La Créature Nocturne

[Zhamath]

Je suis face au vide, fiché au sol comme une pierre tombale. Je ne respire pas, je ne cligne pas des yeux, rien. Aucun mouvement. Léthargie absolue.

Je ne m'éveille qu'aux premières gloires de la lune ... aux premiers souffles froids de la nuit. Sous le soleil irradiant, je plonge dans une torpeur despotique qui ne me libère que lorsque le crépuscule ose arborer son grand voile noir. Debout dans un coin sombre de la taverne, je me fais ermite pendant des heures infinies et ne bronche sous aucun prétexte. J'observe les gens ... leurs attitudes, leurs gestes. Le temps m'a permit de connaître les moindres gestes de chacun.

Tapate ... créature qui bave sans retenue et toujours groupée avec d'autres individus tous aussi excentriques qu'elle, tous vêtus d'une manière aussi coquette et tous à gesticuler d'une façon absurde et délibérée. Créature inoffensive qui parfois se met à ramper pour des raisons obscures. Pas de danger.

Jean ... fier guerrier à la lame constamment dégainée. Ses yeux, d'un blanc lumineux, trahissent sa non-voyance. Et pourtant, il semble toujours être aux affuts et prêt à attaquer, comme si sa perception du danger était deux fois plus grande que celle des autres. Un sixième sens ? Ne pas m'en approcher, juste au cas où.

Radegonde ... rarement dans la taverne. Tout ce que je peux en dire, c'est qu'elle est munie d'un charisme grandiose et d'une beauté magistrale. Cependant, ses regards froids et austères trahissent son tempérament plutôt colérique. Dangereuse : ne pas s'en approcher.

Et tant d'autres individus si compliqués et intéressants qui me tiennent compagnie pendant ces moments de torpeur !

Mes poumons se gonflent soudainement et je sens mes muscles qui se détendent. Mon sommeil tire à sa fin. Tant mieux. Maintenant qu'il fait sombre et que tout le monde est endormi, je vais pouvoir observer tous ces gens qui me fascinent de plus près ...

Modifié (le) 21 décembre 2010 par Zhamath

[Zhamath]

La nuit tombe doucement et j'arpente entre les tables, guignant les endormis de quelques regards paisibles. Je m'approche d'un jeune guerrier et m'apprête à l'observer plus en détails lorsqu'une voix féminine se met à chuchoter mon nom. Légère, douce, presque feutrée.

Je me retourne, mais ne voit personne.

« Zhamath ». Je sursaute. Cette fois, la voix semble à côté de moi. Tellement proche en fait, que j'ai l'impression d'avoir senti le souffle chaud de cette locutrice mystérieuse cogner contre mon visage. Ma vision nocturne semble bien obsolète cette nuit, luttant pour apercevoir ne serait-ce qu'une parcelle de cette silhouette invisible.

Et soudain ...

Un bruit intense. Un coup derrière ma tête.

En moins d'une seconde, je suis étendu sur le sol froid. Ma vision devient floue et j'aperçois une silhouette à mes pieds. Et alors que j'arrive presque à en distinguer le visage, je me laisse sombrer dans une profonde inconscience ...