma la porte à double tours, coinça la clé dans sa ceinture puis tourna lentement autour de la table, caressant de l'index ses jouets de torture. Tandis qu'elle ne me surveillait pas, je levais les yeux sur elle, chose rarissime. Jamais auparavant je n'aurais pris un tel risque, mais aujourd'hui était bien différent.

En scrutant son visage pour la première fois, je m'aperçus que je m'étais fais une fausse image d'elle, une image en corrélation avec ce qu'elle faisait de moi, image d'un visage mêlé de terreur, de souffrance, de cauchemars. Au lieu de ça, je me surpris a analyser ses traits avec intérêt et sans aucune retenue.

Irae était dotée d'un visage de guerrière, aux traits francs, aux lignes droites et sans rondeurs. Son regard lavande perçant était encadré par des cheveux noirs et raides, coupés au dessus des épaules. Son visage était d'une perfection inouïe. D'une élégante et implacable dureté. Étrangement la teinte de sa peau contrastait, s'approchant d'un gris clair et doux.

Mon bourreau releva précipitamment les yeux, croisant le miens à peine un instant. Sa colère ne se fit pas attendre.

"COMMENT OSES TU !"

Elle n'eût qu'un pas à faire pour me gifler. Elle s'empara du fouet.

"Déshabille-toi !"

Je m'exécutais, le front baissé. Tablier et pantalon tombèrent au sol. Xyltin s'approcha de moi, tout près. Elle me respira comme une proie.

"Belarbreena te gâte...tu sens le savon, et tes vêtements sont propres.."

Elle me contourna. Son haleine lécha mon épaule.

Je sentais ses yeux courir sur mon corps, parcourir avec délectation les marques qu'elle m'avait laissé par le passé. A cet instant je compris qu'elle me considérait comme sa chose, et que ce moment de retrouvailles signifiait bien plus pour elle qu'une simple séance de torture. J'étais l'esclave qu'elle connaissait le mieux, l'esclave réputé pour son ignominie auquel elle infligeait la hire de Lloth. Un cadeau, un privilège, et une relation aussi malsaine que familière entre elle et moi.

Sa main saisit une dague à lame serpenté, plus connu sous le nom de kriss. Elle posa la pointe sur ma gorge. Perle de sang, courant le long de ma clavicule. Ses prunelles vibrèrent à sa vue. Son cœur s'emballa d'excitation, elle se mordit la lèvre inférieur avant de se reculer. Le fouet claqua bruyamment dans l'air. La goutte de sang descendit au creux de mes pectoraux. Je sentais que c'était le moment, elle était à point...

"Malla Jabress, ne voulez-vous pas goûter le sang que vous avez fait couler ?"

Mon intervention la stupéfia, si bien qu'elle resta sans rien dire de longues secondes.

Une nouvelle perle de sang suinta de la petite plaie à ma gorge et suivit le filet sanguinolent, accélérant la course de la première le long de mes abdominaux.

Elle lâcha un grognement décontenancé et pour toute réponse me repoussa a deux mains contre le mur. Je restais sans réaction. Elle saisit mes poignets un a un et les emprisonna à l'aide de fers, me maintenant les bras à demi-levés.

Elle approcha sa bouche de mon visage et me lança sur un ton menaçant.

"Ne t'avise plus de m'adresser la parole, ou ta langue finira sur le parquet de cette cabane !"

La situation bien qu'inconfortable me procurait une certaine satisfaction. J'avais réussi a la déstabiliser, et à mesure que les secondes passaient, je sentais sa rage grandir...et grandir encore...

Ma bravade m'avait valut tant de coups que j'étais incapables de les dénombrer, et de dire combien de temps cela avait duré. La souffrance déforme notre notion du temps. Une minute peut paraître une heure, tout comme s'évanouir nous plonge dans les ténèbres quelques secondes et nous semble cent fois plus long.

La douleur habitait chaque parcelle de mon corps, chaque muscle, chaque centimètre de chair. Tuméfié, lacéré, fracturé, en âge de sueurs froides, en sang.

Xyltin n'avait su s'arrêter et m'avait laissé mourant dans la bicoque. J'avais payé le prix fort.

Belarbreena et Aunrae avaient dû venir me chercher. Je me rappelle d'un cris effrayé. Puis rien d'autre que des ténèbres...

Seule la quasi imperceptible lueur d'espoir qui m'habitait brillait faiblement dans mon cauchemars...

Modifié (le) par Helevorn
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  • 2 weeks later...

Il fait froid dans cette antre. Il fait sombre. Des filaments courent sur les murs. Des sons de pattes piaffent sur le sol. Le crissement de centaines de mandibules me parviennent. J'ai froid. Si froid. Je ne peux pas bouger. J'ai beau essayer, rien n'y fait. Je ne vois même pas mon corps. J'ai peur. Un bruit se rapproche. Et s'intensifie. Mes paupières se ferment sans que je le commande. Je suis aveugle. Et le son se rapproche davantage. Une vague glacée me balaye. Mes paupières se rouvrent. Je vois...quelque chose face à moi, mais l'image est brouillée...les lignes se précisent, je sens la terreur s'emparer de moi. C'est Lloth. A peine ais-je le temps de m'en rendre compte qu'elle me frappe en plein visage dans un rictus effroyable.

Tout est noir à nouveau.

Un cris étouffé.

J'ai froid. Si froid.

Je crois sentir mon corps. Je sens ma respiration.

J'entends des voix. Mais je ne comprend pas.

Je me sens bouger. Mes joues se réchauffent soudainement, et de plus en plus. Les paroles auparavant lointaines se font plus fortes.

"HELEVORN !"

Clack

Mes joues me cuisent.

Clack

"HELEVORN ! Tu m'entends ?"

CLACK

CLACK

...

"Il faut l'emmener ! Aide-moi !"

...

Le silence. Les ténèbres. Et le vide...

Une raie de lumière. Presque imperceptible. Une odeur de métal. J'entre-ouvrais mes paupières.

Je sentais mon corps. Pesant. Chaleur. Je tournais la tête lentement à gauche. Ma rétine mit plusieurs secondes avant de distinguer clairement ce qui m'entourais.

J'étais dans ma chambre. A la forge. Mes mains parcoururent mon corps. De nouvelles cicatrices. Je poussais un soupir de soulagement. J'avais survécu.

Je m'assis précautionneusement sur le bord du lit, examina mes bras, mon thorax, mes jambes. Mes plaies étaient cicatrisées, mon squelette ne semblait plus souffrir d'aucune fracture.

J'avais dû rester inconscient des mois. A cette pensée une crainte m'étreignit.

"La Maîtresse forgeronne ! Elle a dû me remplacer !"

Enfilant précipitamment un pantalon posé sur une chaise je sortis dans le couloir et couru à la forge. Je débouchais en trombe dans l'atelier. Aunrae et sa mère étaient en plein travail et ne me remarquèrent pas. Je cherchais des yeux la présence d'une troisième personne quand un cri de surprise m'interrompit.

"MíˆRE !"

Belarbreena se tourna vers sa fille qui me montrait du doigt puis vers moi.

"Helevorn !"

Les deux femelles s'approchèrent.

"Tu es réveillé !" fit la forgeronne soulagée avant de prendre un air plus stricte. "Mais que fais-tu ici ? Ta place est au lit !"

"Je suis guéris Maîtresse," fis-je en écartant les bras pour qu'elle constate elle-même la cicatrisation de mes blessures.

"Oui, nous le savons..."

Je lui coupais la parole, trop anxieux qu'elle ai mit quelqu'un à ma place.

"Je suis désolé Maîtresse, je vous ai fais perdre du temps mais je veux continuer a travailler pour vous et la maison Dxjanr "˜Lo, ne me renvoyez pas à Xyltin je vous en prie, je ferai ce qu'il faut pour rattraper mon retard."

Elle fronça les sourcils.

"Il n'en n'est même pas question..."

Mon sang ne fit qu'un tour.

"...Après ce qu'il s'est passé il lui est formellement interdit de remettre les pieds ici. La décision émane des haute instances de notre Maison. Il est inacceptable qu'elle se soit permit de laisser pour mort un esclave nous appartenant."

J'eus peine a réprimer un sourire réjouit. Mon plan avait porté ses fruits. Je me contentais de baisser la tête en signe de reconnaissance.

"Cela signifie-il que je fais toujours parti de la forge ?"

"Évidemment", répondit-elle comme si ça coulait de source.

Je venais de ressentir pour la première fois le sentiment que procurait la considération. A ma plus grande surprise, Aunrae me souriait avec franchise et paraissait même contente de me voir.

"Puis-je vous demander combien de mois de travail il me faudra rattraper ?"

"Combien de mois ? Tu es resté tout juste trois semaines dans le coma, nous nous demandons d'ailleurs comment ton rétablissement a put se faire si rapidement. La plupart des soigneurs qui se sont succédés a ton chevet mettent ça sur le compte de leurs talents, mais les praticiens qui connaissent l'humilité reconnaissent le caractère exceptionnel de ta guérison. Quand nous sommes venues te chercher avec Aunrae, la Mort s'emparait de toi. C'est un miracle que tu sois en vie. Une protection occulte plane sur toi."

J'esquissais un sourire innocent.

"Bien. Ce n'est pas tout ça mais il y a du travail en effet. Tu reprendras dés demain si tu t'en sent la force, mais nous irons doucement pour la reprise. En attendant, va dans ta chambre."

J'acquiesçais du front et obéis.

Xyltin était écartée de mon chemin une bonne fois pour toute. A présent, je devais échafauder un nouveau plan pour délivrer mon père...

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VII

Quelques semaines passèrent depuis mon réveil. J'avais repris le travail plus rapidement que ne l'aurait espéré Belarbreena. Les évènements, aussi difficiles qu'ils aient été, avaient joués grandement en ma faveur.

J'avais gagné le respect de la Maîtresse forgeronne qui s'adressait désormais à moi comme elle aurait put le faire avec mon prédécesseur, et non plus comme un vulgaire esclave. J'avais aussi gagné la sympathie et la curiosité de sa fille avec qui je pouvais espérer tenir quelques conversations.

Chaque nuit, je réfléchissais à un plan pour me rapprocher de la Déesse Araignée sans trouver de solution. Si j'étais né femelle, les choses auraient sans doute été plus simple. J'aurai pu tenter de me faire passer pour une prêtresse de Lloth ou une de ses sbire, mais ma stature jouait en ma défaveur. Ces années dans les mines avaient sculpté mon corps de la plus virile des façons. Personne n'aurait pu me confondre avec une femelle, même pas avec la plus puissante guerrière de Che'el, d'autant que les habits drow laissent paraître beaucoup trop de chair pour espérer gagner à ce jeu.

Chaque idée qui me venait était vite balayée, et une sourde colère grandissait en moi. J'étais seul encore une fois, livré a moi-même pour mener a bien une mission des plus périlleuse et des plus invraisemblable. Trouver celle que j'ai toujours fuis avec horreur. La simple pensée de me confronter à Lloth me glaçait d'effroi, mais je savais que j'irais jusqu'au bout, peu importe la manière, peu importe quand. J'en voulais à Ztefano de m'avoir donné un si lourd fardeau. Je lui en voulais de ne pas me venir en aide, de ne pas me donner des pistes.

Parfois, lors des nuits les plus difficiles, j'en venais à douter des pouvoirs qu'il m'avait légué. Je sentais bien que quelque chose avait changé, j'en avais eu la preuve, mais je m'attendais à quelque chose de bien plus probant et de bien plus spectaculaire.

