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Terre des Éléments

Demain dès l'aube.


Nospheria
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Quelle fatigue, c'est insensé... Je me suis littéralement trainée jusqu'à ma chambre, usant de mes dernières forces pour garder un semblant de dignité, au cas où je croiserai une Ombre. Fort heureusement, la forteresse est pratiquement vide, c'est sans doute mieux ainsi.

Assise au pied de mon lit, sur le sol de pierres glaciales, dans un silence total, je lutte pour ne pas me rendre à l'évidence. Et pourtant...

Je suis de nouveau malade... il ne manquait plus que ça. Comme si les choses n'étaient pas assez difficiles en ce moment.

La respiration sifflante, je ne peux empêcher les réminiscences de mon enfance. La voix de ma mère, dédaigneuse, me vrille les tympans « elle est de faible constitution ! ». Fragile, oui, mais j'ai quand même survécu, ne t'en déplaise sale ordure !

Une maladie si rare qu'elle n'a même pas de nom, quel comble ! La grande Nospheria terrassée par quelque chose qu'on ne peut nommer. J'ébauche un rire narquois, immédiatement interrompu par une quinte de toux, m'arrachant un gémissement de douleur. J'ai la sensation qu'on s'amuse à transpercer ma chair de toutes parts. Est-ce là ma punition, pour avoir répandu la souffrance autour de moi ? Je ne permettrai pas des dieux auxquels je ne crois pas de me donner une leçon !

Je savais, pourtant, que cela arriverait. Ce n'était qu'une question de temps, après la disparition de Togarini.

D'un geste fébrile, je fouille dans les replis de ma robe pour en sortir une petite fiole de cristal remplie d'un liquide nacré. Je l'avais gardée précieusement, mais il semblerait que le jour soit venu d'utiliser cette dernière dose.

L'essence de Noxeis, petite fleur blanche et nocturne extrêmement rare, peut soulager momentanément la douleur. Mais ingérée, elle se révèle être un poison terriblement violent. C'est plutôt dans ce but que j'avais conservé ce flacon. Pour le jour où survivre ne me paraitrait plus indispensable.

Pourtant, en tournant et retournant la fiole entre mes doigts, j'hésite à l'utiliser, d'une façon ou d'une autre. Malgré le dédain que m'inspirent nombre de ceux se prétendant aventuriers sur ces terres, j'ai encore des choses à faire ici. La première étant de retrouver « mon autre ».

Avec un soupir, je me demande pourquoi il a subitement disparu. Il n'est pas mort, je l'aurais su immédiatement, mais quelque chose n'allait pas. Il faut absolument que je le retrouve, mais je dois le faire sans eux. Eux l'ont oublié. L'heure est venue, je n'ai plus rien à faire ici, ils ne me sont plus utiles...

D'un geste rageur, je lance de toutes mes forces le fragile flacon, qui va exploser contre le mur de pierres. Je ne suis pas herboriste, je ne sais pas comment fabriquer cette substance salvatrice. Et papa a emporté son secret dans la tombe. Tant pis, advienne que pourra, j'en ai assez de tout ça. Si cette maladie me tue, tant pis, mais je ne vais pas lui simplifier la tâche.

La douleur me rend haineuse, et c'est précisément ce sentiment qui me maintient en vie, paradoxalement. Lentement, je rassemble mes quelques forces pour rejoindre l'une des rares personnes que j'estime. Lui saura me soulager quelques temps, j'en profiterai pour lui faire part de mes projets.

Demain dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne, je partirai... Tournant le dos à la forteresse, sans me retourner, sourde à mes regrets. Oui, c'est sans doute mieux ainsi.

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