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Terre des Éléments

Contestation obscure.


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Un soleil cuivré se couche sur le désert brûlant entourant la ville. Les murs délabrés des ruines prennent une teinte rosée, dernière touche de couleur avant que la nuit n'enveloppe les lieux de son voile d'obscurité. Dans quelques minutes, le silence va se troubler de la respiration rauque de dizaines de momies. Dans quelques minutes, cet endroit que j'affectionne deviendra un spectacle macabre. Mais ce soir, je ne prends pas le temps d'admirer le paysage. Dans quelques minutes, je ne serai plus là.

Je descends lestement de mon poste d'observation et attrape la petite bête lovée au creux de mon cou pour la déposer délicatement à terre. Ses yeux intelligents me fixent, attentifs, tandis que je murmure quelques mots dans une langue ancienne. Immédiatement, la salamandre fait demi-tour, et je prends le temps de regarder son corps onduler sur le sable, jusqu'à ce qu'il se fonde dans la pénombre.

Me voilà seule, je vais pouvoir me défaire de la sourde colère grondant au plus profond de moi, en m'adonnant à l'une de mes activités favorites. Mais il me faut tout d'abord trouver l'objet de mes désirs. Direction l'une des tavernes de la ville. Il n'est pas trop tard pour en trouver un qui soit encore en état de fonctionner.

La porte de bois grince lorsque je la pousse, et aussitôt se tait le brouhaha des conversations. Il est rare de voir entrer une femme, d'autant plus si elle est seule. Les yeux vitreux des pochtrons me détaillent, de haut en bas. J'ai l'habitude, je n'y prête pas attention, pas plus qu'aux interpellations obscènes des ivrognes cuvant leur vin du soir au matin.

Immobile, je cherche du regard celui qui saura réveiller quelques bas instincts. Je tuerais bien tous les autres, mais j'ai mieux à faire ce soir.

Je le repère enfin, assis dans la pénombre, silencieux mais l'œil brillant d'intérêt. Le murmure des discussions s'estompe lorsque j'avance entre les tables pour m'installer à la sienne. Demi-sourire mystérieux, quelques mots pour qu'il m'offre une boisson à laquelle je ne toucherai pas, et il mord à l'hameçon. Les hommes sont tellement faciles à manipuler...

De près, je l'observe avec attention, me félicitant intérieurement de mon choix. Il est particulièrement beau. Des yeux émeraude surlignés de longs cils enjôleurs. La peau mate et veloutée, des cheveux d'ébène soignés, retenus par un ruban de satin, et quelques mèches rebelles encadrant son visage gracieux. Le corps est bien fait, je n'en prendrai que plus de plaisir.

Il ne me faut pas plus de quelques minutes pour l'attirer en dehors de la taverne. Ma main caresse la sienne pour le guider à l'extérieur de la ville, en direction des ruines. Là, adossée à un mur, je le laisse s'approcher encore. Sentir le désir qui l'anime est exaltant...

Mes doigts se faufilent sous sa tunique.

Il se penche vers moi.

Ma paume atteint son cœur ardent.

Ses lèvres effleurent les miennes...

Il s'écroule à mes pieds.

Tellement simple... c'en est presque déconcertant.

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  • 2 weeks later...

Il se réveille sur une table de bois recouverte d'une étoffe de velours cramoisie, poignets et chevilles solidement attachés, son sourire charmeur disparu sous un bâillon. Ses yeux reflètent à présent la curiosité, il s'attend sans doute à un jeu érotique d'un genre particulier... cela me fait sourire. Un rictus cruel révélant mes intentions malsaines. Un peu trop tôt ? Tant pis pour le suspense.

Avec douceur, je relève son menton et me penche vers son cou, effleurant sa peau de mes lèvres, jusqu'à ce qu'il se détende. Puis soudain, je mords sa chair offerte, goûtant sans retenue à son sang chaud et parfumé. J'entends vaguement un gémissement, de plaisir ou de douleur, je ne sais pas. Sa respiration s'accélère légèrement, son cœur se met à battre plus fort. Je l'apaise d'un baiser sur la tempe...il se calme, je vais pouvoir passer aux choses sérieuses.

Je ne les avais plus utilisé depuis un certain temps, il est temps de laisser leur éclat d'argent se refléter à nouveau dans mes yeux sombres. D'une main, je caresse doucement ses cheveux, de l'autre, je saisis une petite dague, tranchante à souhait, plus pointue qu'une canine de vampire. Et la lueur perplexe de ses iris verts se change instantanément en peur. Bien, nous pouvons commencer, il est prêt.

Je le lui susurre à l'oreille, tout en donnant un coup de lame habile à sa tunique, dévoilant son torse musclé, que mes doigts viennent caresser brièvement. Quel dommage d'abîmer un si beau jouet...

Je le contemple encore quelques minutes, tout en repensant à la raison pour laquelle il est là, réduit à désirer la mort. Car c'est bien ce qui l'attend.

- Ils l'ont fait ! Malgré toutes mes mises en garde. Ne leur ai-je pas déjà prouvé, pourtant, que mes intuitions ne devaient pas être prises à la légère ?

Il ne sait sans doute pas de quoi je parle, mais je vais le lui expliquer. Il va connaître les moindres détails de mon avis sur cette « alliance », et jamais ne pourra les répéter à qui que ce soit.