Un énième jour commença, succédant à un autre remplit de mes tâches habituelles. Je ne me plaignais pas, mais je devenais impatient. J'espérais très bientôt que la Maîtresse me donnerait des tâches plus intéressantes, que je pourrais forger, apprendre ses techniques, m'enrichir de son expérience.

Peut être, pensais-je, devrais-je la contraindre mentalement...

Mais quelque chose en moi rejetait cette idée. J'avais l'envie qu'elle le décide en son âme et conscience, qu'elle juge quand je serais prêt. Je préférais simplement que son choix ai un sens.

La journée s'écoula donc tout à fait normalement, sans que Belarbreena ne m'annonce quoi que ce soit, et c'est au moment de ranger les outils qu'un jeune drow appuyé sur une canne fit son apparition. La Maîtresse était déjà descendue prendre du repos, seuls Aunrae et moi étions encore au travail.

"Aunrae ?"

Elle se retourna machinalement en essuyant ses mains sur son tablier.

"Nadal ! "s'écria-t-elle d'un ton ravis.

Elle se précipita vers lui et le dévisagea de bas en haut.

"Tu es guéris ?" jetant un regard à son pied bandé.

"Quasiment. La médecine fait des miracles de nos jours," lâcha-t-il dans un sourire.

"Ton père a dû y mettre les moyens."

"Il a fait ce qu'il fallait."

Aunrae se tourna dans ma direction.

"Nadal, je te présente Helevorn."

Le nez plongé dans un coffre pour ne pas me faire remarquer, je me releva les mâchoires serrées.

"Vendui ' "(1)...

Pour toute réponse il fronça les sourcils et se tourna vers son interlocutrice.

"C'est lui qui a prit ma place ?"

Elle me jeta un coup d'œil rapide, sentant la tension palpable elle entraîna Nadal sur la place, hors de portée de voix.

Très inquiet de la tournure que prenait les évènements je termina rapidement le rangement et me retira dans ma chambre. D'un geste énervé je me débarrassa de mon tablier qui vola au travers de la pièce.

"Iblith d'dalharuk d'c'rintri ! (2) Il va vouloir m'évincer..."

Les priorités dans mon plan venaient soudainement de changer...

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(1) Bonjour

(2) Saloperie de fils de noble !

Modifié (le) par Helevorn
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La nuit passa sans que je trouve le sommeil.

Si Nadal reprenait sa place, je devrais revenir à la carrière, et Xyltin m'y attendrait...

Un soubresaut s'empara de mon corps. Réaction inconsciente de la douleur qu'il avait connu sous ses mains...

Je ne pouvais pas y retourner. Je ne pouvais pas retomber à la case départ. Si je devais quitter la Maison Dxjanr'Lo et dépendre à nouveau de mon bourreau, je n'y survivrai pas, je le savais.

J'ignorais quelle décision Belarbreena allait prendre. Je ne pensais pas possible qu'elle accepte mon départ après ce que j'avais vécu a l'ancien site minier. Je savais malgré sa froideur que ma souffrance l'avait touchée, elle et sa fille. Mais serait-ce suffisant ?

Au matin, je trouvais Aunrae et sa mère en pleine discussion. A mon approche, elles se turent. Aunrae avait l'air contrariée. Elle passa près de moi sans un regard. Ma peau se hérissa d'inquiétude.

La Maîtresse forgeronne lâcha un parchemin sur la table en poussant un soupire. Elle se tourna vers moi, ne me voyant pas au travail elle s'empressa de me rappeler à mes obligations.

« Helevorn ! Au boulot ! »

Je m'exécutais sans un mot.

A la fin de la journée, la Maîtresse me convoqua avec Aunrae dans son office. Elle était assise dans un fauteuil en cuir sombre a haut dossier. Sur le bureau, un parchemin rédigé marqué d'un cachet de cire noire. Elle leva les yeux sur moi.

« J'ai ici une lettre du Qu'el'saruk de notre Maison. »

Elle fit une pause et parcouru les quelques lignes.

« Il annonce le prompt rétablissement de son fils, Nadal, et me demande de le réintégrer immédiatement à la forge. »

Elle me regarda droit dans les yeux.

« Il se déplace à l'aide d'une canne et de ce fait, il n'est pas en mesure de reprendre son apprentissage. Malheureusement, j'ai un contrat à honorer, et je ne peut refuser son retour. Le Qu'el'saruk suggère que l'esclave de la forge se charge de réaliser l'ensemble des tâches que son fils ne pourra assumer, jusqu'à ce qu'il recouvre l'usage total de son pieds. Durée qu'il estime à...une semaine, deux tout au plus. »

« Mère, mais nous n'aurons pas la place de loger Helevorn ! »

Je ne su déterminer dans quelle intention elle faisait cette remarque.

« Il devra dormir dans l'étable à côté, comme au premier jour de son arrivée ici. »

J'étais tellement abasourdi par la nouvelle que je ne trouva rien à dire, mon visage resta totalement fermé. Aunrae se tourna vers moi d'un air désolé, mais qui ne dissimulait pas suffisamment son plaisir de retrouver Nadal.

« Je ne comprends pas pourquoi son père s'entête à vouloir lui apprendre l'art de la forge. Il n'a aucun talent », lança Belarbreena avec agacement.

Sa fille se tourna vers elle.

« Ne dis pas ça ! »

« Aunrae ! » s'emporta-t-elle. « Tu sais très bien pourquoi il vient ici, ne fais pas l'idiote ! »

Elle baissa les yeux, les lèvres serrées.

« Et ça a le don de me mettre en colère... »

La Maîtresse se leva, passa près de nous et ouvrit la porte.

« Laisse moi seule avec lui, j'ai deux trois choses à lui dire en privé. »

Elle obéit en silence.

« Helevorn...je ne sais pas quoi te dire. Une fois Nadal guérit, je ne pourrais pas te garder, et j'ai bien peur de ne rien pouvoir faire pour toi. Il a beau n'avoir aucun talent pour la forge et courir inlassablement après ma fille, il n'en demeure pas moins le fils d'un c'rintri. »

Je poussais un soupir avant de la regarder droit dans les yeux.

« Vous avez déjà fait beaucoup pour moi Maîtresse. Je dois faire face à mon destin à présent. »

Elle poussa un soupir à son tour et me libéra la sortie.

Cette nuit, j'allais savourer mes dernières heures dans un lit avant de quitter ma chambre pour retrouver la couche de paille que j'ai toujours connue.

Tourmenté par mon avenir plus qu'incertain, je tournais et retournais le problème dans tous les sens.

Que fallait-il faire pour empêcher Nadal de prendre ma place ?

Chacune des solutions qui me venait à l'esprit entrainait de trop lourdes conséquences .

Le tuer ? Trop risqué. Convaincre Belarbreena ? Elle l'est déjà mais n'a pas le pouvoir de décision. Convaincre son père de ne pas l'envoyer ? Persuader son fils de ne pas revenir ? Ma puissance psychique n'agissait vraiment que sur les femelles...

En me faisant cette dernière réflexion, une idée éclot.

Aunrae...

Si Nadal préférait la courtiser plutôt que de se concentrer sur son apprentissage, j'avais là une carte à jouer.

Je devais la convaincre de l'éconduire. Si Nadal avait des sentiments pour elle, je devais frapper là où il aurait le plus mal. Je devais la séduire, tourner l'attention de la jeune femelle sur moi, et ainsi lui donner le coup de grâce...J'imaginais déjà la façon dont j'abattrais ma dernière carte. Cette pensée fit apparaître un sourire démoniaque sur mes lèvres.

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(version non censurée accessible sur demande à l'admin du forum des constellations, sous réserve d'âge)

Nadal revint comme l'avait annoncé son père, mais une semaine après sa lettre. Durant ce sursis, je m'étais employé chaque jour à me rapprocher d'Aunrae en prenant garde à ne pas éveiller la méfiance de sa mère. D'échanges de banalités en discussions, nos rapports avaient rapidement évolués en une sorte de complicité naissante, mais malheureusement pour moi, ses sentiments n'avaient pas suffisamment grandis pour que j'espère une prise de position en ma faveur face à mon rival.

A son retour, ce dernier remarqua clairement un changement dans le comportement d'Aunrae à mon égard ce qui le plongea dans une haine silencieuse et sournoise. Méprisant, condescendant en l'absence de Belarbreena, il me rabaissait sous couvert d'humour et s'arrangeait sans cesse pour m'éloigner d'Aunrae.

Son retour signifiait aussi ma rentrée à l'étable, le retour à une vie d'esclave avérée. Il m'excluait de la forge, monopolisait son attention, ne me laissait jamais seul en sa compagnie et jouait un double jeu avec la maîtresse. La situation m'échappait peu à peu. Si les choses suivaient leur cours sans que j'intervienne, je finirais par retourner entre les griffes de Xyltin, et il n'en était pas question. Je ne pouvais plus me permettre de courtiser Aunrae comme n'importe quel prétendant, je devais user de mes pouvoirs d'une manière plus...persuasive.

Une lueur émeraude scintilla dans l'obscurité. Il était l'heure. La forge dormait paisiblement dans les volutes légers des bacs, dans l'odeur ferrailleuse des minerais. Mes pas me guidèrent au sous-sol. A gauche, pas un bruit. Nadal dormait profondément. J'avançais discrètement, glissant ma main sur le mur. A droite, une torpeur toute aussi douce. Mes doigts appuyèrent sur la poignée dans un grincement léger.

Aunrae était assoupie dos à la porte, étendue sur son lit, le corps recouvert d'un drap blanc, sa chevelure flamboyante s'éparpillant sur le matelas. La porte se ferma lentement derrière moi. Discret comme un loup approchant sa proie insouciante je retirais mon pantalon pour le poser sur le dossier d'une chaise. Une sensation étrange m'habitait. J'étais possédé par une puissante sérénité, par le calme machiavélique de ceux qui maîtrisent la situation avant de commettre un forfait. Nulle peur. Nulle hésitation. Comme si chacun de mes gestes coulaient de source, alors que c'était la première fois... Je ne me l'expliquais pas, et à vrai dire en cet instant, ma raison n'entreprenait aucune analyse, j'étais submergé par mes sens. Mon corps bouillonnait d'une chaleur inhabituelle, et mon regard semblait s'imprégner d'une lueur inconnue. Mon odorat, ma vue, mon ouïe étaient submergés de ressentis, et mes deux derniers sens me pressaient de les nourrir.

D'un geste je soulevais subrepticement le draps pour m'y glisser. Elle était nue. Sans même la toucher, je sentais déjà son aura. Mon nez caressa sa douce chevelure parfumée, ma paume droite glissa délicatement le long de son bras. Sa respiration était profonde, le belle était perdue dans les méandres de ses rêves, et j'allais bientôt l'en sortir...

"Aunrae..."murmurais-je..

Mon corps brûlant de désir s'approcha du siens.

"Aunrae..."

Ma main se fraya un chemin contre sa poitrine. Un doux gémissement. Elle se cambra, appuyant ses fesses contre mon bas ventre, m'infligeant une voluptueuse et crépitante décharge. Elle sortit de ses rêves quand elle comprit que ma présence n'avait rien d'onirique. Elle se tourna vers moi, les yeux écarquillés.

"Hele..Helevorn" se reprit-elle en murmurant. "Qu'est ce que.."

