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Terre des Éléments

Deux capitaines morts valent mieux qu'un


Exoriel
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Son attention fut attirée par un écriteau  qui n'était pas présent lors de son départ de l'auberge de la Mine. Elle aurait pu continuer son chemin, suivre avec précaution les pas du guerrier qui marchait devant elle, mais sa curiosité fut la plus forte. Elle observa l'igné s'éloigner de quelques mètres, puis les alentours d'un bref coup d'œil. La curiosité n'était pas la seule à prédominer sur sa raison, son instinct de protection aussi. Mais après tant d'années, les vieilles habitudes se faisaient féroces. Malgré la quiétude du lieu et des terres en général, elle restait prudente. La nécromante abandonna l'objet de sa réflexion pour celui qui avait attisé sa soif de savoir.

 

Elle se fixa devant le parchemin cloué sur le bois et entama la lecture. Un sourire s'étira sur son visage, croissant ligne après ligne. Les cinq premières manquèrent de la plonger dans l'hilarité, mais elle garda sa contenance. Même si elle fut justifiée la moquerie était déplacée, elle préférait s'adonner à d'autres formes de malveillance que celle-ci. Exoriel n'alla pas au bout de sa lecture, celle-ci se révélant inutile. Ils disaient tous la même chose. Feu Ashbert comme lui avait tenu un discours similaire afin de rassembler le peuple autour de lui, et lui ériger une caserne, de la poudre aux yeux. Cette même caserne où il s'était cru invincible et où il avait péri, par orgueil ou par faiblesse. Elle arracha le parchemin de son attache d'un geste brusque, en se remémorant la bataille sur le toit, la foudre qui s'était abattue avec colère et rage sur lui, sa victoire. De lointains et sanglants souvenirs qu'elle balaya après avoir plié avec délicatesse l'affiche.

 

Elle releva les yeux, ces derniers croisant celui du guerrier qui l'attendait. Elle rangea sans un mot la feuille et s'avança dans sa direction, légèrement agacée. En effet, depuis la mort du dernier capitaine, elle s'était octroyer la bâtisse de la Garde, et pourtant ils ne cessaient pas de s'installer de nouveaux « propriétaires ». Le message ne semblait pas assez clair, pourtant, elle y avait mis les formes. Si elle avait voulu faire plus explicite elle ne l'aurait pas pu. Le cadavre du propriétaire des lieux, son nom et sa revendication sur le mur à l'entrée paraissaient être des motifs suffisants de fuite, d'appropriation.  

 

Elle aurait pu, tout simplement, ignorer ses menaces, ses paroles, comme elle avait pris l'habitude de le faire depuis son retour, mais son désir de provocation prit le dessus. Son esprit s'éparpillait parmi toutes les idées qui se dessinaient dans sa tête. Tellement de possibilités, mais une seule se devait d'être exceptionnelle. Malheureusement, de sa chambre d'auberge, il lui était impossible de réaliser le plan qu'elle avait décidé de suivre. Seuls ses appartements au Manoir possédaient les clefs de cette mise en œuvre. Exoriel murmura quelques paroles, un léger sourire éclairant sa mine, à celui qui enflammé son cœur, et attrapa sa main sans attendre son accord. Ils disparurent de la Hutte de l'Hermite. Laissant à leur place une mince brume sombre, qui d'ici quelques secondes, s'évaporera, effaçant toutes traces de leur présence.

 

C'est avec soulagement qu'elle se retrouva dans ses appartements, sa chambre plus précisément. Lui à ses côtés, ses doigts fermement ancrés à sa main. Elle avait l'habitude de ce petit tour avec les objets et parfois avec elle-même, mais jamais elle n'avait tenté en la présence d'un tiers. Si elle ne doutait pas de son pouvoir et de sa capacité à le faire, le risque zéro n'existait pas. Ses doigts se délièrent des siens avec lenteur et elle s'éloigna en retirant son ombrageuse cape de ses épaules la déposant sur le fauteuil de son bureau.

 

Après s'être attablée à ce dernier, elle attrapa un morceau de parchemin et commença à rédiger à l'encre rouge de sa plume noire :

 

« Je suis La Coupable. Nous n'avons pas l'honneur de nous connaitre, c'est là un fait bien triste. J'espère que vous remédierez à cela rapidement.

 

Vous trouvez accompagné de ce mot un portait de ma personne, afin qu'il vous soit impossible de me rater. C'est important de le préciser, voici plus de deux années que votre prédécesseur vous a quittées. Je savoure encore la mort de cet impudent personnage. Jamais je ne fus inquiétée d'une quel qu'once répercussion, ce n'est point vous qui alliez créer la terreur en mon être. La Garde, comme vous le dîtes si bien, est hors de contrôle. Ce n'est pas demain, ni plus tard que vous parviendrez à rendre la justice. Une justice quoi que bien bancale pour qu'elle ne punisse ces criminels, mais surtout ne s'en préoccupe que des années après leurs méfaits.

 

Mais l'adage ne dit-il pas «  mieux vaux tard que jamais » ! Dans votre cas, il aurait mieux fallu que ce ne soit jamais.

 

Vous ne possédez pas suffisamment d'hommes pour vous lancez dans une traque à mon encontre et protéger la population. Les « forces » du bien sont inexistantes, et pour le peu de leurs présences, elles sont faibles. Ainsi sont les faits. Traquez-moi et vous serez sous le joug de la colère d'un peuple qui s'effile de jour en jour, d'année en année.

 

Chassez-moi, et vous mourrez comme votre prédécesseur.

 

Je suis Exoriel. Générale des Sapere Aude. »

 

Nul besoin de signer, nul besoin de lui expliquer le sous-entendu. Sa réputation n'était plus à faire, celle des siens non plus.

Sa plume déposée sur le côté, elle attrapa le parchemin, et relu sa lettre avec attention, assise avec nonchalance dans son fauteuil. Ses yeux se relevèrent légèrement, marquant la présence de son guerrier, elle lui sourit et termina sa relecture.

Le message lui convenait à la perfection. Son orgueil et sa vanité transpiraient dans chaque mot, rendant cette réponse "“ guère demandée "“ des plus provocante.  Excellente ! Elle la déposa, ne rajouta rien de plus et saupoudra le parchemin d'une poudre avant de souffler dessus, de manière à sécher l'encre. Avec précaution, elle plia le parchemin et y intégra un portait griffonné de son visage, qu'elle scella à la cire du sceau des Sapere Aude. Elle ne nomma pas le destinataire et fit disparaitre le message de la même manière qu'ils étaient parvenus au Manoir. La missive se retrouverait d'ici quelques instants dans le bureau de la caserne, celui occupé par le nouveau capitaine déchu.

 

Exoriel quitta sa position avec une grâce toute féline, afin de se placer dans les bras de son amant. Ses lèvres contre les siennes, elle lui murmura, ses iris dorés noyés dans les siens :

 

« Et si nous placardions des avis de recherche à mon encontre partout ? Le jeu n'en serait que plus palpitant ! »

 

Le risque zéro n'existait pas ... Le faire croitre était un jeu dangereux ... Surtout lorsque l'on avait quelque chose, tout particulièrement quelqu'un, à perdre.

Modifié (le) par Exoriel
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