- Tant pis pour eux... ils s'en mordront les doigts... jusqu'au sang...

Et tout en murmurant cet avertissement, j'entaille méthodiquement chacun de ses doigts délicats. Il serre les dents, plisse les yeux mais ne bronche pas, essayant de croire encore à son courage. J'émets un ricanement discret et continue mon petit rituel en léchant son index d'un air gourmand.

- Avions-nous besoin d'une bande de pseudo démons imbus d'eux même ? Bien sûr que non...

Le ton est monocorde, pour que toute son attention soit portée sur les douleurs que je lui inflige. Je frôle ses pieds nus, saisis un fragile orteil et le tord d'un coup sec, faisant retentir un craquement sinistre. Le beau mâle étouffe un gémissement de douleur, des larmes naissent au coin de ses yeux, son front commence à perler. J'esquisse un sourire carnassier, c'est loin d'être terminé.

- A quoi bon toutes ces belles paroles ? Puissance et implacabilité, voilà ce que devrait représenter notre phoenix aux yeux de tous !

D'un geste ample et rageur, j'imprime une profonde lacération à son bas-ventre. Il ne peut réprimer un cri cette fois, et c'est avec une fascination malsaine que j'admire le fluide écarlate s'écoulant de la blessure pour imbiber l'étoffe carmin. Je crois qu'il a enfin compris qu'il n'en réchapperait pas : je peux lire la panique au fond de ses yeux de jade. Panique teintée de supplication, lorsque je m'approche pour dégager quelques mèches de son visage trempé de sueur. Mais la pitié est une notion qui m'est inconnue, malheureusement pour lui.

Avec d'infinies précautions, je saisis une fiole de cristal remplie d'un liquide d'une extrême rareté. Une odeur de fleurs se propage autour de moi lorsque j'ôte le bouchon finement ouvragé pour verser quelques gouttes de la substance nacrée sur la plaie béante. La brûlure est immédiate, et la douleur tellement intense qu'il suffoque pendant un instant. Le parfum de la chair calcinée s'insinue dans toute la pièce, à mesure que ses entrailles sont rongées par l'acide. J'admire le travail de l'essence corrosive pendant quelques minutes, me demandant s'il va survivre ou abandonner la lutte pour sa vie, avant de reprendre ma dague. Il est résistant finalement...

- Ils me dégoûtent tous... incapables de garder une once de fierté, ils se jettent à corps perdu dans la facilité. C'est pitoyable.

Lui ouvrir mon Ame, comme je lui ouvre les veines. Tout en prononçant ces mots, je l'ai contourné, laissant mon index glisser sur tout son corps, atteignant sa jambière, que j'écarte d'un tranchant efficace, révélant sa cuisse musclée. Je m'en mordille la lèvre inférieure, dégustant par avance le plaisir que va me procurer ce dernier supplice avant l'apothéose.

J'inspire profondément, comme une artiste s'apprêtant à achever son œuvre, et incise consciencieusement l'épiderme doré de mon intime inconnu. Juste une petite entaille me permettant de glisser la lame sous la peau, pour la décoller tout doucement. Voilà, il hurle, pleure... ses poings si serrés que ses ongles s'enfoncent dans sa chair. Tout son corps se tend, tentant vainement de résister à la douleur. Et moi, ignorant ses supplications, je continue mon dépeçage, murmurant toujours pour évacuer ma rancœur, un léger sourire au coin des lèvres.

J'ai l'impression qu'il ne m'écoute plus. Il glisse doucement vers l'inconscience, comme en témoignent ses yeux, perdus dans le néant, luisants d'une folie le protégeant peu à peu de la souffrance. Ce n'est pas si grave, j'ai bientôt terminé mon monologue.

Tout doucement, je pique la peau de son torse, juste à l'endroit du cœur, et enfonce la lame d'un ou deux centimètres. Il réagit à peine, seul son regard s'abaisse brièvement vers l'arme, puis son corps entier commence à frémir.

- Et le plus drôle, c'est qu'ils croient vraiment que ça va fonctionner... Mais il n'est pas question que je leur fasse confiance... qu'ils soient déjà satisfaits que je résiste à l'envie de leur broyer les os pour les regarder se tordre de douleur...

Les frissons s'intensifient jusqu'à devenir tremblements incontrôlables. Ses yeux se révulsent, mais je continue à chuchoter, imperturbable.

- Qu'ils se complaisent dans leur médiocrité, mais je ne cautionnerai pas leur faiblesse...

Des deux mains, j'enfonce alors la dague jusqu'à la garde dans sa poitrine. Quelques convulsions encore, et il reste enfin inerte, dans un silence de plomb. Machinalement, je referme ses paupières sur ses beaux yeux verts.

Puis, indifférente à la scène morbide que je viens de créer, je me détourne du cadavre mutilé et appelle doucement :

- Yzrael, je sais que tu es là...

La salamandre sort alors de sa cachette, se faufile entre les pieds des meubles pour grimper sur la table de torture. Son corps noir se détache sur le tissu vermillon, lorsque l'animal vient lécher un peu du sang de la victime. Je lui tends la main, dans laquelle il monte, et viens déposer un baiser affectueux sur son museau.

Enfin, sans un regard en arrière, je sors de la pièce pour une promenade nocturne. Cette séance n'a pas eu l'effet escompté, je suis toujours en colère, même si je n'en montre rien.

Encore un peu de patience...

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