Mon pouce se posa sur ses lèvres. Nos regards se mêlèrent de longues secondes en silence. Magnétique. Elle semblait incapable de détacher ses yeux des miens. J'esquissais un sourire, glissant ma main sur sa nuque avant de lui donner un langoureux baiser. Elle l'accepta d'abord simplement, puis peu à peu, la chaleur de nos corps se mêlant, elle me le rendit avec une légère retenue. Hypnotique. Ses doigts se hasardèrent dans mes cheveux d'argent. Lentement, mon corps musculeux se posa sur le siens. Son cœur battait la chamade. Ma bouche explora la ligne de ses épaules, les courbes de sa poitrine.

Sa respiration saccadée m'incita à poursuivre mon office, elle prenait plus d'assurance. Ma bouche remonta jusqu'à la sienne pour un fougueux baiser avant de la posséder. Elle agrippa mes omoplates, enfonça ses ongles dans mon dos en se cambrant, la tête en arrière, la bouche à demi ouverte. Elle retint sa respiration un instant, puis expira dans un souffle mêlé de douleur et de volupté. Son visage se décrispa peu à peu à mesure de nos mouvements.

Rapidement, le plaisir m'emporta avec elle au-delà de l'entendement, si bien que j'en oubliais ma discrétion et la sienne. Lorsque je m'en aperçus il était déjà trop tard, un bruit de porte provenant du couloir me rappela à la réalité. Je posais précipitamment ma main sur la bouche d'Aunrae quand Belarbreena fit irruption dans la chambre...

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Les yeux de la Maîtresse forgeronne s'écarquillèrent. Sa bouche s'entre-ouvrit sans qu'aucun mot ne puisse en sortir, sa gorge s'était serrée de stupeur.

Mon regard plein de surprise s'imprégna dans le sien comme pour chercher ce qui allait survenir. J'étais paralysé par son irruption, ma main couvrant encore la bouche d'Aunrae qui regardait sa mère avec une honte grandissante sans pouvoir faire le moindre geste.

Des pas précipités se rapprochèrent venant du couloir. La tête de Nadal apparut au dessus de l'épaule de Belarbreena. A moitié endormi, sortit de son lit par le bruit, il avait traîné sa curiosité jusqu'ici sans se douter une seconde de ce qu'il verrait. Un simple regard suffit à lui mettre les idées au clair, son visage se déforma de colère.

"IBLITH (1) ! Lâch..."

La Maîtresse lui ferma violemment la porte au nez enclenchant le verrou et se tourna vers moi en me pointant du doigt.

"Helevorn, lâche immédiatement ma fille !" sur un ton menaçant.

Je libérais la bouche d'Aunrae puis me reculais de son corps, tirant le drap pour la couvrir, les yeux baissés. Je savais à cet instant que j'avais échoué. Une sombre résignation s'empara de moi.

"Mère, il n'y est pour rien, c'est moi qui lui ai demandé de venir !" lança sa fille en remontant le drap sur sa poitrine.

Mon cœur s'arrêta de battre. Elle était en train d'endosser la responsabilité de mon acte. Sa mère bouillonnait de colère, ne sachant pas sur qui déverser son fiel en premier. On frappa plusieurs fois brutalement à la porte.

"Laissez-moi entrer ! Laissez-moi le châtier Belarbreena !" vociféra Nadal.

Sans prendre la peine d'ouvrir la porte.

"Va te coucher Nadal, occupe-toi de ce qui te regarde ou tu auras à faire à moi !"

"Quoi ?! C'est moi que vous menacez, c'est le monde à l'envers !!" s'écria-t-il.

"Ne m'oblige pas a me répéter."

Après avoir pesté et donné un brutal coup de pieds dans la porte, le c'rintri s'éclipsa. La Maîtresse se retourna vers nous.

"Mère..."

Elle décocha une violente gifle à sa fille. Mon sang ne fit qu'un tour, une étrange pulsion m'envahit, m'incitant à affronter le regard de Belarbreena.

CLAAAAK

Mon visage dévia légèrement. Je la regardais droit dans les yeux, silencieux et nu, à genoux sur le lit, les paumes ouvertes, tournées vers elle. Une flamme étrange brûlait au fond de moi, au fond de mon regard, crépitant d'une lumière émeraude inconnue. Les yeux, miroir de l'âme...Elle cherchait à comprendre ce qui m'habitait sans comprendre ce qu'il se passait, et moi, j'agissais sans rien laisser paraître, avec cette puissance qui prenait le pas sur mes peurs et sur tout le reste, je me sentais autre, et cette sensation de pouvoir était à la fois incroyable et profondément grisante...

Belarbreena regarda sa fille dont le visage s'inondait de chaudes larmes.

"Ne le renvois pas...ne le renvois pas..." supplia-t-elle...

Elle secoua lentement la tête.

"Je ne comprend pas Helevorn !"

"Je n'ai jamais cherché à vous causer du tort Maîtresse, j'ai toujours tout fait pour que vous soyez fière de moi, satisfaite de mon travail à la forge. Aujourd'hui, je n'ai d'autre explication à vous donner pour justifier cela qu'une naturelle et évidente attirance pour votre fille..."

"La position dans laquelle je t'ai surpris était sans équivoque, ne te moque pas de moi !" coupa-t-elle "Tu la contraignais, et cette sotte préfère te couvrir plutôt que de te savoir repartit avec Xyltin !"

"Mère !" s'insurgea sa fille en s'asseyant sur le lit. "Comment oses-tu présumer d'une telle chose ! Jamais il ne ferait ça ! Tu le sais ! Et jamais je ne laisserais un mâle abuser de moi sans réagir ! Comment peux-tu imaginer le contraire ?"

La Maîtresse serra les mâchoires, se perdant dans ses réflexions et dans cette situation des plus inattendue avant de se laisser a nouveau capter par mon regard de longues secondes.

"Si c'est ton choix de t'unir avec Helevorn, grand bien te fasse Aunrae, mais si d'une manière ou d'une autre votre relation entraîne des problèmes au sein de la forge, dans ton travail avec Nadal, ne compte surtout pas sur moi pour le supporter ! Tu te débrouilleras avec lui, c'est clair ?"

"Oui Mère, ne vous inquiétez pas. J'irais lui parler."

Belarbreena expira profondément, nous observant tous deux avec le regard de ceux qui avertissent avant de quitter la chambre. Aunrae, enroulée dans le drap, se précipita sur la porte pour la fermer à clé puis se tourna, y appuyant son dos, la tête calée en arrière. Un long soupir s'échappa de ses lèvres. Quelques instants après, dans le couloir, une porte s'ouvrit, des pas se rapprochèrent. La poignée s'actionna à nouveau dans un grincement.

"Aunrae..."

C'était Nadal. Sans doute devait-il croire qu'elle était seule.

"Aunrae c'est moi, ouvre-moi !"

Je m'asseyais sur le bord du lit, regardant la jeune drow avec un très léger sourire.

"Aunrae, ouvre-moi ou je défonce la porte !"

"Laisse-moi s'il te plait, j'ai besoin d'être seule."

"Aunrae !" s'impatienta-t-il. "Laisse-moi te voir, juste une minute. Je veux m'assurer que tu vas bien ! Après j'irais trouver ce chien d'esclave et je lui ferais payer ce qu'il t'a fait !"

Elle poussa un soupir gêné.

"Nadal, je vais bien je t'assure. J'ai besoin de repos et de calme, on parlera demain si tu veux..."

Silence.

"Comme tu voudras..."

Elle attendit un petit instant, soulagée, avant de me rejoindre sur le lit...

BOOM

Aunrae sursauta.

"Mais Nadal arrête ! Tu es fou ! Tu veux faire redescendre ma mère ?!"

"OUVRE-MOI !"

Je fronçais les sourcils. Sans dire un mot je m'approchais de la porte et fis tourner la clé dans la serrure. Un tour. La jeune elfe posa précipitamment ses mains sur la mienne en me regardant, affolée.

"Helevorn, qu'est ce que tu fais ?" me demanda-t-elle tout bas.

Je lui fis un sourire. Deux tour.

"Je savais que tu ouvrirais !" se réjouit Nadal.

J'ouvris la porte. J'étais alors complètement nu, Aunrae vêtue simplement du drap juste derrière moi, agrippée à mon bras. Le c'rintri eu un mouvement de recul.

"Retourne d'où tu viens." fis-je sur un ton glacial.

La surprise laissa place à la haine. Il s'apprêta à se jeter sur moi quand Aunrae s'interposa en le repoussant en arrière.

"Nadal !"

Il recula, abasourdi, la regardant, me regardant, la regardant à nouveau. Son visage se décomposa à mesure qu'il prenait conscience de la situation.

"Retourne te coucher s'il te plait...on discutera demain..." fit-elle sur un ton des plus doux.

"NON ! Ça va j'ai bien compris ! Tu t'offres à ce moins que rien, à cette raclure d'esclave !"

Un rictus de dégoût marqua son visage.

"Tu me donne envie de vomir. ! lança-t-il en la dévisageant de haut en bas.

Il se tourna vers moi.

"Quant à toi..." pointant un doigt menaçant dans ma direction. Il laissa sa phrase en suspend, reculant dans le couloir en me poignardant des yeux..

Il finit par tourner les talons et quitter la forge...

Contre toute attente, mon plan avait fini par fonctionner...j'avais peine à y croire tant les évènements auraient pu se retourner lourdement contre moi, et pourtant...

Mon pouvoir semblait offrir chaque jour de nouvelles surprises. Cette nuit un pallier de taille venait d'être franchi. En retournant dans le lit en compagnie d'Aunrae pour terminer ce que nous avions commencé, une lueur scintillante passa au fond de mon regard, phosphorescente, comme un clin d'œil à Ztefano...

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(1) Merdeux !

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VIII

Matin du premier jour

A la forge, Belarbreena s'étonna de la disparition de Nadal et nous demanda des comptes. Aunrae lui exposa les évènements de la nuit passée. Aussi surprenant que cela puisse paraître, sa mère n'eût aucune réaction, là où nous nous attendions à essuyer une tempête. L'annonce de sa désertion n'eût pas l'air de la tourmenter le moins du monde.

Rassurés, le travail de la journée fût abattu tambour battant, dans une ambiance relativement détendue.

Matin du second jour.

Je me réveillais après une nuit agitée, bien loin du semblant de quiétude qui m'habitait la veille. Aunrae s'en aperçu sans que je ne lui révèle le fond de ma pensée. Dans la matinée, Belarbreena me convoqua dans son office pour me faire part de ses inquiétudes concernant les derniers évènements. Son avertissement me plongea dans une profonde anxiété.

Matin du troisième jour...

Je fermais le coffre. Contractant tous mes muscles pour le soulever, je l'emmenais ensuite dans la remise en retenant mon souffle. Le fond du coffre tombant de quelques millimètres fit voleter un petit nuage de poussière.

"Belarbreena !" lança soudain quelqu'un de l'extérieure. "Où est-il ?"

Je m'immobilisais, le regard fixe. De là où j'étais, je ne pouvais pas voir ce qu'il se passait. Des voix se mêlèrent, connues mais sans réussir à mettre des noms immédiatement, quand je cru reconnaître le timbre du père de Nadal. Mon rythme cardiaque s'accéléra.

Je m'approchais discrètement de l'embrasure de la porte pour jeter un œil, et la scène qui se dévoila devant moi me glaça le sang.

Belarbreena et Aunrae face à Nadal et son père, entourés d' Elvraema, matrone de la grande Maison, de ses conseillés, et un peu à l'écart, deux Yochlol et Xyltin...

