Charybde... Un nom qui ne fut choisi par hasard par sa défunte mère... Charybde... Créature mythologique qui ne laissait de ce qui traversait sa gueule rien ou presque...
Né d'une union forcée, l'enfant n'eut guère de chance dés le départ, sa venue fut accueillie comme la promesse de la mort à venir... Lorsque ses yeux pour la première fois s'ouvrirent sur le monde, sa mère poussa un hurlement de désespoir, non seulement lui avait-on volé son innocence, mais également imposé un monstre pour rejeton, rejeton sans père réel, comment savoir lequel des porcs qui avaient joué avec elle était à l'origine de ce monstre ?
Le petit ne reçut jamais ni douceur ni tendresse, en lieu et place, ce n'était que réprimande, regards horrifiés et haine farouche, si bien que très tôt, il préféra partir le plus loin possible tant que le soleil était visible afin de ne pas subir les brimades de celle qui pourtant aurait du l'aimer... Il ne comprenait pas le pourquoi des réactions maternelles, il ne comprenait qu'une chose : elle le haïssait du plus profond de son âme, l'instinct du petit lui disait que chaque instant passé dans le même lieu qu'elle n'était qu'une ouverture sur la mort, qu'elle n'hésiterait pas à la première occasion à lui arracher non seulement les yeux, mais tout ce qui faisait de lui Charybde...
Vint le jour fatidique ou, après une journée à boire plus que de raison, sa mère tenta d'éliminer cette tache qui lui pourrissait la vie depuis, à son avis très personnel, bien trop longtemps! Alors qu'il rentrait chez lui, la porte s'était ouverte sur une véritable furie armée d'un long couteau de cuisine, couteau qui lui a laissé plus d'une marque indélébile sur le torse, avant de se retourner contre sa mère, sa tortionnaire, un geste maladroit, un geste de défense qui paraissait bien futile. L'arme improvisée avait ricoché sur le bras du jeune homme, y laissant une autre marque avant de s'enfoncer dans l'estomac de celle qui aurait dû lui apporter amour et paix... Sentant sa vie se quitter, les yeux pleins de haines, alors que les larmes coulaient sur les joues de Charybde, sa mère lança sa main, déchirant son visage près de l'œil de ses ongles...
Depuis lors, bien sur l'enfant a grandi, bien sur il a guéri, pourtant, il n'a jamais cherché à cacher ses traits, il était un survivant, et continuerait à survivre par tous les moyens utiles... Comment a-t-il pu survivre, vous demandez-vous sans doute ? Et bien, il arrive parfois que l'étoile de la mort laisse place à celle de la chance, il faut croire que ce jour-là, ce fut cette dernière qui luisait sur la tête du jeunot.
Une jeune sœur en pèlerinage passa par là, l'enfant était mourant, sa mère déjà morte... N'écoutant que son bon cœur, la none récupéra le rejeton maudit, ne s'occupant pas de ses cheveux couleur de sang, pour l'emmener au couvent tout proche où elle se rendait. Bien sûr il ne fut pas permis qu'il puisse y vivre, ni même y rentrer, cependant, la mère supérieure accorda à la jeune sœur, répondant au nom de Scylla, la jouissance d'une modeste maison, un peu en retrait du couvent, employée pour les visiteurs de marque. La cohabitation ne fut pas facile, Charybde se refusant de parler, ou de se laisser approcher, la jeune femme eut bien du mal à soigner ses blessures, bien plus encore à soigner celles qu'il avait à l'esprit, celles que rien ni personne en dehors du temps ne pourrait soulager.
í€ force de patience, de douceur, de tendresse, Scylla parvint à faire changer le jeune homme. Bien que toujours sauvage, il appréciait de converser avec la sœur, échanger avec elle quelques idées, bien qu'il ne fut guère présent en journée, il avait besoin de sa liberté et les bois tout proches lui offraient ce dont il avait besoin pour grandir sainement, il se développa admirablement, ses traits contrastant avec la couleur de ses yeux et de ses cheveux pour en faire un tout plutôt plaisant au regard. Bien sur leurs chemins divergèrent, lui jeune homme, elle bonne sœur, pourtant, il a gardé pour cette jeune femme une grande part de tendresse, et s'est depuis efforcé de trouver sa voie... Il en a trouvé une qui lui sied, celle qu'il a pu si souvent entendre évoquer dans les histoires... Celle d'un chevalier errant donc le but n'est pas tant de livrer bataille inutilement que de trouver un lieu qu'il pourrait enfin considérer comme chez lui.