Enfonçons les portes fermées

[Niniel]

Je pousse la porte, un coup de pied, elle claque avec violence sur le mur, je la rattrape avec une main, la classe.

Auberge miteuse, poussérieuse, peu peuplée, toiles d'araignées, parfait, je n'aurais pas rêver mieux.

Le tavernier est un vieux, petit et gros bonhomme, la tête diforme, il me regarde bizarrement et regarde avec dégoût mes bottes pleines de boue.

Quoi ? T'as pas vu le taudis dans lequel tu travaille et vis ? La boue, ça fera briller le sol.

La serveuse est jolie, on se demande bien ce qu'elle fout là, encore une pauvre gamine... Je ne vais pas m'appitoyer sur son sort non plus, faut pas rêver !

J'avance, avec toute la délicatesse qui ne me caractérise pas. Avoir le pas léger ? Et puis quoi encore ! Ca ne fait pas viril !

Une table au fond, je me pose sur une chaise, les pieds croisés sur la table, la boue qui dégouline sur la table, les bras croisés derrières la tête après avoir posé mon épée, énorme épée sur la table, bien en vue de quiconque me chercherais des noises.

Un rictus sur la tête du tavernier qu'il avait déjà diforme... Je lui referais bien la façade à l'épée... Calmons nous, nous sommes là pour passer la nuit, évitons les ennuis...

Dis donc, Cendrillon... faudrait arrêter de rêvasser, et de croire au prince charmant, il n'existe pas.

Ramène moi plutôt une pinte de bière et des rognons de poulets ! J'ai faim !

Ca va mettre des heures à arriver encore, tsssssss.

Je sors du tabac, et m'en roule une que je commence à fumée.

Un murmure entre le tavernier, de plus en plus moche, et la serveuse.

Elle vient me voir, pas rassurée, elle a bien raison.

S'il-vous-plait, Madame, si vous voulez fumer, c'est là-bas.

J'aspire une bouffée, je me relève légèrement sur mon siège, m'avançant vers elle, et j'envoies la fumée sur elle.

Ah ouai ? Parce que le nuage de fumée est miraculeusement stopée par une barrière invisible ?

Et ne m'appelle pas Madame, je ne suis ni vieille, ni mariée...

Va donc t'occuper de mon repas, je paye et je ne vous tue pas, soyez en heureux.

Je pose mon bras sur mon épée, mouvement hostile et disuasif.

Tavernier, je voudrais une chambre pour la nuit aussi !

Sourire en coin, rictus, ça veut dire oui.

Je finis de fumée en attendant mon repas, perdu dans mes pensées, la fumée devant mes yeux troublent ma vue, forment de drôle de dessin.

Je caresse le petit dragon de feu qui tournoit sur le manche de mon épée, celui-ci me mordille les doigts.

Seul être qui mérite ma compagnie et mon respect.

Dommage, il ne deviendra jamais un énorme dragon très puissant, mais il reste un compagnon de choix !

Ma bière arrive, je l'engloutis d'une traite...

Bluuuuuuuuuuuurp

C'est le genre de relant qui fait plaisir.

J'attrape les rognons avec les doigts, grignote les os, mange gloutonnement.

Je ne suis ni charmante, ni classieuse, ni délicate, mais n'aller pas croire que je sois déguelasse pour autant, je ne m'en met pas de partout, et je ne m'essuis pas sur mon pantalon.

Cendrillon, une autre bière !