« Allez le chercher immédiatement ! » mugit cette dernière.

Tel des molosses lâchés, les Yochlol se précipitèrent dans la forge pour me trouver sous le regard mauvais de mon bourreau. J'étais perdu... Je fermais les paupières avec résignation, et avançais tête baissée dans l'atelier jusqu'à ce qu'elles s'emparent de moi pour me ferrer.

Une des femelles me poussa brutalement jusqu'à l'Ilharess (1).

« Tu as trahis notre confiance. Cela m'apprendra à donner une chance aux chiens de ton espèce, n'est ce pas Belarbreena ? »

"Oui, malla (2) Ilharess."répondit-elle, soumise.

"Nous vous avions prévenu. Cette ignominie a été réduite en esclavage sous la haute volonté de Lloth, notre déesse à tous. Le viol coule dans ses veines comme dans celles de son père..."

A ces mots je serrais les mâchoires, grondant d'une sourde colère, les yeux rivés au sol. Je sentais le sourire vengeur de Nadal me pourfendre, se délectant du spectacle en silence.

"C'est faux... "se risqua Aunrae, abattue.

"Regardez !" fit Xyltin en la montrant du doigt. "Il l'a soumise à sa volonté. La folle, elle délire !" se retournant vers moi. "Bandez-lui les yeux !"

On noua solidement un morceaux de tissus devant mes yeux. Belarbreena éloigna sa fille, de crainte qu'elle ne se créé plus de problèmes.

"J'ai commis une impardonnable erreur de jugement," fit-elle. "Veuillez m'excuser. Nadal réintégrera sa place comme prévu..."

"Heureusement que Nadal a vu clair dans son jeu !", reprocha Elvraema.

"Que comptez-vous faire de lui ?" demanda la maîtresse forgeronne à Xyltin.

"Il croupira dans les geôles de la haute maison Aleanrahel(3) jusqu'à ce que Lloth décide de son sort. Vel'uss zhaun alur taga lil quarval-sharess ?"(4)

Je sentis le regard de la maîtresse forgeronne se poser sur moi, impuissante.

"LLOTH TLU MALLA, JAL ULTRINNAN ZHAH XUNDUS.(5)" glorifia Xyltin, reprit par chacun des présents, Belarbreena en dernier avant de s'éloigner...

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(1) matrone

(2) honorée

(3) de cette Haute Maison sont issues la plupart des grandes prêtresses du temple, dont l'actuelle. Cette maison est la plus puissante car la plus proche de Lloth et la plus dévote. Elle contrôle l'une des puissantes guildes de la cité : La griffe Noire. Dans cette noblesse , les mâles n'ont que le droit de vivre et n'ont aucun rang de quelque importance que ce soit.

(4) Qui sait mieux que la déesse ?

(5) Lloth soit louée, toute victoire est sienne.

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Matin du 4 ème jour

Les geôles d'Aleanrahel. Sombres et froides, dans les sous-sols du premier pilier (1) de Che'el.

On me mena au plus profond de la prison, à travers de longs couloirs éclairés par la seule lumière des torches, où quelques paires d'yeux épièrent mon passage à travers leurs barreaux. On me fit entrer dans une salle de torture, on me déshabilla, et on m'ordonna de garder les paupières fermées pendant qu'on me retirait le bandeau. Une pointe d'inquiétude s'enfonça dans ma poitrine.

« Malla Qu'el'faeruk, faite.. »

Une puissante aura s'approcha, posa ses mains sur mes yeux et prononça une formule aux sombres consonances. Immédiatement, une douleur implacable transperça mes yeux les scellant sous l'effet de la magie noire. Je tombais à genoux, le visage réfugié au creux de mes mains.

"Le voilà aveugle. Bonne continuation Irae."

"Lloth kyorl l'Qu'el'faeruk d'Aleanrahel"(2)

Les Yochlol me relevèrent brutalement avant de quitter la pièce accompagnées de la sorcière, me laissant seul avec Xyltin.

Son haleine chaude lécha mon cou.

« Tu es à moi... » susurra-t-elle sur un ton mauvais.

Cette fois-ci, elle s'évertua à me maintenir en vie durant les douze heures de torture qu'elle me fit subir, me donnant de l'eau, faisant des pauses, cessant ses maltraitances juste avant que je ne m'évanouisse...Me tuer n'était pas le propos, je devais vivre pour subir la volonté de Lloth.

Aveugle, la douleur prenait une toute autre dimension. Une nouvelle exploration dans les sphères de la souffrance, toujours repoussant les limites du supportable...Sa punition administrée de main de maîtresse, elle me jeta dans un cachot à l'écart des autres, dans le dernier sous-sol. Niveau le plus froid, le plus isolé de tous, où j'étais le seul et unique captif.

Matin du 13 ème jour

Mon corps se remettait de lui-même, au fil des jours, sans que je parvienne à déterminer avec exactitude le temps passé. J'avais ramassé un cailloux en tâtonnant dans ma cellule, et avait gratté dans un coin le nombre de jours qui m'avait semblé s'être écoulé.

Mes paupières étaient encore douloureuses. Sous la pulpe de mes doigts, je sentais comme des coutures.

Un sanglot de désarroi remonta dans ma gorge, sans que je puisse verser une larme. J'avais échoué. Emprisonné, seul et aveugle, que pouvais-je faire à présent ?..

Matin du 21 ème jour environ

J'essayais tant bien que mal de garder un rythme, mais je perdais la notion du temps. Chaque jour, je murmurais son nom, espérant qu'il me vienne en aide...

"Ztefano......Ztefano.....Ztefano.....Ztefano..."

Un matin...

Un bruit de clés. Un long grincement. Je sursautais, arraché à mon sommeil. L'heure était inhabituelle pour la distribution de nourriture...si on pouvait la nommer ainsi.

Mon cœur s'emballa. Je me reculais sur la paillasse, rassemblant mes jambes contre mon buste, la tête rentrée dans mes épaules.

J'étais seul au dernier sous-sol, on venait forcément pour moi. Ce changement dans le rythme que j'avais pris me perturba au plus au point.

Des pas, deux personnes. Je reconnu la marche de la gardienne habituelle, accompagné d'une démarche plus familière.

Ma gorge se serra. On déloqua la porte de ma cellule dans un lourd bruit de clés.

« Malla Jabbress. » fit la gardienne avec respect avant de s'éloigner.

Xyltin était de retour...

Elle ferma la porte derrière elle. Mon corps se crispa.

« Tu ne me salue pas, esclave ? Quel cruel manque d'éducation...La Qu'el'faeruk t'a scellé les paupières, elle ne t'a pas scellé les lèvres... »

Quelque chose glissa lestement au sol.

« Lève-toi. » ordonna-t-elle.

Je m'exécutais lentement, les muscles bandés, près à recevoir une nouvelle rossée. L'objet au sol se glissa dans la poussière avant de fendre l'air.

CLACK

Un fouet. Il cingla le vide a quelques centimètres de ma tête, je ne pus réprimer un soubresaut qui la plongea dans l'hilarité. Son rire résonna machiavéliquement dans le couloir...

Un autre matin...

Mon sang avait coloré la poussière de la cellule. Je dépérissais, quitté peu à peu par l'espoir, par mes forces...Ztefano n'avait répondu à aucun de mes appels, j'étais seul avec moi-même, et je pensais le rester jusqu'à ce que la Déesse araignée en décide autrement, par la mort sans doute, où je rejoindrais les démons de l'Enfer...

Le cliquetis familier de la porte blindée retentit dans le couloir. Comme à chaque fois, mon sang se glaça. Mon ouïe, comme mes autre sens, surdéveloppés pour palier ma cécité reconnu le pas de la gardienne accompagné d'une démarche inconnue et d'un bruit de chaînes. Mon étonnement laissa place à une profonde concentration. M'étant rapproché de la grille, j'inspirais profondément l'air à travers les barreaux, expirant lentement par la bouche, captant avec précision chaque odeur.

Je sentais l'odeur d'un mâle, son pas était lourd et imprécis, il transpirait, mélangé sur sa peau la sueur et le sang, il sortait tout juste de la salle de torture.

Ils arrivèrent à ma hauteur, je reculais de quelques pas.

« Voilà de la compagnie. » me lança la femelle avant de déverrouiller une cellule en face et d'y pousser le mâle.

J'attendis qu'elle referme la grille et qu'elle quitte le couloir pour me réavancer. Aucun bruit autre que la respiration faible mais régulière du prisonnier, évanouit...

Le matin suivant...

La gardienne apporta l'auge de nourriture, réveillant d'un coup de pieds le prisonnier pour vérifier qu'il n'était pas mort.

« Mange ! »

Le prisonnier bougea dans une plainte. Elle verrouilla sa grille puis ouvrit la mienne, cognant la gamelle contre mon ventre pour que je la saisisse avant de tourner les talons.

La ration journalière était insipide et pâteuse, impossible de déterminer quels ingrédients la composait, néanmoins elle remplissait l'estomac et n'était pas pire que ce que j'avais dû manger depuis le début de ma vie, je m'en accommodais donc sans grand problème, ce qui ne fût pas le cas de mon acolyte qui vomit à la première bouchée...Son organisme encore traumatisé par ce qu'il avait subit la veille ne supporta pas.

« Bois.» lui lançais-je. « Il y a de l'eau dans la carafe en terre cuite ».

Il obéit comme un désespéré, prenant mon simple mot comme un conseil salvateur. Une fois sa soif étanchée, il prit un moment pour se calmer puis se traîna jusqu'aux barreaux.

« Qui es-tu ? » faiblement.

« Je suis un esclave. »

« Nous le somme tous... » souffla-t-il.

Je gardais le silence.

« Tes yeux...qu'as-tu fais pour subir un tel sortilège ? »

Je passais mes doigts sur ma barbe sans rien dire.

« Ça ne peut venir que de la main de Dhaunae Rhomduil...ou d'une autre Qu'el'faeruk... »

Silence. Il s'assit contre la grille.

« Les esclaves qui fautent sont torturés et jetés en prison... »

« Et toi, quel crime as-tu commis pour te retrouver au niveau inférieur ? » coupais-je.

« ...je ne jouerais pas les cachotiers si tu ne les joue pas toi-même, qui sait, je pourrais peut être te rendre service... »

Je fronçais les sourcils.

« Je ne vois pas comment.»

« On m'a jeté ici pour vol...dumoins c'est le motif qui leur a servit. Elles sont bien loin de s'imaginer de quoi je suis capable....» lança-t-il d'un ton narquois. « Je me présente, Rizzen Jhalavar, serviteur particulier d'Dhaunae Rhomduil, adorateur secret de Vhaerun (3).» finit-il dans un murmure. « Et toi, qui es-tu ? »

« Je n'ai pas de nom. »

Un bref silence s'installa.

« Très bien. Si tu refuses de me parler, nous n'avons plus rien à nous dire. »

« Je n'ai vraiment pas de nom... »

Il ne répondit rien. Je craignais trop que sa présence soit une tentative de sa maîtresse de me faire révéler des choses, je me murais donc dans le mutisme...

Bien des matins plus tard...

Le son métallique des clés devait une habitude. La gardienne apportait le déjeuner en avance.

«Tu vas avoir de la visite. » fit-elle simplement.

Mon cœur se serra.

« De la visite ? » lança Rizzen une fois la gardienne partie.

Il ne m'avait plus adressé la parole depuis la dernière fois.

« Il n'y a jamais de visite dans les gêoles d'Aleanrahel. »

Je savais qui viendrait. Je ne réussis pas à manger et attendit, le front contre le mur froid dos à la grille, que mon bourreau fasse son apparition. Elle ne se fit pas trop attendre. Mon acolyte s'était réfugié dans un coin de sa cellule et gardait le silence, se faisant oublier, par peur qu'elle vienne le torturer ensuite.

La correction de Xyltin fût prodiguée rapidement. Une dizaine de coups de fouet, elle était rassasiée. De longues rayures ensanglantées rayaient mon dos. Mes jambes plièrent, je me retrouvais a genoux, le corps tremblant de souffrance, mes mains agrippées au mur. Elle s'approcha de mon oreille.

« A très bientôt, violeur assassin... » susurra-t-elle.

Elle partit, sans prendre attention à Rizzen. Une fois la porte du couloir refermée, ce-dernier se jeta sur les barreaux.

« Violeur assassin ? »

Je ne répondis rien, tentant par tous les moyens de rester conscient, me concentrant sur mon rythme cardiaque, faisant mon possible pour faire abstraction de la douleur.

« Depuis combien de temps es-tu ici ? »

Je m'allongeais sur le ventre en serrant les mâchoires. Sa question tournoya dans mon esprit, me donnant le vertige avant de sombrer...

Un peu plus tard...

Je me tournais légèrement sur le côté. Rizzen m'entendit bouger.

« Tu es vivant ?... Hey !... Par Vhaerun, si tu es bien ce qu'elle dit, tu as toute mon admiration ! »

Je poussais un soupir fébrile.

« Tu es vivant, je t'entends ! »

Je sombrais à nouveau...

Plusieurs heures ensuite...

La douleur était toujours présente mais s'estompait sensiblement. Ma capacité de régénération m'impressionnait toujours. Je m'approchais de la grille.

« Rizzen. »

« Hein ? Oh ! »

il se précipita sur les barreaux. « Tu es réveillé ! Qui était cette femelle ? »

« Irae Xyltin... »

« Irae Xyltin... »

répéta-t-il pensif. « J'ai beaucoup réfléchis pendant ton sommeil, si tu veux de mon aide, tu devras répondre à mes question. »

« Comment pourrais-tu m'aider ? » demandais-je en secouant la tête, fataliste.

« Très bien.. »fit-il dans un sourire. « Je vois en toi un âpre négociateur...Je vais répondre à ta question, et je pense que ma réponse éveillera suffisamment ton intérêt. »

« Je t'écoute. »

« Vois-tu, comme je te l'ai dis il y a quelques temps, je suis le serviteur particulier d'Dhaunae Rhomduil. Dumoins je l'étais... Je la sers docilement depuis mon plus jeune âge, et de ce fait, j'ai eu accès pendant des années à ses grimoires, je l'ai vue expérimenter des sortilèges, je me suis formé à la magie noire à son insu. Les femelles nous pensent trop stupides pour apprendre, elle n'a donc jamais eu aucun soupçon. J'ai fais l'erreur de vouloir reproduire un poison, j'ai donc dû prendre les ingrédients nécessaires dans son coffre d'alchimie et elle s'en est aperçu. On m'a fait châtier pour vol. Les ingrédients que j'ai subtilisés sont rares, on a donc pensé que je comptais les revendre a bon prix au marché noir.»

« Et tu penses pouvoir me faire échapper ?» sur un ton dubitatif.

Il laissa échapper un petit rire.

« Rien n'arrive par hasard...Mais à moi de poser les questions à présent. J'ai souvenir de quelques évènements importants, mais j'ai besoin de réponses pour être sûr.»

Ne détectant dans sa voix aucune trace de mensonge, je décidais de collaborer.

« Je répondrais à tes questions. »

« Parfait...Alors qui es-tu ? »

« Je suis le fils du plus grand Qu'el'saruk et Qu'el'faeruk de Che'el, issu du quatrième pilier(4), exilé par Lloth dans les profondeurs. »

Silence.

« ...Tu es le fils de Jeggred Dhuunyl ? »

« Oui. »

Il eut l'air embarrassé.

« Je suis navré de te l'apprendre, mais il a été exécuté sous la volonté de la Déesse araignée il y a une vingtaine d'années... »

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(1) Haute Maison Aleanrahel

(2) Lloth garde la sorcière d'Aleanrahel

(3) Dieu mineur rival passif de Lloth, cherchant la chute du matriarcat, dieu des voleurs et du mal à la surface.

(4) Haute Maison Helviiryn, la plus influente de toute, la plus secrète, la plus vile et la plus compromise dans tous les complots. Son pouvoir lui viendrait paraît il de son rang de favorite auprès de Lloth pour être sa maison intriguante. Que de luttes avec la Haute Maison Aleanrahel.

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Une chape de plomb s'écrasa sur ma tête.

« Qu'est ce que tu racontes... »

« Eh bien...Cette histoire a fait grand bruit, et à assit la puissance et la cruauté de Lloth sur le peuple Drow, et plus particulièrement sur les mâles chose que n'accepte plus Vhaerun. Après le viol qu'il a commit sur l'Ulathtallar, la Déesse l'a fait torturer puis exécuter malgré qu'il n'ai cessé de clamer son innocence. »

« Il n'y a pas eu de viol, mes parents s'aimaient ! Et mon père n'est pas mort ! » lançais-je avec emportement.

« Ecoute, je ne veux pas rentrer dans un débat stérile si tu es persuadé du contraire, mais sache que la version officielle dis que Jeggred Dhuunyl à violé l'Archi Prêtresse d'Aleanrahel. Pour ce qui est de sa mort, je l'ai vu rendre son dernier souffle de mes propres yeux, et je suis loin d'être le seul témoin. Son exécution a été publique. »

La tête me tourna tant que je dû m'accrocher aux barreaux pour ne pas tomber. Qu'est ce que ça voulait dire ? Ztefano m'aurait-il mentit ? Pourquoi ? Dans quel but ? Tout s'embrouillait dans mon esprit.

« Si tu es bel et bien son fils, tu dois avoir un millier de raisons de vouloir la mort de Lloth, je crois me souvenir qu'elle à contraint l'Ulathtallar à mettre au monde l'enfant issu du viol pour l'asservir, et tout à été fait par la suite pour faire de sa vie un cauchemars. »

Je couvrais ma tête de mes mains, m'accroupissant, comme si chacune de ses paroles étaient un nouveau coup.

« ...on m'a dit que mon père était encore vivant... exilé dans les profondeurs...on m'a dit qu'en terrassant Lloth je pourrais le sauver...je ne comprends pas. » perdu.

« Qui t'as dis ça ? Si c'est un ennemi de Lloth, un fidèle de Vhaerun comme je le suis, il se peut qu'il t'ai dis ceci pour t'inciter à affronter la Déesse. La filouterie et le mensonge sont des armes dont nous usons pour parvenir à nos fins. »

« Je ne sais pas...je ne sais pas... »

« Écoute, peu importe que ton père soit mort ou non. Tu mérites une vengeance. Si tu ne peut pas le sauver, tu honoreras sa mémoire. Tu ne peux rester sans agir avec un tel fardeau sur les épaules. Tu ne peux rester moisir dans ce cachot...et moi non plus. »

Un long soupir s'échoua sur mes lèvres.

« Xyltin, elle t'a traité d'assassin et de violeur, qu'as-tu fais ? »

« ...Assassin parce que...ma mère est morte en couche...Violeur parce que...j'ai séduis une femelle...»

« Sais-tu pourquoi on t'as rendu aveugle ? »

« ...Oui. Parce que les femelles craignent que la puissance psychique héritée de mon père les soumette à ma volonté en un regard... »

« Évidemment...Mais as-tu réellement ce pouvoir ? »

« Il semblerait... »

« Parfait ! Écoute, je peux t'aider. Le sortilège qui t'a cousu les paupières, je sais le contrer. C'est un maléfice puissant maîtrisé par les sorciers expérimentés, je ne te garantis pas de réussir à l'annihiler, en revanche, avec un peu d'entraînement je pourrais le suspendre un certain laps de temps. »

« A quoi ça pourrait bien me servir ?...regarde où nous sommes. »

« Tu pourrais le tenter sur la gardienne. »

Je secouais la tête par la négative.

« Et après ? Il faut gravir deux étages avant d'atteindre le rez de chaussée de la Haute Maison, et ensuite...les prêtresses et les disciples dévouées à Lloth sont partout. »

« Je t'apprendrais un sort d'invisibilité. Il ne dure pas très longtemps mais il nous permettra de prendre la poudre d'escampette. »

« Et ensuite ? »

« Ensuite, je t'accompagnerais jusqu'au sanctuaire de Lloth, et si tes pouvoirs sont bien réels, je lèverais à nouveau le sortilège pour que tu puisses soumettre la Déesse d'un simple regard...et là... » s'emporta-t-il, transporté par un espoir insensé. « Vhaerun pourra l'évincer et prendre sa place. Pour nous remercier, il nous couvrira d'or et de pouvoir, et nous fera gagner la surface. »

« Rizzen... »disais-je sur un ton visant à lui visser les pieds sur terre. « Tu divagues. Si j'ai un semblant de pouvoir, il n'est rien comparé à celui qu'avait mon père. »

Il soupira.

« Tu es notre seule chance. Fais-le pour toi, pour ton défunt père, pour moi, et pour tous les mâles du peuple drow. Si nous réussissons, tu n'imagine même pas comment pourrait changer notre existence à tous. La chute du matriarcat et l'avènement du patriarcat, pour leur rendre la monnaie de leur pièce ! »

Silence.

« Allé bon sang ! Tu ne vas pas nous laisser crever ici ! Et Xyltin ? Tu ne voudrais pas te venger d'elle aussi ? Lui faire payer ? »

« ...Si. »

« Alors ! Et rends-toi compte, si tu arrives à soumettre cette femelle et que Lloth l'apprend, nous n'aurons même pas besoin de nous rendre jusqu'au sanctuaire, je suis persuadé qu'elle ordonnera à ses sbires de te livrer à elle pour t'exécuter en personne, comme elle l'a fait avec ton père ! Xyltin fait partie de ses affidées favorite. »

Son enthousiasme me déconcerta.

« Très bien...Mais si je le fais, dis toi bien que c'est pour moi, et mon père. Que ton Dieu prenne le pouvoir ensuite, je n'en n'ai que faire. »

« Comme tu voudras... »

Il fit une pause.

« Si tu veux commencer par te venger de Xyltin, tu dois me dire combien de temps il me reste avant qu'elle revienne. J'imagine, qu'elle vient souvent te rendre visite. »

« Je ne saurais te répondre avec précision...j'ai perdu la notion du temps il y a des semaines...mais je dirais... » réfléchissant « tous les trente à quarante jours... »

« Ça me laisse suffisamment de temps devant moi si elle décide de ne pas venir avant. »

Rizzen s'employa alors à lever le sortilège de sa maîtresse. Travaillant sans relâche.

20 jours plus tard..

Pour la première fois, mon acolyte réussit à lever la malédiction quelques minutes. Mes paupières se refermèrent dans un douloureux déchirement, plus intense que la première fois. Un râle s'échappa de ma bouche.

« Ça fait mal ! »

« Normal. »

«C'est pire que la première fois. »

« Aïe... »

« Quoi Aïe»

« C'est plutôt mauvais signe, et je ne l'avais pas prévu... Son sortilège est plus puissant que je ne le pensais. Il résiste. Tu risques de souffrir chaque fois un peu plus si je ne parviens pas à le briser... »

« Tu m'as dis que tu n'y parviendrais pas. »

« Effectivement... »

« ... »

« Je ne peux pas évaluer le degrés de douleur que tu ressentiras à chaque fois, tout ce que je peux te dire, c'est qu'il sera plus grand que le précédent... Mais si ça peut te rassurer, sache que la brûlure que tu ressens est une brûlure magique qui ne te laissera aucune marque corporelle une fois la malédiction levée.»

« Merci, je suis rassuré... » rétorquais-je ironiquement.

« Désolé, je ne peux pas faire mieux. »

« Dans ce cas, nous allons arrêter les tests. Tu seras prêts le moment venu. »

« J'ai réussi à le tenir à peine 5 minutes ! »se défendit-il.

« Oui...et je n'ai quasiment rien vu, mais tu feras mieux la prochaine fois. »

« Que tu ne vois rien, c'est tout à fait logique. Tes yeux sont habitués à l'obscurité depuis des mois, j'espère que le fait de ne pas distinguer clairement ce qui t'entoure ne t'handicapera pas, nous n'aurons qu'une seule chance. »

« Avec un sort de restauration, ça pourrait peut être passer. »

« Un sort de restauration ? Tu m'en demandes beaucoup. »

« Et toi ? Renverser Lloth, tu crois que ce n'est pas m'en demander beaucoup ? »

Il grommela vaguement quelque chose avant de se remettre au travail.

11 jours plus tard...(version non censurée accessible sur le forum des constellations, sous réserve d'âge)

Irae Xyltin était au rendez-vous. Rizzen se terra dans un coin de sa cellule comme la première fois. Mon rythme cardiaque s'accéléra.

J'entendais son fouet osciller, tapant lentement contre sa cuisse au rythme de ses pas.

Je me plaçais dos au mur, droit, le visage tourné vers la grille. Elle ouvrit la porte et glissa le trousseau de clé dans sa ceinture. La femelle avança d'un pas, déroulant sur le sol son fidèle instrument de torture.

Elle le fit claquer une fois dans l'air.

Mes paupières étaient toujours scellées. Je me demandais ce que Rizzen attendait.

« Tu préfères que je te fouette le torse aujourd'hui ? Hmm... ? »

Je me retournais face au mur, espérant que ça ne rende pas la tâche plus difficile a mon acolyte.

CLACK

Mon dos se tordit.

Rizzen...pensais-je en serrant les dents.

CLACK

Je réprimais un cris de douleur.

CLACK

A cet instant, une fraîcheur magique s'insinua entre mes paupières, les libérant du sortilège.

CLACK

Je fis un pas en arrière, en direction de mon bourreau. Surprise, elle m'intima de reprendre ma place, ce que je ne fis pas. Rageuse face à ma désobéissance, elle s'approcha de moi pour me repousser en avant. Dés que sa paume entra en contact avec ma peau, je fis volte face et lui tordit le poignet, cherchant dans les formes imprécises qui m'entouraient à capter ses yeux. Une haine immense hurlait dans mes entrailles, je la tenais. Forçant sur mon regard pour la voir, une lueur émeraude s'injecta dans mes orbites, m'offrant la vue de son visage stupéfait.

Je captais ses prunelles, la faisant s'agenouiller à la force de mon bras. Le fouet tomba au sol. Sa bouche esquissait des mots qui ne sortaient pas.

« Tu vas payer ! » tonnais-je.

Une force surnaturelle reprit possession de moi, galvanisé par le spectacle. Xyltin à mes pieds. Un rictus démoniaque marqua mon visage.

J'approchais ma figure de la sienne.

« Elg'caress... »(1)

D'un mouvement leste de la main je la giflais, la projetant violemment au sol. Totalement hypnotisée par mon regard, elle ne se défendit pas.

Je m'emparais de sa dague accrochée à sa cuisse, glissant sa lame le long de ses vêtements de cuir, finissant par les déchirer, impatient de ce qui allait suivre.

Tel une bête assoiffée de chair, j'empoignais sa chevelure, l'asservissant à mes désirs.

D'un mouvement brutal, je la retournais, la projetant visage contre les barreaux sous le regard hébété de Rizzen qui s'affairait tant bien que mal à maintenir le contre-sort actif.

Mon bourreau soumise, je prenais possession de son corps, couvrant ses plaintes une main sur sa bouche.

Le sorcier clandestin me fit bientôt signe qu'il était au bout de ses forces magiques.

A l'instant même où j'exultais, une douleur infâme me lacéra les yeux. Je reculais en titubant, râlant de douleur.

Sans que je vois ce qu'il se passe, j'entendis la porte de ma cellule se refermer et Xyltin s'enfuir en courant.

« Hey ! Hey oh ! Heeeey ! »

Je rejoignis la grille lentement, m'y appuyant de tout mon poids, encore sonné.

« 10 minutes ! Tu as vu ça ! Le double de la première fois ! »

« Oui, je sais... » à bout de souffle.

Tournant mon visage vers le fond du couloir.

« Où est-elle partie ? »

« Elle a détalé ! A cette heure-ci elle ne croisera presque personne dans la Haute Maison, mais ne t'inquiète pas, je pense que tu auras bientôt des nouvelles de Lloth. » lança-t-il dans un sourire carnassier.

Recouvrant mon calme, je me rendais compte de ce qu'il venait de se passer avec une certaine horreur.

« Par tous les démons de l'Enfer, je n'en croyais pas mes yeux ! Tes pouvoirs sont bien réels, elle n'a rien put faire ! Vhaerun tlu malla (2)! Tu vas nous sauver ! Lloth va tomber ! Si tu arrives à ça avec la Déesse Araignée, par Vhaerun, elle sera tellement honteuse qu'elle en mourra !»

« Je l'ai abusée... » absent.

« Mais oui ! » fit-il d'une voix chantante. « Le pire des affronts que puisse subir une femelle ! Jamais je n'aurais imaginé que Jeggred Dhunnyl ai eu ce pouvoir...si seulement il s'en était servit de façon plus judicieuse...la Déesse araignée aurait déjà été jetée de son piédestal ! »

Ne me joignant pas à l'engouement de Rizzen, je me recroquevillais dans un coin de ma cellule, atterré par l'ampleur et la nature des pouvoirs qu'on m'avait légué... Xyltin avait payé, et je n'arrivais même pas à m'en réjouir, même après toutes ces années. Elle porterait toujours cette marque sur elle, cette souillure en elle, jusqu'à sa mort. Au final, elle n'était qu'un palier à ce qui allait suivre, Lloth était le prochain et le dernier objectif, après quoi, si je revoyais Ztefano, je lui demanderais de reprendre le don empoisonné qu'il m'avait fait...

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(1) Chienne

(2) Vaerhun soit loué

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La scène me revenait sans cesse en tête.

Je suis un violeur...elles avaient raison...Mon père...s'il l'avait été réellement ?...S'il m'avait transmit cette malédiction...Si l'histoire que m'avait raconté Ztefano était un mensonge ? Si les prêtresses de Lloth avaient raison ? Si Ztefano m'avait utilisé pour ses fins personnels...peut être était il un adorateur de Vhareun comme l'avait supposé Rizzen. Quel pouvoir m'avait-il légué alors ? Avait-il éveillé ce qui dormait au fond de moi à la Maison Rouge ? Etait-ce tout autre chose ?

« Arrête de ressasser wael (1) ! On dirait que tu regrettes ! »

Silence.

« Combien d'années as-tu souffert, combien de tortures as-tu subis ? C'est Xyltin qui a fait de ton existence un enfer, par son sadisme, son fanatisme...Elle n'a eu que ce qu'elle méritait ! Cesse de te tourmenter ! » m'ordonna-t-il.

Silence.

« Si j'étais toi, je serais en paix avec moi-même, et je n'aurais qu'une idée en tête : Lloth, et la manière de la faire tomber.»

« Tu n'est pas moi, Rizzen ! Tu ne peux pas imaginer ce que je ressens...Je suis perdu...On me ment, on me livre une vérité, puis je m'aperçois qu'elle est un mensonge, que dois-je croire ? Qui dois-je croire ? »

« L'alurl abbil zhah dosstan. »(2)

Un soupir.

« D'accord, alors comment aurais-tu voulu te venger d'elle ? »

Secouant lentement la tête.

« Je ne sais pas. »

« En la tuant ? Jamais, crois moi bien, jamais tu n'aurais été rassasié. La mort n'est rien en comparaison de ce qu'elle t'a fait endurer. Si tu le regrettes, tu n'est vraiment qu'un wael. Si j'avais ne serait-ce que la moitié de ta puissance psychique, je dominerai Che'el à la place de Vhaerun ! Tu n'as pas idée des capacités qui te sont offertes. Gâchis !» jeta-t-il.

« Je te les donne. »

Il éclata de rire.

« Si le pouvoir se transmettait aussi facilement, ça se saurait ! Tu t'es déchaîné sur cette femelle pour une bonne raison ! Ta haine était si grande que les choses t'ont échappées, tu as laissé libre court à ta puissance et à ton instinct ! Si tu veux jouer les bons samaritains, à toi d'apprendre a maîtriser cette force ! Maintenant, tu n'as plus le choix. Bientôt, les sbires de Lloth viendront te chercher, la machine est en marche et personne ne pourras l'arrêter, fais face a ton destin...les yeux grands ouverts. »

Le lendemain matin...

Je m'étais résolu à suivre ma voie, je n'avais d'autre choix. J'avais trop avancé pour m'arrêter, et si Ztefano ne m'avait pas totalement mentit, je ressusciterais mon père, j'avais beaucoup de choses à lui dire...

La porte blindée s'ouvrit, laissant place à deux démarches. Celle de la gardienne et une autre que je ne reconnaissais pas. L'odeur qui me venait m'informa suffisamment pour savoir de qui il pouvait s'agir. Un parfum de cuir, un pas rythmé et droit, l'odeur d'une femelle...il devait s'agir d'une Yochlol...ou d'une Jabress.

Elles s'arrêtèrent devant ma cellule.

« Esclave, approche. » me commanda l'étrangère.

J'avançais près des barreaux.

« Irae Xyltin. Est-elle venue ? »

Je hochais la tête.

« Quand ? »

« Hier. »

« T'as t-elle dit quelque chose ? »

« Rien de particulier par rapport à d'habitude. »

Elle souffla brusquement, agacée.

« Malla Jabress, Irae Xyltin venait une fois par mois pour le fouetter. Je doute qu'il puisse nous être utile. »

« Ouvre sa cellule ! »

La gardienne chercha dans son lourd trousseau la clé adéquate et la glissa dans la serrure.

Clik clik

La porte ne s'ouvrit pas.

« Qu'est ce que tu fais, ouvre ! »

« La porte est déjà ouverte... »

Elle la poussa dans un grincement.

« Qu'est ce que ?... »

La Jabress fit irruption dans ma cellule, je reculais contre le mur.

« Tu as laissé la porte ouverte ? » s'énerva-t-elle.

« Non, je l'avais refermée à clé...je ne comprend pas.. »

« Comment se fait-il que ta porte soit ouverte, esclave ? » rugit-elle.

« Malla Jabress » coupa la gardienne « Irae Xyltin est la dernière a être entré ici.»

« Tu oses insinuer qu'elle aurait oublier de refermer à clé ! » tonna-t-elle.

« Je ne sais pas Malla Jabress... » bredouillant.

« Non...c'est lui qui a ouvert sa grille ! »

Elle fouilla frénétiquement ma cellule, cherchant dans la paillasse, retournant la carafe, l'auge, examina les murs...sans rien trouver. Hors d'elle, elle me plaqua contre le mur, me piquant la gorge de la pointe de sa dague.

« Explique moi comment cette grille a put rester ouverte ? » menaçante.

« Je suis aveugle...je ne sais pas malla Jabress.. » prétextais-je.

Elle me lâcha brutalement et sortit dans le couloir.

« Lui ! Que fait ce prisonnier ici ? »

« C'est le serviteur particulier de la Qu'el'faeruk, il a été condamné pour vol.»

« Il n'a rien à faire ici gardienne ! Ce prisonnier doit être isolé ! » en parlant de moi.

« Je sais Malla Jabress, mais les cellules sont pleines aux étages supérieurs... » se justifia-t-elle.

« Ouvre ! »

La femelle fouilla la cellule de Rizzen sans trouver quoi que ce soit.

« Qu'as-tu vu hier ? »

« ...une jabress est arrivée pour fouetter l'autre esclave, une fois terminé, elle est partie...je ne sais rien de plus je vous assure... »

« Elle a fermé la grille ? »

« Elle l'a claquée... »

La femelle grogna.

« Il se peut qu'elle ai des ennemis parmi les esclaves...peut être une vengeance... » se risqua la gardienne.

« Il faut que j'aille sur le site pour procéder a quelques interrogatoires en règle. »

La gardienne referma à double tours les cellules et raccompagna la Jabress. Au fond du couloir, je réussis à capter leurs chuchotements.

« Il faut que je trouve le meurtrier avant d'annoncer sa mort à la Déesse, informe moi immédiatement si tu apprends quoi que ce soit, c'est clair ? » « Très clair Malla Jabress ».

La lourde porte se referma.

« Rizzen... » m'approchant des barreaux.

« Leur réaction me surprend, quelque chose cloche... »

« Xyltin est morte. »

« Quoi ? »

« Je les ai entendues. »

Un rire sardonique s'échappa de sa gorge.

« Wael...elle s'est suicidée, aucun doute ! » fit-il avec aplomb. « La femelle cherche a tout prix un meurtrier mais ton bourreau s'est sui-ci-dé ! Après ce que tu lui a fais subir, c'est certain ! Une fervente de Lloth violée sauvagement par l'esclave le plus haïs de sa Déesse...sa honte était insurmontable...Tu imagines ? Xyltin enceinte de toi ? L'histoire se répète ! » il se perdit dans un fou rire.

Hébété.

« Et s'ils accusent à tort un esclave ?..Jamais je ne serais mené devant Lloth. »

Il arrêta de rire.

« Hum...c'est un risque. Mais il y a de forte chance pour que sa mort te soit imputée. Elles vont mener l'enquête, et crois moi ce sera rapide. Tu as été la dernière personne connue susceptible de la tuer, si elles examinent son corps elles ne passeront pas à côté des traces du viol, la porte de ta cellule était ouverte...tu es le coupable idéal. Elles ne conclurons jamais au suicide, elles préféreront t'accabler de tous les crimes. »

« Et le maléfice qui scelle mes yeux, comment aurais-je put faire quoi que ce soit aveuglé ? »

« Ne cherche pas plus loin, Lloth se contentera largement de leurs explications pour se faire une joie de t'exécuter maintenant que tu représentes trop de risques... »

Je m'asseyais par terre, laissant glisser mon dos le long du mur.

« Il n'y a plus qu'a attendre. »

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(1) Idiot

(2) Le meilleur ami de confiance est vous même (proverbe)

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IX

Quelques jours plus tard, on me sortit de ma cellule pour m'emmener aux étages supérieurs. Là, je reconnu l'aura de la Qu'el'faeruk. Elle s'assura de l'efficacité de son sortilège puis me renvoya au niveau inférieur.

Elles cherchaient à percer le mystère sans y parvenir...

De retour au cachot, j'échafaudais un plan avec Rizzen...

« A moins que je fasse fausse route, la prochaine fois qu'elles viendront te chercher, ce sera pour te livrer a Lloth. La nouvelle se répandra autour des sept piliers comme une trainée de poudre, et je suis sûr que la Déesse voudra conjurer le sort en t'exécutant de la même manière que ton père. Il y aura sans doute du monde, au moins les dirigeantes des Hautes Maisons et leurs Conseillers. Je ne suis allé qu'une fois au Sanctuaire et ce lieu m'a tellement glacé le sang que je n'y retournerais pour rien au monde, mais grâce à ma connaissance des lieux je pourrais te suivre mentalement jusqu'à lui. Ensuite, il te faudra faire vite. Je tenterais de lever le sortilège à distance, mais je n'aurais aucun moyen de savoir quand tu seras face à la Déesse. Il faudra compter sur la chance. Je tiendrais aussi longtemps que je pourrais, mais n'espère pas que je fasse mieux que la première fois, je risque de m'épuiser très rapidement d'autant que je n'ai aucune potion de régénération sous la main. La seule chose que je puisse faire pour accroître mon potentiel magique est de lancer au préalable un sort de fortification, mais ça ne garantira pas notre succès pour autant. »

« Nos chances de succès ne tiennent qu'a un fil... »

« ...oui. »

« Et si tu n'arrives pas à lever le sortilège ? »

Il poussa un soupir.

« Tous nos espoirs seront perdus. Tu mourras dans d'atroces souffrances, je pourrirais dans cette cage jusqu'à la fin de mes jours, et Lloth aura gagné. A choisir, je préférerai être à ta place...»

Je secouais la tête.

« Soit tu réussis, soit tu meurs et je reste ici. Crois moi quand je te dis que je ferais de mon mieux, même plus que ça. »

« Je ne doute pas des efforts que tu feras, mais du résultat. »

« Que Vhaerun nous vienne en aide... »

Quelques jours ensuite..

La lourde porte s'ouvrit au fond du couloir, claquant bruyamment contre le mur. Des pas. Une, deux, trois, quatre femelles. Des Yochlol, et l'odeur de la Jabress.

Rizzen était agité et me souffla un « Bonne chance » a travers les barreaux avant qu'elles ouvrent la porte de ma cellule.

« Capturez-le ! »

Les Yochlol se saisirent de moi, liant mes chevilles et mes poignets à l'aide de pesants fers chaînés.

On me fit gravir les étages jusqu'à l'extérieur, sous la vindicte des fidèles de Lloth que nous croisions « violeur » «meurtrier » « Que Lloth te dévore ! ».

On me fit monter dans une charrette, m'attachant à un mât central. Je reconnu l'odeur des esclaves. Un coup de fouet

dans l'air et les roues craquèrent en avançant. Des cris de femelles haineuses autour de moi. Mes sens étaient exacerbés.

Nous quittions Alaenrahel, empruntant les chemins sinueux de la cité perdue. Nous nous enfoncions peu à peu dans les profondeurs, dans la noirceur de son antre, lieu de tous mes cauchemars. Les chants d'adoration, au départ des murmures, se précisaient en s'intensifiant. Les roues quittèrent la pierre brute pour rouler sur des dalles. Au son organique des driders, mon sang se glaça. Des bruits de pattes, au dessus de ma tête, sur les parois, partout, je vivais cette fois le cauchemars de ma vie. L'odeur de la mort envahissait l'atmosphère. Pourriture infâme des cocons. Pourriture de chair. Nous avancions dans la gueule immonde de la mort.

Une pensée pour Rizzen. J'ignorais s'il me suivait toujours. Une pensée pour mon père. Une pensée pour Ztefano. Les derniers évènements défilaient dans mon esprit à une vitesse vertigineuse. Je repensais à Xyltin, je repensais à l'existence que j'avais vécu et ce qui m'avait poussé jusqu'ici, dans le sanctuaire de Lloth, qui serait le berceau de ma renaissance, ou le plus sombre de mes tombeaux...

La charrette s'arrêta sous la clameur d'une masse invisible. Les Yochlol me détachèrent du mât et me firent descendre. Mes pieds nus ressentirent la matière collante de la toile. Le tambourinement de douzaines de pattes accompagnèrent ma marche, encadré fermement par les Yochlol.

« Impie ! Violeur ! Monstre ! »

La foule était dense, les fidèles de la Déesse s'étaient réunis en nombre pour assister à l'exécution du fils de Jeggred Dhunnyl, violeur de l'Ulathtallar.

On me fit arrêter. Une femelle prit la parole d'une voix forte.

« Peuple Drow, fidèle à Lloth, voyez ce mâle, il est maudit ! Dans son sang coule celui d'un violeur, celui de son père, Jeggred Dhunnyl, profanateur ignoble de celle qui m'a précédé ! Pour ses infamies et pour punir à jamais le lignage de ce mâle, notre Déesse à fait de sa progéniture un esclave au service de Che'el ! » la foule applaudit. « Aujourd'hui, il est accusé du même crime que son père. Il sera sacrifié sur l'autel par Lloth elle-même, pour venger la mémoire de celle qu'il a violé et assassiné, Irae Xyltin ! ULU Z'HIN MAGLUST DAL QU'ELLAR LUETH QUARVAL-SHARESS ZHAH ULU Z'HIN WUND LIL PHALAR !(1) »

La multitude se galvanisa à ses paroles .

« ô grande Déesse Araignée, mère incontestée et toute puissante du peuple Drow, le dobluth (2)est ici. »

Un vagissement horrifique ébranla le sanctuaire. On m'obligea à me prosterner, sur l'exemple de toute l'assemblée. Une aura maléfique s'étala partout, s'enroulant pernicieusement autour de moi.

«Faite le monter sur l'Orlenggin(3).» d'une voix puissante, affutée comme les pattes fourchues des driders.

Les Yochlol me relevèrent. A travers mes paupières closes, je discernais un halo rougeoyant, je la voyais...

« Avance ! » en me poussant en avant.

J'avançais, l'adrénaline circulait dans chaque parcelle de ma peau. Mon pieds buta contre une marche, me faisant tomber sous les moqueries de la foule.

« C'est donc ça, le dobluth ? » Son rire déchira l'atmosphère.

Je me relevais, gravissant les marches l'une après l'autre, prenant mon temps, ressentant au fond de mon corps s'épanouir une puissance considérable, fouettant chacun de mes muscles d'une chaleur infernale. Chaque pas qui me rapprochait de Lloth semblait renforcer mon pouvoir...

Je la regardais à travers ma chair, enflammée par son énergie maléfique.

Mon pied se posa sur la dernière marche.

« Approche... » siffla-t-elle.

C'est le moment Rizzen , pensais-je.

Son aura couvrait tout mon corps, battant contre ma peau au rythme de mon cœur qui s'emballait.

« Allonge-toooiii.. »

Mes mains butèrent contre l'autel, mes doigts glissèrent sur sa surface, ressentant des dizaines d'ossements sous ma peau. Serrant les mâchoires je m'allongeais, le souffle coupé, mêlé à l'odeur innommable de l'endroit.

Rizzen...Rizzen...

La foule se tût. J'entendis le son d'une lame rayer la pierre.

« L' Orvelve(4) Déesse... » chuchota respectueusement l'archi-prêtresse avant de s'éloigner.

Mes muscles se tendirent, je sentis ses pattes d'araignées se planter de par et d'autre de mon corps, faisant trembler l'autel.

« Tu vas souffrir..et Mourir... »

Rizzen n'avait toujours pas levé le sortilège, c'était trop tard. Lloth se dressa au dessus de moi prête à frapper.

« Craindrais-tu encore le pouvoir de mon père pour refuser comme tes servantes de croiser mon regard ? »

L'assemblée resta muette, stupéfaite. La Déesse frémit d'une noire colère.

« C'est ce que tu crois sombre fou... Lloth ne craint personne. Mais puisque tu réclames de voir la mort en face, c'est ce que tu auras.. »

« Non, Déesse !»

Une femelle accouru jusqu'à l'autel.

« Qu'est ce qui te prend Ilharess d Aleanrahel ? » mugit-elle.

« Déesse, ne cédez pas à sa demande... » elle sembla chercher une justification à sa subite intervention. « Ne levez pas le maléfice, c'est plus prudent... »

Lloth jeta sans tête en arrière dans un rire démoniaque.

« Retourne à ta place ! » commanda-t-elle, glaciale. S'adressant à son Ulathtallar « Qu'on ne me dérange plus ! »

Les Yochlol raccompagnèrent sur le champ la Matrone à sa place. Lloth prononça la contre formule. Mes paupières se libérèrent alors de leur poigne maléfique, irradiant d'une lumière émeraude le visage de la Déesse, déformé de surprise. Elle s'apprêta a reculer quand je lui saisis la nuque, empoignant ses longs cheveux blancs pour la ramener à moi, la dévorant du regard, plongeant dans ses yeux blanc, au fin fond de son esprit haïssable. La foule hurla, ses sbires prirent d'assaut l'autel.

Hypnotisée par mon flux spirituel, Lloth se plia a ma volonté, acceptant le baiser empoisonné qui causerait sa chute. Ma langue se glissa dans sa bouche s'éraflant sur ses crocs. La saveur de mon sang l'enivra, l'incitant à me rendre mon étreinte, lacérant ma peau de ses ongles effilés.

Une brèche s'ouvrit subitement dans l'espace temps, paralysant ses fidèles de terreur. La Matrone d'Aleanrahel tenta de prendre la fuite quand une force phénoménale les fit s'agenouiller toutes une à une dans le sanctuaire.

Une aura spirituelle vagissante entourée d'un flot de lumière noire sortit de la brèche faisant vibrer le temple.

La tête de la Déesse fut tirée violemment en arrière, arrachée à moi. Un être charismatique à la peau ténébreuse apparut derrière elle, braquant son regard d'un vert émeraude en tout point semblable au miens dans ses yeux. Ma bouche s'entre ouvrit, ne comprenant rien de ce qu'il se passait. La brèche se referma.

« Tu m'appartiens, Lloth... »

Son corps était recouvert d'une armure de métal sombre, orné de visages aux expressions terrifiantes. Il portait dans son dos une épée immense, serpenté tel un kriss. Ses cheveux étaient courts et noirs comme le néant. Plantées sur son crâne, six cornes.

Il posséda sous mon regard hébété la Déesse Araignée, vaincue. Autour de son cou pendait un médaillon d'or gravé d'une main à six doigts. Mon sang se pétrifia dans mes veines. Mes yeux glissèrent jusqu'à ses mains, six longs doigts griffus...

Un contact vaporeux sur mon épaule.

« Ztefano... »

« DÉMONS ! » hurla l'Ilharess d'Aleanrahel.

Sans se tourner vers moi, de sa forme originelle suintant une puissance spirituelle scintillante, il s'avança au bord des marches.

« Qu'est ce que ça veut dire ?! » lança la matrone de la Maison Helviiryn.

Ztefano joignit le bout de ses doigts, profondément calme.

« Le Prince Noir reprend ce qui lui revient de droit. »

Le Prince Noir ? Qui était-il ?...Je ne comprenais plus rien.

« Graz'zt ! Nous n'en resterons pas là ! » s'insurgea la matrone d'Aleanrahel.

« Que fait ce Démon ici ? » répliqua l'Ilharess en direction de son homologue.

Le visage imprécis de Ztefano souriait.

« Le mensonge vous a empoisonné de l'intérieur...Lloth a été déchue...» tendant son bras dans ma direction. «Avec l'aide du fils du Prince, et du machiavélisme des dirigeantes du premier pilier. »

J'observais la foule toujours prosternée, complètement sidéré.

«L'Ullathalar avait été engrossée par le Démon ?! » mugit la matrone.

« Évidemment...le Prince Noir ne reste jamais sur un échec. Mais ne faisons pas durer plus longtemps ce suspens insoutenable, et dévoilons ce que certaines se sont appliquées à maquiller pendant deux décennies."

Pendu à ses lèvres.

"Après que Lloth ai réussit à éconduire le Prince, il décida de séduire la femelle la plus proche de la Déesse, dans l'espoir que son fils réussisse là où il avait échoué. Jeggred Dhunnyl n'a été qu'une pauvre victime des machinations de la Maison Aleanrahel pour tenter de conserver son Ulathtallar en place, et de garder son statut de favorite auprès de Lloth. D'une pierre deux coups, n'est ce pas malla Illharess ? » s'adressant à la matrone ironiquement. « Faire tomber un mage-lame un peu trop puissant, et un peu trop proche de son Archi-prêtresse en l'accusant de viol, c'était bien pensé, mais c'était sans compter sur l'esprit diabolique de la Déesse qui contre toute attente décida de réduire l'enfant maudit en esclavage, au grand désarrois de sa Maison. Sous les ordres du Premier Pilier, la Griffe noire tenta de tuer son enfant à l'aide de poison spéciaux. Vous sous-estimiez la puissance d'un demi-démon, matrone, même dans le ventre de sa mère...Le sort a finit par se retourner contre vous, et une fois Helevorn né, votre Ulathtallar mourut dans d'atroces souffrances...Fâcheux. »

« Ignoble traîtresse ! » cracha la matrone d'Helviiryn.

Bouleversé par ce que je venais d'entendre, je restais assis, prostré. Mon esprit se brouilla un moment, jusqu'à ce que la voix profonde et implacable du Prince Noir m'arrache à mon absence.

« Mon fils. »

Je levais la tête. Lui et son serviteur se tenaient face à moi. Lloth avait disparu ainsi que tous ses fidèles, comme volatilisés.

« Helevorn » captant mon attention. « Tu m'as permis d'asseoir ma domination sur le peuple des profondeurs. Tu as gagné le droit de rejoindre la place qui te revient à mes côtés, à Azzgarat (5). Ton frère Anthux (6) t'y attend avec impatience. »

Je secouais la tête, reposant mon front dans ma main.

« Non...non...Non. Je ne veux pas. Je...Ztefano, tu t'es servit de moi ! »

« Appellez-moi Verin, Seigneur...Ztefano n'est qu'une couverture.»

Les bras m'en tombèrent, je ne cessais de secouer la tête. Il m'appelait « Seigneur », je n'en revenais pas.

« Pourquoi m'avoir mentit ? »

« Si je vous avais dis toute la vérité, auriez vous fait tout ce que vous avez fait ? Vous connaissez parfaitement la réponse. Si je vous avais révélé votre véritable identité, vous auriez refusé d'y croire, alors, j'ai préféré vous rendre les choses plus faciles. »

Il était évident que non. Ce que j'avais devant les yeux me paraissait tellement improbable...

« Non...non...ce n'est pas possible... »

« Et pourtant, tout concorde parfaitement, votre Altesse infernale. La vérité vous aveugle douloureusement un instant, mais vous l'accepterez. Votre nature est un don. Vous êtes puissant.»

« Je n'ai que faire de cette puissance ! »

« Vous apprendrez, ici et ailleurs, que votre pouvoir est immense et qu'il est un don plus qu'un fardeau. Vous êtes jeune Seigneur, apprenez à le canaliser, et le monde s'agenouillera devant vous. »

« Ztefano ! Retire moi ce pouvoir ! Je n'en veux pas. Je veux vivre normalement, je veux quitter Che'el et rejoindre la surface, voilà tout ce que je désire ! »

« Le pouvoir qui vous habite est hérité, je n'ai fais que l'éveiller...Il m'est impossible de vous en séparer. Votre seule alternative est d'apprendre à le maîtriser. »

« S'il tient tant à rejoindre la surface, qu'il en soit ainsi. Peut être changera-t-il d'avis. »

La brèche chaotique se rouvrit soudainement, propulsant une aura brûlante jusqu'à moi.

« Au revoir Helevorn. »

« Adieu.. » répondis-je froidement.

Une sourde colère m'habitait. J'étais passé d'enfant issu de l'amour, à enfant issu d'un viol commit par un Drow, pour finir enfant né sous la volonté de pouvoir et de domination d'un Prince Démon...

Graz'zt disparut dans les ténèbres.

« Je vous écoute Seigneur. Que voulez-vous ? »

« Mène moi à la surface, avec Rizzen, un prisonnier qui... »

« Je sais...il a tout fait pour contrer le sortilège mais sa force spirituelle était trop faible. Je le renverrais à l'extérieur avec vous. » coupa-t-il.

« Comment le sais-tu ? »

« Je sais tout ce qu'il s'est passé, dans les moindre détails. Je vous ai entendu m'appeler, et contrairement à ce que vous pensez, je vous ai aidé. J'ai fais en sorte de brouiller vos ondes énergétiques de sorte à ce que vous passiez inaperçu. Sans quoi, les sorcières de Che'el aurait très vite repérer votre aura démoniaque, et vous seriez déjà mort. »

Silence.

« Ne perdons pas plus de temps... »

« Attend ! Libère aussi tous les esclaves. »

« Ce sera fait Seigneur. »

"Avant que tu ne partes...J'ai besoin de savoir...Qui est réellement le Prince Noir ?"

"Graz'zt est l'un des démons les plus puissants des Abysses, il règne sur trois strates. Son pouvoir principal est le charisme. Il use de sa puissance et de sa beauté sombre pour soumettre les femelles à sa volonté plutôt que de régler ses affaires dans le sang. Aucune n'y échappe, a part dans quelques très rares exceptions...Si d'aventure vous décidiez de rendre visite à votre père et votre frère, sachez qu'ils habitent au cœur d'un palais d'argent, composé de soixante-six tours d'ivoires, et que vos serviteurs sont déjà prêts à vous accueillir."

Sans attendre de réponse de ma part, il s'inclina respectueusement avant de reculer dans la brèche. Les ténèbres chaotique l'engloutirent avant de se refermer, me laissant seul au milieu du sanctuaire...

Après avoir pris quelques instant pour me remettre, je me levais de l'autel squelettique, observant ce lieu que je n'avais encore jamais vu. Un battement de paupière. Je m'écroulais, inconscient...

EPILOGUE

Une odeur particulière me chatouilla les narines. J'ouvris lentement les yeux. Des points lumineux éclairaient la voûte assombrie. Sous mes mains, des brins frais chatouillant mes paumes, je tournais la tête. Allongé a quelques mètres, inconscient, Rizzen. Je me redressais. Nous nous trouvions au milieu d'une plaine...je ne retrouvais plus la roche, je ne retrouvais plus l'odeur minérale et caverneuse de Che'el, mais une toute autre odeur, l'odeur de l'air frais, l'odeur de la surface...

FIN

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(1) Maudit

(2) Marcher en dehors d'une maison et de la déesse araignée c'est marcher dans la tombe

(3) Autel sacrificiel

(4) Poignard d'araignée sacrificiel

(5) Royaume de Graz'zt qui s'étend sur trois strates des Abysses

(6) Demi-démon issu d'une mère drow, commandant des armées démoniaque du prince noir

Modifié (le) par Helevorn
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